Le nom d’Evgeny Kuznetsov circule autour du Canadien de Montréal depuis plusieurs jours. Et plus on creuse, plus cette rumeur ressemble à une manœuvre de désespoir.
Une sorte de plan B… ou plutôt de plan C. Voire D. Parce que disons-le franchement : si Kent Hughes en vient à signer Kuznetsov, c’est qu’il aura manqué toutes ses autres cibles.
Depuis le début de l’été, le directeur général du CH a frappé quelques coups de circuit. Il a mis la main sur Noah Dobson dans un échange retentissant avec les Islanders, et a ajouté Zachary Bolduc, un attaquant québécois qui pourrait rapidement s’installer dans le top 6.
Il a aussi réussi à se départir de Christian Dvorak et de Cayden Primeau, deux dossiers qui traînaient depuis des mois. Mais l’objectif principal, celui qu’il avait lui-même avoué en point de presse en mai dernier, demeure non réalisé : trouver un centre capable de prendre la place de Kirby Dach sur le deuxième trio.
C’est là qu’entre en scène la rumeur Kuznetsov.
Evgeny Kuznetsov, 33 ans, n’a plus de contrat. Il a été libéré par le SKA de Saint-Pétersbourg dans la KHL, une résiliation de contrat faite d’un commun accord.
En surface, c’est un vétéran au CV impressionnant : champion de la Coupe Stanley, plus de 550 points dans la LNH, un flair offensif unique et une vision du jeu hors norme.
Mais à y regarder de plus près, ce n’est plus le joueur qu’il était. Il a ralenti. Il a vieilli. Et surtout, il traîne avec lui un lourd bagage.
À Washington, il a terminé son parcours en queue de poisson. Des blessures, une attitude souvent remise en question, une participation au programme d’aide de la LNH pour des raisons personnelles, et des performances décevantes.
En 2023-2024, il n’a récolté que 24 points en 63 matchs avec les Capitals et les Hurricanes. Une chute libre.
Et ce n’est pas une question de blessure passagère : c’est une tendance lourde.
Oui, il a rebondi en Russie cette année, récoltant 37 points en 39 matchs… mais c’était la KHL. Et dans une ligue où les vétérans sont favorisés par certains entraîneurs, et où le rythme de jeu est bien différent, on peut difficilement prendre ces chiffres comme preuve d’un retour en forme.
Kuznetsov, ce n’est pas Panarin à son retour. C’est un joueur au bord de la retraite, qui cherche un dernier contrat dans un marché indulgent.
Et Montréal... est un marché sans pitié...
Ce qui rend cette rumeur encore plus troublante, c’est la campagne de charme maladroite lancée par Kuznetsov lui-même.
L’ancien joueur des Capitals multiplie les déclarations flatteuses à l’égard d’Ivan Demidov, sa jeune ex-coéquipier au SKA. Il le décrit comme un joueur « extraordinaire », comme « l’un des plus talentueux » qu’il ait côtoyé. Il dit même :
« Vanya est comme un petit frère. Il n’a pas besoin de moi pour réussir, je suis juste là si jamais il a des questions. »
Mais derrière ce ton affectueux, tout le monde comprend : Kuznetsov veut venir à Montréal. Il veut décrocher un contrat dans la LNH. Il veut être le « grand frère russe » d’Ivan Demidov dans un vestiaire jeune et en reconstruction.
C’est là que les choses deviennent inquiétantes.
Depuis des années, Montréal est vu par certains agents et vétérans comme un marché « mou » : on y donne des chances à des joueurs finis, on accueille à bras ouverts des carrières sur le déclin.
Patrik Laine, ça vous dit quelque chose? L'organisation a trop souvent payé pour des noms, au lieu de miser sur l’avenir.
Imaginez Kuznetsov sur le même trio que Laine. Martin St-Louis va sauter une véritable coche quand il va voir ces deux tortues paresseuses refuser de se replier ou d'aller se casser un ongle dans le coin.
Aujourd’hui, ce réflexe de signer des vedettes déchues est en train de mourir, lentement mais sûrement, sous l’impulsion de Kent Hughes et Jeff Gorton.
Ce duo a installé une nouvelle philosophie : jeunesse, vitesse, engagement. On veut construire sur du solide, pas boucher les trous avec des rustines médiatiques. Or, intégrer Kuznetsov dans cette équation, c’est trahir cette philosophie.
Parce qu’il incarne exactement ce que le CH veut fuir : l’instabilité, la distraction, le potentiel de drame inutile. Kuznetsov n’est pas un guide. Il est une figure incertaine, qui pourrait au mieux être invisible… et au pire, nuire au développement du vestiaire.
Déjà que Hughes et gorton ont trahi leur mentalité en allant chercher Laine "le lâche".
Demidov n’a pas besoin de Kuznetsov.
L’argument du mentor russe ne tient pas. Ivan Demidov, 19 ans, est déjà mature. Tout le monde dans l’organisation vante sa discipline, son intelligence, son humilité.
Il n’a pas besoin d’un gardien de but émotionnel ou d’un coloc instable. Il a besoin de structure, de coaching et d’un encadrement professionnel.
Lui coller Kuznetsov dans les pattes sous prétexte qu’ils parlent russe, c’est comme imposer une vieille rock star à un jeune prodige du classique. Ça n’a rien à voir.
Et au fond, même Demidov n’est pas chaud à l’idée. Selon plusieurs sources proches du vestiaire, le jeune joueur n’a jamais demandé expressément à ce que Kuznetsov l’accompagne. Il l’a apprécié au SKA, oui. Mais à Montréal, il veut forger sa propre voie.
Il faut aussi parler du cœur du problème : Kuznetsov ne veut pas tant venir à Montréal pour aider, il veut simplement rejouer. Et surtout, être payé.
Son agent l’a dit clairement :
« Nous évaluerons l’offre la plus élevée. » Point.
Ce n’est pas une déclaration d’amour à la LNH, ni une volonté de se réhabiliter. C’est une stratégie commerciale. Kuznetsov n’a aucun projet sportif défini. Il cherche un contrat. Une enveloppe.
Et ça, Kent Hughes le sait très bien.
L’ancien agent devenu DG n’a pas besoin qu’on lui explique ce qu’est un joueur qui cherche à survivre financièrement en vendant son nom.
Il en a vu, il en a représenté, et il sait exactement ce que ça peut coûter à une équipe. Des frictions. Des attentes irréalistes. Des malaises dans le vestiaire. Et une sortie difficile, à grand renfort de clauses contractuelles.
Depuis que la rumeur Kuznetsov a commencé à circuler, plusieurs agents se sont exprimés (sous le couvert de l'anonymat) dans les médias québécois. Leur verdict est unanime : ce n’est pas une bonne idée. Trop de risques. Trop d’inconnues. Trop de passif.
Même Martin St-Louis, bien que diplomate en public, serait agacé en privé par l’idée d’intégrer un tel joueur à son groupe.
Le coach n'est déjà pas capable de supporter Patrik Laine avec son jeu décousu, son isolement et ses sorties médiatiques confuses.
Pourquoi reproduire ce scénario?
Cette signature contredirait tout ce que le CH bâtit.
Aujourd’hui, Montréal est à un tournant. Avec Dobson, Demidov, Hutson, Bolduc, Slafkovsky, Caufield, Suzuki Guhle et compagnie, une fondation solide est en place. Ce qu’il faut, ce sont des ajouts constructifs pour se greffer au noyau. Pas des vétérans finis à la mauvaise attitude.
S’il manque encore un centre de 2e trio, Kent Hughes doit viser plus haut. Mason McTavish, Anthony Cirelli, voire un retour inespéré de Sidney Crosby : voilà des cibles logiques. Kuznetsov, lui, appartient à une époque passée date.
Evgeny Kuznetsov à Montréal, ce serait une erreur. Une erreur de timing, de lecture et de stratégie. L’organisation n’a rien à gagner en ouvrant la porte à un joueur en perte de vitesse, qui traîne un historique lourd et une motivation louche reliée aux billets verts.
Demidov n’a pas besoin de Kuznetsov pour briller. Et le CH n’a pas besoin d’un « plan D » risqué alors qu’il est sur le point de redevenir un club d’élite.
Montréal est une terre d’avenir. Pas un cimetière à carrières.