Pensée et prière pour Rasmus Dahlin : quand la vie frappe plus fort que le hockey

Pensée et prière pour Rasmus Dahlin : quand la vie frappe plus fort que le hockey

Par André Soueidan le 2025-11-07

Ce matin à Buffalo, ce n’est pas le powerplay, les trios ou le différentiel de Rasmus Dahlin qui sont sur toutes les lèvres.

Ce n’est pas une défaite, ni une séquence sans but.

C’est le silence. Un silence lourd, respectueux, qui traverse le vestiaire et qui rappelle que même le capitaine d’une équipe de la LNH peut se faire frapper par quelque chose de beaucoup plus puissant qu’un lancer frappé à 100 milles à l’heure.

Rasmus Dahlin quitte les Sabres pour une durée indéterminée. Pas pour une blessure, pas pour une suspension. Il quitte parce que l’amour de sa vie se bat, encore une fois, pour la sienne.

L’entraîneur-chef Lindy Ruff l’a annoncé calmement, sans détour, avec cette phrase qui a figé toute la LNH :

« C’est plus grand que le hockey. »

Dahlin retourne en Suède, auprès de sa fiancée Carolina Matovac.

En septembre dernier, le couple avait révélé qu’elle avait subi une greffe du cœur après un incident médical terrifiant en Europe.

Dahlin avait écrit une lettre publique, avouant :

« C’est sans aucun doute le chapitre le plus difficile de nos vies. »

Aujourd’hui, ce chapitre n’est pas terminé. Il continue, loin des arénas, loin des caméras, là où aucun système défensif ne peut vraiment le protéger.

Les Sabres n’ont pas fixé de date de retour. Lindy Ruff l’a répété : il prend le temps qu’il faut.

« Ce qui compte, c’est qu’il soit avec elle. Il a tout notre soutien. »

Et même si Matovac est stable pour l’instant ... «Les choses vont bien », a dit Ruff ... personne n’a osé poser la question de savoir quand Dahlin reviendrait jouer.

Parce qu’il y a des moments où la vie impose sa priorité, et le hockey, même au plus haut niveau, comprend.

On oublie parfois à quel point ce joueur porte sur ses épaules une pression monstrueuse.

Premier choix au total en 2018, capitaine à 24 ans, meilleur pointeur de sa défense, visage de la franchise.

Entre deux mises en échec, il rentrait chez lui et voyait la femme qu’il aime se battre pour respirer. Et il continuait malgré tout. Sourire aux enfants dans les estrades.

Répondre aux journalistes. Patiner 26 minutes par soir comme si rien n’était en train de s’effondrer en dehors de la patinoire.

Aujourd’hui, il laisse son chandail bleu et or dans le vestiaire. Il laisse le “C” accroché dans son casier, mais personne ne le lui enlève.

On ne remplace pas un capitaine parce qu’il choisit l’amour avant les statistiques.

On le respecte encore plus. Et à Buffalo, ses coéquipiers le savent.

Owen Power ne prend pas seulement plus de temps de glace. Il prend un peu du poids émotionnel qui restait.

Bowen Byram devra combler une partie de ses minutes. Mais la vraie perte, ce n’est pas un défenseur numéro un.

C’est un cœur, une présence, un capitaine qui serre les dents pour les autres depuis trop longtemps.

Dans cette ligue où l’on évalue les joueurs avec des chiffres, des bonus de performance et des classements de Norris Trophy, Dahlin vient de rappeler que derrière chaque contrat de 88 millions de dollars, il y a un humain qui peut tout laisser tomber en une seconde si quelqu’un qu’il aime lève les yeux et dit : « J’ai besoin que tu sois là. »

Ce n’est pas de la faiblesse. C’est la plus grande force qui existe.

Ce congé change évidemment des choses à Buffalo. L’équipe perd son quart-arrière de l’avantage numérique, son leader de vestiaire, sa stabilité défensive.

Oui, les Sabres vont devoir improviser. Oui, Don Granato devra ajuster ses paires défensives.

Mais personne dans cette organisation n’oserait dire que c’est un problème.

Parce qu’un vrai problème, ce n’est pas de remplacer 27 minutes par match. Un vrai problème, c’est d’attendre dans une chambre d’hôpital en espérant que le cœur d’une personne reparte.

Et ça, personne ne veut que Dahlin le vive seul.

Ce matin, les adversaires du Canadien, des Bruins ou des Maple Leafs ne se posent même pas la question de l’avantage sportif.

Le monde du hockey s’arrête, observe, et fait ce que les joueurs font dans ces moments-là : il se tait, il respecte, il envoie ses pensées, même sans religion.

Pas de discours pompeux. Pas de polémique. Juste un message universel : on est avec toi.

On ne sait pas quand Rasmus Dahlin reviendra.

Peut-être dans une semaine. Peut-être dans un mois. Peut-être plus tard. Mais il reviendra différemment.

Dans ce sport où l’on glorifie les combats, les blessures et les sacrifices, Dahlin vient malgré lui de montrer l’essentiel : il n’y a rien de plus courageux que de quitter la glace pour aller tenir une main à l’hôpital.

Et si le hockey a parfois tendance à oublier l’humain derrière le numéro, aujourd’hui, le numéro 26 nous le rappelle, sans dire un mot.

Pensées, respect, silence. Le hockey attendra.

AMEN