Hier était une soirée de rêve our Phil Danault.
Une victoire de 5 à 1 des Kings de Los Angeles, mais surtout, une leçon d’efficacité, de structure et de rigueur défensive donnée par une équipe qui a compris depuis longtemps ce que le Canadien essaie encore de devenir. Et au milieu de tout ça, un visage bien connu : Phillip Danault.
Pendant que Montréal dormait au gaz, Danault faisait ce qu’il a toujours su faire : fermer le jeu. Empêcher les transitions, bloquer les lignes de passe, dicter le tempo défensif. Il n’a pas marqué, il n’a pas brillé, mais il a fait partie de ces joueurs qui transforment un match en cauchemar pour l’adversaire. Et c’est exactement ce qui manque au Canadien.
Un match sans contrôle ni identité.
La conclusion est claire : Montréal n’a aucune idée de comment réagir lorsqu’une équipe comme les Kings impose un rythme fermé. 22 tirs seulement, presque aucun dangereux. Des séquences sans fluidité, des relances précipitées, des passes imprécises. Même Nick Suzuki, pourtant irréprochable, semblait à bout de souffle.
« On les a regardés aller », a résumé le capitaine. Une phrase qui résume tout : le Canadien n’a pas joué, il a observé.
Et quand le jeu se referme, quand il faut gagner une bataille territoriale, un duel en fond de zone, un engagement clé en territoire défensif… il n’y a personne, à part Suzuki, pour imposer le ton.
C’est dans ce type de match, lent, étouffant, méthodique, que Phillip Danault faisait autrefois la différence. Ce genre de soirée où le Canadien aurait pu dormir tranquille en sachant que le trio Danault allait museler le meilleur trio adverse. Hier, il n’y avait pas ce tampon. Pas cette assurance. Et Los Angeles a frappé trois fois en quatre minutes.
Danault, c’est le joueur qu’on remarque seulement quand il n’est plus là. C’est le joueur qu’on a longtemps sous-estimé, jusqu’à réaliser qu’il tenait l’équilibre entier d’une équipe. Quand il est parti à Los Angeles, on a célébré la créativité, l’ouverture d’un poste offensif, le renouveau du style. Mais quatre ans plus tard, on voit les conséquences.
Le Canadien n’a plus ce centre défensif capable de prendre les grosses missions, d’absorber la pression et de libérer Suzuki.
Chaque match lourd, chaque duel fermé, se termine de la même façon : une erreur, un trou d’attention ou un effondrement collectif. Hier, ça s’est produit en trois minutes. Trois minutes où Danault, autrefois, aurait tout bloqué.
Et pendant que le CH paniquait dans sa zone, Danault, lui, a obtenu une mention d’aide, a terminé avec un différentiel positif et a reçu les éloges de son entraîneur-chef Jim Hiller. Ce n’est pas un hasard. Même sans production offensive, il reste utile.
C'était le scénario rêvé pour lui car tout le monde sait qu'il veut revenir à Montéal.
Ce que ce match a révélé, ce n’est pas que Montréal manque de talent. C’est qu’il manque de maturité. Ce qu’on appelle du « hockey de séries ». La capacité de survivre dans un match fermé, d’accepter la trappe, de résister sans paniquer. Et ça, Danault en a fait sa spécialité.
Nick Suzuki est épuisé de devoir porter deux casquettes : produire offensivement et neutraliser les meilleurs centres adverses.
Il a le talent pour le faire, mais pas la marge d’énergie nécessaire pour le répéter sur 82 matchs. Danault, lui, prenait cette charge-là. Il permettait à Suzuki de respirer, de créer.
Et c’est là que plusieurs observateurs, hier soir, ont vu la lumière. Dany Dubé l’a dit : un joueur comme Danault, dans ce genre de match, aurait calmé le jeu, stoppé l’hémorragie, ralenti la tempête.
Jean-Charles Lajoie a ajouté qu’il aimerait le revoir à Montréal, pas pour sa production, mais pour sa présence. Certains diront que c’est parce qu’ils sont pro-Québécois. Peut-être. Mais hier soir, l’argument n’était pas identitaire. Il était purement hockey.
Quand le hockey devient lourd, Danault devient utile.
Les Kings n’ont pas volé leur victoire. Ils ont simplement joué un hockey d’hommes, celui des séries.
Et Danault a été le cœur de ce système en étant structurel, méthodique et intelligent Il ne court plus comme avant, il ne produit plus comme à ses débuts en Californie, mais il comprend le tempo, il comprend quand fermer le jeu, et il sait exactement où se placer pour briser les élans adverses.
Le Canadien, lui, ne sait pas encore faire ça. Il s’en remet au talent brut, à la finesse, à la vitesse. Mais dès que le rythme baisse, dès qu’il faut se battre pour chaque pouce de glace, la structure s’écroule. C’est un problème majeur.
Et c’est pour ça que le nom de Danault revient dans les conversations. Parce que Montréal veut grandir. Et pour grandir, il faut apprendre à jouer ce genre de match. Hier, on a vu une équipe qui patinait vite… mais qui ne savait pas jouer lent.
Il y a souvent de la nostalgie malsaine dans les débats sur les anciens joueurs. Mais cette fois, ce n’était pas sentimental. C’était rationnel.
Le Canadien manquait d’un joueur comme Danault, point. Pas pour marquer, pas pour être un héros, mais pour éviter de sombrer dès que le jeu devient serré.
Quand les Kings ont fermé le centre en deuxième période, le CH n’a eu aucune réponse. Les sorties de zone étaient forcées, les passes improvisées et les tirs bloqués. C’est exactement dans ce genre de séquence que Danault excellait. C’est ce qu’on a oublié.
Il n’est plus un joueur offensif dominant, c’est vrai. Mais sa valeur, c’est d’éteindre les incendies avant qu’ils prennent. Hier, Montréal s’est brûlé les mains parce qu’il n’avait plus ce pompier-là.
Et maintenant?
Le débat n’est pas de savoir si Danault reviendra. Il ne reviendra probablement jamais. Kent Hughes n’a pas d’intérêt à ressusciter les fantômes de l’ère Bergevin. Mais le match contre Los Angeles a servi de rappel brutal : le Canadien n’a toujours pas remplacé le rôle que Danault jouait.
Joe Veleno fait de son mieux, mais il n’a ni le QI hockey ni le sens de l’anticipation de Danault. Oliver Kapanen arrivera peut-être à ce niveau, mais pour l’instant, il n’y a personne capable de prendre cette responsabilité défensive et d’enlever cette pression à Suzuki.
Jake Evans est capable d'être ce centre "shutdown", mais pas au point d'être sur la glace constamment quand la meilleure ligne est sur la glace.
Hier, la réalité était simple : les Kings ont fermé la porte, le Canadien n’a pas trouvé la clé. Et Danault, discret mais efficace, a montré qu’il savait encore comment verrouiller un match.
Ce n’est pas un hasard si le CH a perdu neuf matchs consécutifs contre les Kings depuis 2019. Ce n’est pas un hasard si, chaque fois, Los Angeles donne l’impression de jouer à l’aise dans la tempête pendant que Montréal panique. Ce n’est pas une question de talent, c’est une question de structure.
Et hier, devant les 20 000 spectateurs du Centre Bell, Phillip Danault a rappelé, sans un mot, pourquoi ce type de joueur fait encore gagner des matchs de séries.
Ce n’est pas le joueur qui marque le plus. C’est celui qui empêche les autres de marquer.
Et dans ce registre-là, le Canadien de 2025 n’a toujours pas trouvé son remplaçant.
