Futur de Sidney Crosby: le DG des Penguins répond à Kent Hughes

Futur de Sidney Crosby: le DG des Penguins répond à Kent Hughes

Par David Garel le 2025-11-05

C’est la première fois qu’il aborde le sujet aussi clairement. Le directeur général des Penguins de Pittsburgh, Kyle Dubas, a accepté de se livrer à cœur ouvert sur la situation de son capitaine, Sidney Crosby, dans une longue entrevue accordée à Pierre LeBrun (The Athletic).

Et ses propos ne laissent aucune place à l’ambiguïté : non, Crosby ne sera pas échangé, à moins qu’il en fasse lui-même la demande.

Le contexte de cette sortie est révélateur. Quelques heures avant que les Penguins ne s’effondrent en troisième période à Toronto après avoir mené 3-0, Dubas, de passage dans son ancien domicile de la LNH, a pris le temps de faire le point sur son équipe, son plan de reconstruction accélérée… et l’avenir de l’un des plus grands joueurs de l’histoire du hockey moderne.

Interrogé sur les rumeurs persistantes liant Crosby au Canadien de Montréal, Dubas a tranché d’un ton calmel :

« Non, je ne lui demanderai jamais de partir. Sidney a encore deux ans à son contrat, cette année et la suivante. Et si un jour il demande à être échangé, ce sera sa décision. Pas la mienne. »

Ces mots résonnent fort dans un marché qui attendait un signal clair depuis des semaines. La rumeur d’une possible transaction vers Montréal avait refait surface à la suite des récentes défaites des Penguins et des déclarations de Renaud Lavoie, qui soutenait que David Reinbacher pourrait servir de pièce maîtresse dans une offre du Canadien.

Dubas, lui, refuse catégoriquement de nourrir le feu.

« Notre objectif, à Sidney et à moi, est le même : on essaie de gagner tous les jours. Je sais que, de l’extérieur, ça peut paraître flou, mais à l’interne, on a une vision très claire. Et si on continue à progresser, à prendre les bonnes décisions, la meilleure solution à tout, c’est simple : il faut gagner. »

Dans la même entrevue, Dubas a tenu un discours honnête sur le futur des Penguins. Il reconnaît ouvertement que la franchise vit une période de transition, qu’il tente de concilier le court terme (honorer la fin de carrière des légendes) et le long terme (préparer la prochaine génération).

« C’est le défi le plus complexe dans ce métier : rester compétitif tout en préparant la suite. On essaie de faire les deux. Dans le court terme, on veut maximiser les dernières années des joueurs d’exception qu’on a, tout le monde sait de qui je parle. Mais on intègre aussi de nouveaux visages, des gars qui n’ont pas eu de vraie chance ailleurs, et on veut développer cette nouvelle vague qui mènera l’équipe dans cinq, dix, quinze ans. »

Dubas sait qu’il marche sur un fil. À 38 ans, Crosby joue encore à un niveau d’élite, mais les signes d’usure s’accumulent. Malkin et Letang vieillissent aussi, et les deux piliers défensifs, Erik Karlsson et Letang, n’ont plus la même mobilité.

Pour compenser, Dubas mise sur une série de jeunes joueurs acquis récemment : Ben Kindel, 18 ans, déjà 4 buts cette saison ; Ville Koivunen, Filip Hallander, Harrison Brunicke, ou encore le gardien Artūrs Šilovs, volé à Vancouver.

« On veut ramener les Penguins à un niveau de compétiteur constant. Et pour ça, il faut créer un environnement où les jeunes et les vétérans grandissent ensemble. »

Le retour de Dubas à Toronto, où il a passé neuf ans (dont cinq comme DG), a aussi un aspect symbolique. Il connaît chaque corridor du Scotiabank Arena. Il y a vécu ses plus grandes réussites… et ses échecs les plus douloureux.

Et lorsqu’on lui demande ce qu’il retient de ses années chez les Maple Leafs, il ne se défile pas :

« À Toronto, j’ai appris qu’on ne peut pas simplement acheter du succès. Il faut développer, il faut faire confiance à ses jeunes. J’essaie d’appliquer cette leçon ici, mais avec une base d’expérience beaucoup plus forte. À Pittsburgh, les standards de victoire sont inscrits dans les murs. »

Ce modèle hybride, entre le développement patient et le respect des vétérans, rappelle d’ailleurs la philosophie actuelle du Canadien de Montréal sous Kent Hughes et Jeff Gorton. C’est peut-être ce qui alimente les rumeurs : deux équipes à des étapes opposées, mais liées par une certaine logique.

À Montréal, on continue de rêver au scénario d’un Sidney Crosby finissant sa carrière au Centre Bell, mentorant Ivan Demidov, symbolisant le passage du flambeau d’une génération à l’autre.

Mais Dubas, lui, ramène tout le monde sur terre : tant que les Penguins gagnent, il n’est pas question de mouvement.

« Je comprends que ce genre de rumeur existe, dit-il. C’est normal, c’est Sidney Crosby. Mais notre seul objectif, c’est de bâtir autour de lui tant qu’il joue à ce niveau. Il reste un des joueurs les plus complets de la ligue. Et honnêtement, il est encore au sommet. »

Ce qui n’empêche pas Dubas d’entretenir le dialogue constant avec Pat Brisson, l’agent de Crosby :

« La communication est quotidienne. Pat et moi sommes toujours alignés : on veut le meilleur pour Sid. Et tant qu’il veut rester ici, je ferai tout pour qu’il puisse gagner ici. »

La phrase la plus marquante de l’entrevue est aussi la plus simple :

« À la fin de la journée, ce n’est pas à moi de décider. C’est à lui. »

Un aveu d’humilité rare dans le monde fermé des dirigeants de la LNH. Dubas sait très bien qu’aucun DG n’a le pouvoir d’imposer un départ à Sidney Crosby, capitaine légendaire, triple champion, et véritable symbole de loyauté.

Mais le message est aussi cinglant : si l’équipe dérape à nouveau, si les séries s’échappent, et si Crosby, à 38 ans, veut tenter une dernière conquête ailleurs… Dubas ne s’y opposera pas.

Dans cette entrevue, Dubas a aussi décrit la feuille de route des Penguins, articulée autour de trois axes :

Maximiser les dernières années de gloire de Crosby, Malkin et Letang.

Offrir des secondes chances à des joueurs sous-estimés (comme Mantha, Brazeau, Wotherspoon).

Faire éclore la relève, déjà en place, pour assurer une transition fluide.

Il cite même nommément certains espoirs laissés par l’ancienne direction :

« Les anciens dirigeants avaient déjà fait du bon travail. Owen Pickering, Sergei Murashov, Zam Plante… ils avaient déjà amorcé le virage. On continue simplement sur cette lancée. »

Dubas veut donc prolonger le fil sans briser la culture gagnante.

Et Montréal dans tout ça ?

Ceux qui rêvent d’un Crosby à Montréal peuvent continuer à espérer, mais pas à court terme. L’entrevue de Dubas met fin aux spéculations immédiates, sans fermer la porte définitivement.

Si le scénario d’une reconstruction totale à Pittsburgh devait se concrétiser à la fin de la saison, et que Crosby décidait d’aller jouer un dernier chapitre dans une ville mythique comme Montréal, ce serait sa décision personnelle, pas celle du DG.

D’ici là, Dubas veut voir jusqu’où cette équipe peut aller :

« On veut redevenir un club qui fait peur chaque soir. On veut que les gens disent encore : les Penguins, c’est une équipe de gagnants. »

Crosby a encore livré de grands matchs cette saison, atteignant récemment le plateau des 1 700 points. Mais depuis deux rencontres, il semble vidé, comme si le poids de l’histoire pesait sur ses épaules.

Dubas, lui, fait preuve d’un calme olympien. Entre deux vols pour préparer l’équipe canadienne olympique en tant que DG adjoint, il garde le cap : protéger la légende, sans compromettre le futur.

À 40 ans, il est déjà dans une posture délicate : prolonger l’ère Crosby sans devenir prisonnier de sa nostalgie.

Pour la première fois depuis longtemps, un dirigeant des Penguins parle franchement : non, Sidney Crosby ne sera pas échangé, du moins pas tant qu’il ne le voudra pas.

Mais si la chute arrive, tout peut arriver.

Et à Montréal, Kent Hughes le sait. Parce qu’entre un rêve de légende et un appel de reconstruction, il n’y a souvent qu’une défaite de trop.