Jayden Struble savait qu’il devait frapper un grand coup hier soir. Avec toute la tempête de rumeurs qui l’entoure depuis plusieurs semaines, l’Américain n’avait pas le droit à l’erreur.
Il a choisi la voie la plus simple et la plus brutale : cogner, cogner et encore cogner. Cinq mises en échec solides, bien senties, qui ont immédiatement rappelé aux dirigeants et aux partisans qu’il n’est pas un figurant dans cette lutte féroce pour un poste de régulier.
Ce n’était pas qu’un détail. Dans une rencontre où plusieurs joueurs jouaient comme s’ils voulaient éviter les contacts, Struble a imposé sa loi. Il a terminé sa soirée avec une fiche qui parle d’elle-même, démontrant que, même si Martin St-Louis donne tellement de "love" à Xhekaj depuis le début du camp, Struble n’entend pas s’effacer.
Ces coups d’épaule avaient aussi une valeur symbolique. Tout le monde dans le vestiaire sait que son nom a circulé à Boston dans ce fameux package deal pour Pavel Zacha, aux côtés de Joshua Roy et Oliver Kapanen.
Une information qui a coulé comme une bombe et qui a placé Struble dans une position délicate. Il devait prouver qu’il n’était pas qu’une monnaie d’échange facile à insérer dans une transaction.
Hier, il a envoyé son message : s’il doit quitter Montréal, ce sera en laissant une trace. Et s’il reste, il veut montrer qu’il mérite mieux qu’un statut de pièce de profondeur ou de joueur en sursis.
La réalité, c’est que la place de Struble se joue directement dans un duel avec Arber Xhekaj. Les deux offrent un style similaire : robustesse, intimidation, fiabilité limitée offensivement.
Mais Xhekaj, lui, vend des chandails, il est adulé par le public, il a l’aura du « Shérif » que Montréal aime tant. Struble, en comparaison, demeure un joueur discret, sans aura médiatique, ce qui le rend infiniment plus facile à inclure dans un trade.
C’est peut-être injuste, mais c’est ainsi. D’où l’importance de ces cinq mises en échec : elles permettent à Struble de rappeler qu’il est là, qu’il peut rendre la vie impossible aux attaquants adverses et qu’il n’est pas une option B à mettre sous silence.
Le problème pour Struble, c’est qu’au-delà de ses bonnes performances physiques, la réalité du marché demeure. Kent Hughes et Jeff Gorton ont déjà prouvé qu’ils étaient prêts à l’offrir dans un deal. Et dans une organisation où il y a une immense congestion du côté gauche, Struble reste une pièce sacrifiable.
Mais hier, avec ses coups d’épaule, il a renversé un peu le narratif. Il a montré qu’il pouvait non seulement survivre à la pression, mais l’utiliser comme carburant.
Il sait que les projecteurs ne sont pas braqués sur lui par hasard : que ce soit pour solidifier sa place à Montréal ou pour gonfler sa valeur dans une transaction, il doit profiter de chaque présence.
Si Boston a bel et bien refusé le fameux "package" incluant Jayden Struble, Joshua Roy et Oliver Kapanen pour Pavel Zacha, c’est qu’à gauche, les Bruins ne manquent pas d’options.
Avec Nikita Zadorov (6 pieds 6), Hampus Lindholm (6 pieds 4) et Mason Lohrei (6 pieds 5) qui ont leur place assurée à gauche , les besoins immédiats ne justifient pas d’ajouter Struble, aussi apprécié soit-il pour son profil robuste.
Boston garde un œil, mais l’urgence n’est pas là.
À l’inverse, Nashville est en panique à gauche. La profondeur des Predators est inquiétante. Adam Wilsby, à 25 ans, n’a disputé que 23 matchs dans la LNH et ressemble beaucoup plus à un défenseur de la Ligue américaine qu’à une option viable pour soutenir Roman Josi et Brady Skjei.
Derrière, c’est le néant. Voilà pourquoi le nom de Struble, combiné à celui d’Owen Beck, intrigue énormément à Music City.
Les dirigeants des Preds savent qu’ils doivent combler deux trous : un centre capable de jouer partout dans l’alignement et un défenseur gaucher qui peut tenir 18 minutes par soir sans s’effondrer. Struble et Beck, ensemble, incarnent exactement ce profil.
Dans cette équation, la valeur d’Owen Beck vient bouleverser le dossier. Sa performance éclatante (70 % aux mises en jeu, un but, quatre tirs, 18 minutes de jeu et des présences dans toutes les situations) a fait grimper sa cote en flèche.
Nashville, qui mise encore beaucoup sur Ryan O’Reilly pour faire les séries, sait que si la saison déraille, le vétéran pourrait redevenir une monnaie d’échange premium.
Or, Montréal cherche depuis deux ans ce fameux deuxième centre fiable. Pour l’obtenir, c’est peut-être Beck lui-même qui devra partir.
Les Preds voient en lui un joueur « prêt NHL », un centre two-way moderne, capable d’évoluer dès maintenant sur un troisième trio et d’absorber des missions défensives lourdes. C’est précisément le type de profil que Barry Trotz adore.
Du côté de Boston, les Bruins peuvent se permettre d’attendre. Ils n’ont pas besoin de Struble tout de suite et refusent de sacrifier Zacha tant que leur saison ne sera pas vraiment compromise. On attend au minimum l’Action de grâce américaine pour rouvrir sérieusement les discussions.
Du côté de Nashville, on parle d'une urgence structurelle. Si la saison part mal, le nom de Ryan O’Reilly va revenir immédiatement sur le radar. Et Montréal a exactement ce que Nashville recherche : Struble pour combler le vide à gauche et Beck comme centre du futur.
Comme base de négociation, l'offre a de la gueule.
Struble a peut-être frappé cinq fois hier soir pour prouver qu’il appartient à la LNH, mais ce sont surtout les besoins criants de Nashville qui pourraient déterminer son avenir. Les Bruins ont les moyens de repousser les offres, mais les Predators, eux, n’ont pas ce luxe.
Si Ryan O’Reilly redevient disponible et que Nashville veut reconstruire autour de jeunes pièces, un package Struble + Beck pourrait parfaitement correspondre.
D'autres éléments pourraient évidemment être impliqués. Après tout, Joshua Roy et Oliver Kapanen ont déjà été proposés aux Bruins.
C’est là que les performances individuelles au camp, celles de Beck comme celles de Struble, prennent tout leur sens. Non seulement elles définissent leur rôle à Montréal, mais elles gonflent leur valeur sur un marché de transactions qui s’annonce explosif.
À suivre...