Il y a parfois des faces qui veulent tout dire.
Celui de Joshua Roy, en entrevue au tournoi de golf de Jonathan Huberdeau, en est un.
Le jeune ailier québécois, jadis perçu comme un super espoir du futur chez le Canadien de Montréal, ne souriait pas. Il ne fuyait pas non plus. Il disait les bons mots, parlait d’un été crucial, d’un objectif clair : faire le club. Mais on le voyait dans son regard, dans ses hésitations, dans ses demi-vérités : Roy sait. Il va être échangé.
Ce n’est pas une hypothèse. C’est un verdict qui flotte depuis des semaines dans les bureaux de Kent Hughes. Et si personne ne lui a parlé, comme il l’a lui-même avoué en entrevue:
« Je n’ai pas eu de discussion avec le Canadien »
C’est justement parce qu’il n’y aura pas de discussion. Il est hors du plan. Effacé du futur. Et plus personne à Montréal ne prend la peine de faire semblant.
Le regard fuyant... voulait tout dire...
Quand Joshua Roy parle, il tente de se convaincre plus que de convaincre les autres. Il parle de progression, d’un gros été, de sa volonté de « faire n’importe quoi pour y arriver ».
Mais il ne parle pas de ce qu’on lui reproche vraiment. Il ne nomme jamais le hors-glace. Il ne parle pas de son mode de vie, de ses erreurs passées. Il se concentre sur ce qu’il croit être important : le hockey.
Sauf qu’à Montréal, on lui reproche exactement le contraire : ce qu’il fait quand il n’est pas sur la glace. Et même dans ses propos, le malaise éclate au grand jour quand il parle de Logan Mailloux, qu’il défend maladroitement.
« Logan, il n’a jamais eu de problème hors-glace selon moi », a-t-il lancé.
Le malaise était évident lorsque Joshua Roy a été interrogé sur Logan Mailloux. Son regard s’est figé, ses mots sont devenus hésitants.
Pourtant, il a livré une déclaration claire :
« C’est un de mes meilleurs chums. On est très proches. C’est une bonne personne sur la glace comme à l'extérieur. »
Cette défense sans nuance en dit long. Dans le contexte actuel, alors que Mailloux a été échangé aux Blues de Saint-Louis et que Roy semble en attente d’un billet de sortie, on ne peut s’empêcher de faire le parallèle troublant avec une époque que le Canadien aimerait oublier.
Quelle époque?
L’époque des Ribeiro–Théodore–Dagenais, surnommés les « trois petits cochons », réputés autant pour leurs frasques nocturnes que pour leur talent sur la glace.
Est-ce que le CH veut aujourd’hui se débarrasser d’un autre duo problématique? Après avoir tranché dans le cas de Mailloux, Joshua Roy devient à son tour la patate chaude.
Deux jeunes liés, deux réputations controversées, deux profils qui ne cadrent plus dans la culture que Martin St-Louis tente désespérément d’imposer.
Dans les coulisses, plusieurs voient la séquence comme un geste calculé : se séparer des deux chums pour assainir l’environnement. Faire le grand ménage, un à la fois.
Une affirmation qui a déclenché l’inconfort immédiat de tous ceux qui suivent le dossier de près. Car si Roy pense que Mailloux est irréprochable… que pense-t-il de lui-même?
La réponse est simple : il ne comprend pas, ou ne veut pas comprendre.
Depuis l’arrivée de Zachary Bolduc à Montréal, tout a changé. Le CH a mis la main sur un ailier québécois explosif, capable de jouer à haute intensité dans les deux sens de la patinoire.
Un gars formé dans une structure exigeante à St. Louis, qui a déjà goûté à la LNH. En un coup, Joshua Roy a perdu sa place. Bolduc est tout ce que Roy n’est pas. Et ça, Roy l’a senti. Très fort.
Le message de l’organisation est clair et net : Bolduc est la nouvelle priorité. Le nouveau projet québécois. Le prochain chouchou du Centre Bell. Roy, lui, devient un actif de transaction. Un bonus qu’on ajoute dans une offre. Une pièce jetable.
Il n’a plus sa niche. Trop frêle pour le bottom 6, pas assez explosif pour le top 6. Pas de rôle clair, pas d’alignement projeté qui le place au bon endroit. Et le plus tragique, c’est que le CH ne le voit même plus comme un projet à relancer. Il est classé. Étiqueté. Prêt à l’expédition via transaction.
Le recul de Roy ne date pas d’hier. Tout a commencé à Laval, quand, malgré son talent brut, il n’a jamais su dominer comme prévu.
Oui, il a été utile. Mais jamais essentiel. Il n’a pas arraché sa place dans le grand club. Et quand on lui a donné sa chance, c’était toujours avec une laisse, toujours dans un rôle flou, sans constance.
À Laval, il s’est battu. Il a tenté de s’adapter à un style physique. Mais ça sonnait faux. Ce n’est pas lui. Il joue à l’instinct. Pas à l’acharnement. Il n’est pas un grinder. Il est un finisseur. Mais Montréal n’a plus de place pour ce genre de joueur, à moins qu’il s’appelle Caufield.
Et quand l’occasion s’est présentée pour briller, Roy s’est effondré. En janvier, il est blessé à l’épaule gauche. Il rate le Match des étoiles de la AHL. Il perd son momentum. Pendant ce temps, Emil Heineman brille et monte dans l’échiquier. L’écart devient irrécupérable.
Puis...Heineman est échangé... Bolduc arrive... et il sera le prochain à partir.
Mais ce qui a vraiment changé la perception de Roy, c’est le scandale de la séance de signatures. Le magasin Universe Collectibles avait organisé une rencontre avec les fans à Vau. Soixante personnes s’étaient déplacées. Il ne s’est jamais présenté. Aucun message. Aucun appel. Juste… rien.
La réaction a été cinglante. Les partisans se sont sentis trahis. L’organisation aussi. Joshua Roy venait de perdre le lien fragile qui le rattachait à la ville de Montréal.
Son agent Olivier Fortier a d’abord affirmé qu’il n’était pas au courant de l’événement. Quand les organisateurs ont contacté son équipe pour comprendre pourquoi Joshua Roy ne s’était pas présenté, Fortier a d’abord nié toute connaissance de la séance d'autographes.
Puis, dans une seconde communication, il a changé de version et a affirmé que Joshua Roy ne pouvait pas participer à l’événement en raison d’une clause d’exclusivité avec Upper Deck.
En gros, il a prétendu que Roy n’avait pas le droit contractuel de signer des objets lors d’événements qui ne sont pas approuvés par Upper Deck.
Sauf que cette explication a été immédiatement contredite par les organisateurs, qui ont présenté les courriels, les confirmations écrites, et la promotion officielle incluant l’accord du clan Roy. Bref, Fortier a essayé de couvrir son client avec une excuse contractuelle… qui ne tenait pas la route.
Ce n’est pas tant l’annulation qui a choqué, c’est l’absence de respect, le manque de communication, le mépris pour une communauté médiatique qui voulait l’honorer.
Et dans une province comme le Québec, où la connexion avec les partisans est fondamentale, cet épisode a laissé des traces profondes.
Depuis ce jour, il est devenu un problème. Un joueur dont on veut se débarrasser sans scandale.
Et c’est exactement ce que Kent Hughes s’apprête à faire. Dans toutes les rumeurs autour de Mason McTavish ou même de Sidney Crosby, le nom de Joshua Roy revient sans cesse.
Pas comme pièce maîtresse. Non. Comme pièce de bonus ("throw-in"). Comme boni pour faire pencher la balance. Comme « sweetener ».
C’est cruel, mais c’est la réalité. Et si le Canadien ne lui parle pas, c’est parce qu’ils n’ont rien à lui dire. Ils n’ont pas de plan pour lui. Ils ne le voient pas au camp. Ils attendent juste l’offre.
Et peut-être qu’au fond, c’est une bénédiction pour Roy. Un renouveau. Un nouveau vestiaire. Un nouveau regard. Car à Montréal, le verdict est tombé. Le public ne l’attend plus. La direction ne le soutient plus. Les coéquipiers ne l’intègrent plus.
Il aurait pu réussir ici. Il avait tout pour plaire. Un tir dévastateur. Une vision. Un sens du jeu. Mais il n’a pas compris l’exigence du hockey professionnel moderne. Chaque jour, chaque minute compte. Et chaque erreur hors-glace devient une tache à vie.
Et maintenant? Joshua Roy est sur le marché. Et ce marché est féroce. Il devra convaincre une autre équipe qu’il n’est pas ce qu’on murmure dans son dos. Qu’il a appris. Qu’il est prêt. Mais il n’aura plus droit à l’erreur.
Parce que s’il échoue une deuxième fois… le hockey ne pardonne pas.
Joshua Roy quittera Montréal. Pas parce qu’il a échoué. Mais parce qu’il a été devancé. Par Bolduc. Par la réalité.
Et cette réalité est sans pitié.