Revirement de situation: la carrière de Brendan Gallagher sur un fil

Revirement de situation: la carrière de Brendan Gallagher sur un fil

Par Nicolas Pérusse le 2025-07-19

Brendan Gallagher vit ses derniers instants dans l'uniforme du Canadien de Montréal.

Il le sait. Tout le monde le sait. Mais personne n'ose le dire à voix haute. La prochaine étape, c’est le rachat de contrat. Et après ça, la fin. L'échéance est déjà marquée dans les calendriers de la direction.

Après avoir repoussé la sentence à l'été 2024 par respect, le Canadien se prépare à tourner la page dès l’été 2026. Le contrat monstre de Gallagher est devenu un fardeau. En le rachetant en 2026, l'équipe sauverait jusqu'’à 6,5 M$ sur les 19 M$ restants. C'est une décision logique. Froide. Inhumaine. Mais nécessaire.

Il reste un mince espoir et il tient à un seul fil : trouver un nouveau rôle. En avantage numérique? Avec l'arrivé de Zachary Bolduc, Gallagher a définitivement perdu sa place sur la deuxième vague. Le désavantage numérique devient sa dernière chance de se rendre indispensable. 

En 2023-2024, tout le monde le voyait fini. Il n’avait pas marqué depuis 19 matchs. Son nom circulait dans les scénarios de rachat. TVA Sports parlait même de lui avec un mépris cruel, allant jusqu'à suggérer de lui offrir de l’Antiphlogistine pour Noël.

Et pourtant, Gallagher a répondu. 21 buts, 38 points, 82 matchs. Une saison complète. Un miracle, considérant son passé de blessures chroniques. Pas de traitement de faveur. Pas de temps de jeu en avantage numérique. Il a produit dans l’ombre, sur un troisième ou quatrième trio, souvent contre les meilleurs trios adverses. Il a mérité son droit de rester.

Mais la flamme n’est pas revenue. Une production honnête ne suffit plus. Le CH vise 2027. La Coupe. Et Gallagher est devenu un poids mort dans cette quête.

L’alignement projeté pour 2025-2026 le dit tout haut :

Caufield - Suzuki - Slafkovsky
Bolduc - Dach - Demidov
Laine - Evans - Newhook
Gallagher - Veleno - Anderson

Quatrième trio. Près de 13 millions sur la masse salariale pour trois joueurs dont aucun ne produit à 5 contre 5. Le pire quatuor de l’histoire du CH, si on regarde le ratio dollars/performance.

Et pourtant, il est encore là. Pas pour ses jambes. Pour sa voix. Pour son aura.

En mars 2025, Gallagher a perdu bien plus qu’un poste au sein du top-6. Il a perdu sa mère, Della. Un décès bouleversant. Un combat de 43 mois contre un glioblastome de stade 4. Un cancer rare et foudroyant. Depuis 2021, il portait ce poids en silence. Sa mère avait été diagnostiquée après une crise au volant. Transfert d'urgence à Edmonton. Pronostic de 14 mois. Elle a survécu près de trois ans et demi.

Pendant ce temps, Gallagher encaissait. Les blessures. Les critiques. Les attentes. Et il continuait à jouer. Parce qu'il le faisait pour elle. Chaque match, chaque mise en échec, chaque tir bloqué. Pour sa mère. Pour l'honneur.

Le respect du vestiaire l'a sauvé d'un rachat en 2024. Mais ce respect ne suffira pas deux fois.

Le départ de trois pilliers du PK (Armia, Dvorak, Savard) a laissé un vide immense. Jake Evans est encore là, mais il ne peut pas tout faire seul et c’est là que Gallagher pourrait se réinventer.

Martin St-Louis l'a déjà fait avec Josh Anderson. Un ailier qui n'avait jamais tué de pénalités à Montréal, mais qui est devenu un joueur efficace en désavantage numérique après quelques matchs d'adaptation. Ça lui a redonné confiance. Du temps de glace. Une mission. Gallagher peut suivre le même chemin. Il est tenace. Bon pour gagner des batailles le long des bandes. Il comprend les systèmes. Il n'a jamais eu peur de bloquer un tir. C’est le profil parfait pour un PK combatif.

Et si St-Louis cherche à garder son vétéran impliqué, c’est la meilleure façon de le faire.

En revanche, l’option du power play est de plus en plus fermée. Gallagher n’est plus ce joueur. Il n'a plus l'accélération, ni le tir pour être menaçant sur l’unité spéciale. Il se ferait dévorer dans une unité rapide et mobile. Son jeu à l'ancienne, à la André Roy dans l'enclave, est devenu obsolète dans une LNH moderne.

C’est donc en PK qu’il doit survivre. C’est sa seule porte de sortie. Gallagher ne veut pas partir. Sa vie est ici. Sa fiancée. Ils ont un enfant. Une maison. Une routine. Il ne partira pas en Europe. Son corps ne tiendrait pas. Il ne veut pas non plus d’une retraite à la Carey Price, sur la LTIR. Il veut encore jouer. Participer. Contribuer.

Mais la LNH ne fait pas de cadeau.

En 2026, le rachat sera inévitable si Gallagher ne prouve pas qu'il peut encore aider. Pas à marquer. À bloquer des tirs. À écœurer les supériorités adverses. À faire lever le Centre Bell en dégageant la rondelle en PK.

C'est le rôle qu'il reste. Le seul qui peut repousser l'inévitable. Une dernière mission pour Martin St-Louis. La balle est dans le camp du coach. St-Louis a fait des miracles avec plusieurs joueurs depuis son arrivée. Mais relancer Gallagher à 31 ans, avec un corps épuisé, une confiance fragilisée, et un cap hit de 6,5 M$, c’est une autre histoire. Il devra être créatif. Stratégique. Il devra donner un sens à chaque match de Gallagher.

Parce que dans un vestiaire qui se tourne déjà vers l’avenir, il reste peu de place pour les fantômes du passé.

Mais Gallagher n'est pas un fantôme. Pas encore.

Il est une voix. Un symbole. Il a été l'âme de cette équipe pendant plus de 10 ans. Il ne faut pas que ça se termine dans l'oubli.

Il mérite une sortie digne. Mais il doit la mériter sur la glace.

Et le temps file. Le compte à rebours est commencé.

En 2026, ce sera la fin. Sauf si St-Louis lui trouve une dernière mission. Et sauf si Gallagher l'accepte.