Il y a quelque chose d’étrangement pathétique dans le dernier texte de Patrick Lagacé. Quelque chose de profondément déconnecté.
Montréal est en train de couler, littéralement, et pendant que les citoyens baignent dans l’eau, dans la saleté, dans les cônes orange et dans le désespoir, Patrick Lagacé, lui, pédale dans l’absurde pour défendre… Valérie Plante.
La seule personne au Québec, ou presque, encore prête à monter aux barricades pour défendre la mairesse la plus impopulaire de l'histoire de Montréal, c’est un chroniqueur cycliste qui s’imagine que les Montréalais détestent les pistes cyclables plus que les inondations. Vraiment?
Pourquoi Lagacé défend-il avec autant d’acharnement une administration qui, année après année, accumule les échecs, les crises, les fiascos?
Simple. Parce qu’il ne fait plus du journalisme : il fait du militantisme urbain. Et son cheval de bataille, c’est le vélo.
Il le dit lui-même : il pédale, sa femme pédale, son fils pédale. Et à force de pédaler, il a fini par rouler jusqu’au bunker idéologique de Valérie Plante.
Dans sa chronique du 20 juillet, Lagacé ne défend pas une politique publique. Il défend un mode de vie, son mode de vie. Et tant pis pour les faits. Tant pis pour les contribuables.
Patrick Lagacé ne se contente pas de défendre Valérie Plante. Il monte littéralement au front, casque de vélo sur la tête, pour justifier l’indéfendable.
Il présente les inondations comme un mal inévitable et dépeint toute critique des pistes cyclables comme une menace directe à la sécurité des cyclistes, allant jusqu’à suggérer que vouloir investir dans les égouts, c’est vouloir voir des cyclistes perdre la vie.
Lagacé devient tellement excessif, tellement dramatique, qu’on se demande s’il ne cherche pas à détourner l’attention des vraies questions sur sa vraie relation personnelle avec la mairesse.
Il y a clairement anguille sous roche.
Montréal s’effondre, mais il ne voit qu’une piste cyclable.
Pendant que des familles perdent tout à cause des inondations, pendant que les réseaux d’égouts explosent, pendant que les ruelles sentent la moisissure et que les rues sont barrées à chaque coin de rue, Patrick Lagacé répond :
« Pensez aux cyclistes ».
Ce serait risible si ce n’était pas aussi insultant.
Il cite des experts pour dire que ce n’est pas en élargissant les égouts qu’on va régler le problème. Mais personne n’a jamais dit que c’était une solution magique.
Ce que les Montréalais dénoncent, c’est le déséquilibre. Ce sont les priorités tordues. Ce sont les dizaines de millions investis dans les pistes cyclables, pendant qu’on repousse d’année en année la modernisation du réseau souterrain.
Lagacé tente un tour de passe-passe rhétorique : il accuse Soraya Martinez Ferrada de faire de la démagogie sur les égouts, alors qu’il fait exactement la même chose… avec les pistes cyclables.
Soraya Martinez Ferrada n’est pas une politicienne sortie de nulle part. Ancienne ministre fédérale responsable de l’Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec, elle est maintenant cheffe de l’opposition officielle à l’hôtel de ville, à la tête du parti Ensemble Montréal.
Contrairement à Valérie Plante, elle n’hésite pas à se rendre sur le terrain, à écouter les commerçants, les familles, les sinistrés.
Quand elle dénonce le gaspillage lié aux pistes cyclables, ce n’est pas par opportunisme. C’est parce qu’elle entend ce que les Montréalais disent à voix haute depuis des mois. Et ça, ça dérange Patrick Lagacé.
Il avance que Montréal investit 20 fois plus dans les infrastructures d’eau que dans les pistes cyclables. Vraiment? Il oublie de préciser que les travaux souterrains sont étalés sur dix ans, pendant que les pistes cyclables, elles, surgissent partout et maintenant.
Il oublie aussi de mentionner que certaines pistes coûtent plus de 14 millions de dollars pour une seule rue. Il oublie surtout que ces projets sont imposés sans consultation, au détriment des commerçants, des automobilistes et de la fluidité urbaine.
Et puis, il oublie l’essentiel : ce n’est pas une question de vélo versus égout. C’est une question de leadership. Et Valérie Plante n’en a plus.
Pendant que les sous-sols se remplissent d’eau, la mairesse, elle, fait des conférences de presse sans solutions, demande aux citoyens de poser de la céramique, et promet… des rues « éponges ». Sérieusement?
Quand les gens attendent des réponses, elle leur parle de sols perméables. Quand les citoyens demandent une plateforme claire pour savoir s’ils sont en zone inondable, elle promet un site web… un jour.
Et pendant ce temps, les contribuables continuent de payer des taxes toujours plus élevées, pour des services toujours plus lamentables.
Et Lagacé? Il trouve le moyen de la défendre.
Pas une question sur son absence constante. Pas un mot sur son indifférence affichée lors des conseils municipaux.
Rien sur son salaire de plus de 207 000 $ pour une présence fantomatique. Pas une seule interrogation sur sa responsabilité politique dans l’effondrement du système de gestion des eaux. Zéro.
Mais beaucoup, beaucoup d’espace pour fustiger… une politicienne d’opposition qui ose poser des questions.
Ce n’est pas la première fois que Patrick Lagacé agit comme garde du corps médiatique de Valérie Plante.
Chaque fois que la mairesse est dans l’eau chaude, on peut compter sur lui pour dégainer une chronique où il se porte à sa défense, minimisant les problèmes, ridiculisant les critiques, valorisant ses intentions.
On se rappellera cette entrevue complaisante où Lagacé, sur le 98,5 FM, l’avait laissée dérouler son discours sans jamais l’interrompre. Pas de relance, pas de contradiction. Du matelas de velours mur à mur.
C’est le même Patrick Lagacé qui, récemment encore, riait du fait qu’elle ne peut même pas aller chercher une pinte de lait sans se faire reconnaître.
Une affirmation reprise de sa propre entrevue avec la journaliste de La Presse, Isabelle Haché, dans laquelle cette dernière qualifiait Valérie Plante comme une sorte de déesse urbaine, forte, belle, adulée. Un culte médiatique gênant.
D’ailleurs, une question commence sérieusement à faire surface : quelle est la vraie nature de la relation entre Patrick Lagacé et Valérie Plante?
Sont-ils des amis dans l’ombre? Des complices de vision urbaine? Ou tout simplement les deux meilleurs amis médiatiques de Montréal?
Ce qui est sûr, c’est que chaque fois que la mairesse est en difficulté, Lagacé sort sa plume pour la protéger comme une soeur, la défendre, la protéger. Une fidélité journalistique étonnante qui alimente, avec raison, bien des soupçons sur sa prétendue neutralité.
Mais la réalité, c’est que Montréal ne va pas bien. Et les gens ne sont pas naïfs.
Ce que Lagacé refuse de voir, c’est ce que les Montréalais vivent. Une ville paralysée par les cônes. Des rues sans fin en travaux.
Des quartiers entiers défigurés. Des itinérants qui dorment à même les trottoirs. Des chantiers de piétonnisation qui ruinent les commerces. Et une insécurité qui grimpe pendant que la police manque de ressources.
Et pendant que les citoyens s’enfoncent, la mairesse, elle, roule en vélo avec escorte policière. Elle dépense des millions pour sa sécurité personnelle au marché Jean-Talon. Et elle se vante d’avoir les deux mains sur le volant… alors qu’elle est absente à ses propres conseils municipaux.
Oui, on comprend mieux maintenant pourquoi Patrick Lagacé défend avec autant de zèle Valérie Plante : ils vivent dans le même monde.
Un monde où tout va bien. Où la piste cyclable de Saint-Denis est un « succès ». Où les inondations sont inévitables. Où les critiques sont dangereuses. Où ceux qui posent des questions sont des démagogues.
Mais le reste du Québec ne vit pas dans ce monde.
Le reste du Québec vit dans une ville où les sous-sols sont sous l’eau, où les taxes augmentent, où les services s’effondrent, où les rues sont défoncées, et où la mairesse s’en tire avec un salaire d’élue absente.
Et pendant que tout s’écroule, Patrick Lagacé nous demande de pédaler… plus fort.