Signature à Montréal: Martin St-Louis doit être convaincu

Signature à Montréal: Martin St-Louis doit être convaincu

Par David Garel le 2025-09-05

Le contrat de Carey Price vient d’être échangé. Enfin. À partir de maintenant, Kent Hughes dispose officiellement de 4,58 millions $ de marge de manœuvre, selon PuckPedia. C’est suffisant pour corriger l’un des trous les plus criants de son alignement : l’absence d’un vrai centre numéro deux.

Et pourtant… silence radio.

Pas un coup de fil. Pas une rumeur crédible. Pas même une vague tentative d’exploration.

Et ce, malgré la présence d’un centre de 22 buts, toujours libre comme l’air sur le marché des agents libres. Un joueur rapide, intelligent, polyvalent, efficace aux mises au jeu. Un centre droitier, certes, mais capable de dépanner à l’aile. Son nom? Jack Roslovic.

Mais à Montréal, le talent brut ne suffit pas.

Roslovic n’a que 27 ans. Il sort d’une saison de 22 buts et 39 points avec les Hurricanes, sans même bénéficier de temps régulier sur l’avantage numérique.

À 5 contre 5, il a été efficace, rapide, fluide en transition. Il a remporté 54,1 % de ses mises au jeu, un chiffre que bien des entraîneurs adoreraient.

Il a coûté 2,8 millions $ l’an dernier. Il pourrait être signé pour 3 millions, voire moins. C’est une aubaine. Un centre top 6 à prix réduit, qui permettrait de stabiliser une ligne avec Demidov, Bolduc ou même Newhook.

Et pourtant, personne ne l’appelle.

Pourquoi?

Martin St-Louis ne veut pas de “soft”

Le journaliste Maxime Truman a mis le doigt sur le bobo. Il ne l’a pas dit crûment, mais ses chiffres parlent d’eux-mêmes. Jack Roslovic est perçu comme un joueur “soft”. Et dans l’univers de Martin St-Louis, c’est un péché capital.

Roslovic, c’est 14 mises en échec en 81 matchs. Moins de 0,2 par match. L’un des attaquants les moins physiques de la LNH, toutes positions confondues. Un joueur qui évite les coins, contourne les batailles, et privilégie la finesse.

Dans un autre vestiaire, ça passerait.

Mais à Montréal?

Martin St-Louis prépare la guerre. Pas un ballet.

Le CH manque cruellement de profondeur au centre. Voici, à l’aube du camp d’entraînement, la ligne de centre prévue :

Nick Suzuki

Kirby Dach (toujours en réhabilitation mentale)

Jake Evans

Joe Veleno

C’est un désert. Et malgré cela, le CH refuse de considérer Jack Roslovic.

La logique est brutale : ce n’est pas une question de talent, c’est une question d’identité.

Depuis son arrivée, Martin St-Louis martèle le même message : le Canadien doit être une équipe difficile à affronter, construite sur l’effort, l’intensité, la constance.

Fini le hockey de finesse. Fini les Zegras, les Laine, les Roslovic. Pas d’exception.

Même lorsque l’alignement est amoché, même lorsque l’urgence crie. On ne déroge pas de la vision.

Et cette vision, elle est impitoyable pour ceux qui ne frappent pas.

Zegras, Laine… et Roslovic...

Trevor Zegras? Boudé, ignoré, même moqué. Il se retrouve finalement à Philadelphie.

Patrik Laine? Relégué à l’arrière-plan dès son arrivée.

Jack Roslovic? Même pas un appel. Même pas une conversation.

Parce que dans la tête de Martin St-Louis, il ne suffit pas de marquer. Il faut souffrir pour marquer.

Même avec Kirby Dach hors d’usage, même avec Newhook instable, Evans limité, et Beck trop jeune, le CH refuse de céder.

On aurait pu croire que Roslovic serait une solution logique, peu coûteuse, immédiate. Mais le CH ne veut pas de solution qui va à l’encontre de sa culture interne.

Et cette culture, elle ne pardonne pas les joueurs de passage.

Roslovic a connu trois clubs en deux saisons : Columbus, les Rangers, puis la Caroline. Trois systèmes, trois styles, aucun enracinement.

Il est vu comme un joueur de location, pas comme une pièce d’avenir.

Et Montréal ne veut pas de locataires.

Autre détail technique : Roslovic est droitier. Comme Suzuki, Dach et Evans. Le CH préférerait un centre gaucher. Un profil plus difficile à trouver, mais qui équilibrerait mieux les trios.

Même si Roslovic avait été gaucher, son absence d’implication physique l’aurait probablement exclu pareil.

Une ligne Laine – Roslovic – Demidov? Oubliez ça

De la vitesse, du flair, de la créativité. Mais dans la réalité de la LNH, elle se serait fait dévorer vivante.

Face aux Panthers, ces joueurs-là ne survivent pas. Ils flambent, puis s’éteignent.

Et Martin St-Louis, lui, n’a pas envie de se brûler.

On peut être en désaccord avec l’approche. On peut souhaiter que le CH soit plus opportuniste, plus souple.

Mais on ne peut nier que St-Louis est fidèle à sa vision.

Le message est le même depuis le jour un : l’engagement avant les stats. Le sacrifice avant le flash. Le caractère avant les points.

Et cette ligne de conduite exclut automatiquement des joueurs comme Roslovic.

Le public commence à comprendre.

Même les partisans, qui grognaient devant l’inaction de Hughes, commencent à décoder le message.

Le Canadien ne veut pas d’un alignement glamour. Il veut une équipe qui cogne, qui dérange, qui tient debout.

Et Roslovic, lui, ne tient pas debout quand ça brasse.

Roslovic est l’un des meilleurs agents libres restants. Il a marqué plus de buts que tous les centres du CH, sauf Suzuki. Il coûte peu. Il ne prend pas de place dans l’avenir.

Et malgré tout ça… il ne “fit” pas. Point final.

Parce qu’il ne frappe pas.

Parce qu’il n’a pas l’instinct du soldat.

Parce qu’il ne se compromet pas physiquement.

Et dans l’univers impitoyable de Martin St-Louis, ça fait de lui un indésirable.

Un luxe que le CH refuse

À Montréal, on ne paie pas pour le luxe. On paie pour les fondations. On paie pour la sueur. Pour les joueurs qui “vont à la guerre”.

Pas pour les artistes de passage.

Le Canadien de Montréal n’a pas oublié Jack Roslovic. Il l’a évalué. Il l’a probablement classé dans ses scénarios secondaires. Mais au moment de choisir, il s’est tourné ailleurs. Vers des joueurs qui frappent, qui bloquent, qui dérangent.

Même si ça implique d’amorcer la saison avec une ligne de centre boiteuse.

Même si ça implique de faire une croix sur 22 buts potentiels.

Parce qu’à Montréal, on ne recrute pas des joueurs pour les chiffres. On recrute pour les séries.

Et en séries, les joueurs comme Roslovic disparaissent.

Mais une question commence à trotter dans la tête de plusieurs observateurs : et si Kent Hughes échouait à obtenir un deuxième centre par transaction? 

Et si l’opportunité de Roslovic, à faible coût, devenait soudainement le seul plan B viable à court terme?

Dans ce scénario, Hughes pourrait-il tenter de convaincre Martin St-Louis de faire une entorse, temporaire, à sa philosophie, le temps d’une saison?

Rien n’est moins sûr.

Mais dans la LNH, le pire adversaire, c’est le manque de solutions. Et quand les options tombent une à une, parfois, même les idéologies les plus rigides finissent par plier.

Roslovic est encore là. Encore libre. Encore productif.

Il suffirait d’un revirement; Kent Hughes qui arrive à convaincre Martin St-Louis.

Et peut-être que, pour une fois, la guerre pourrait faire un peu de place au talent.