Peine pour Michel Bergeron: il perd sa bagarre

Peine pour Michel Bergeron: il perd sa bagarre

Par David Garel le 2025-09-16

La nouvelle publicité de matelas Essentia, avec Tony Marinaro et Ivan Demidov, est venue mettre en lumière une vérité brutale que bien des partisans du Canadien refusaient d’admettre : les joueurs du Tricolore sont prêts à prononcer quelques mots en français… mais uniquement quand il y a un cachet au bout.

Dans la pub, on voit Marinaro présenter différents modèles de matelas au jeune prodige russe. Arrive le cinquième modèle, clin d’œil évident au rang où Demidov a été repêché par Montréal. Et là, le moment clé : Demidov, jusque-là en russe et en anglais, se tourne vers la caméra et lâche un « C’est chez nous ».

Trois petits mots. Trois mots qui font bondir les fans… et qui font hurler Michel Bergeron.

Parce que, soyons honnêtes : si c’était pour une mêlée de presse au tournoi de golf, jamais Demidov n’aurait pris la peine d’essayer. Mais quand il s’agit d’un contrat publicitaire, d’un chèque, d’une belle mise en scène… tout devient possible.

La vraie vedette de cette pub, c’est peut-être Tony Marinaro lui-même. L’animateur du 98,5 FM a accepté de se prêter au jeu, dans un rôle qui pourrait sembler secondaire, mais qui s’est transformé en coup de maître.

Pourquoi? Parce que Marinaro, un anglophone de naissance, a fait l’effort d’apprendre le français au fil des années. Il l’utilise, imparfait mais sincère. Il sait que pour percer à Montréal, il faut au minimum montrer qu’on respecte la langue de la majorité.

Et c’est ce qui brise le coeur de Michel Bergeron. Tony Marinaro fait plus d’efforts linguistiques que certains joueurs qui sont ici depuis cinq, six ans. Voilà le genre de détail qui fait bondir le Tigre.

Demidov n’est pas le premier à sortir son « petit français de service » devant les caméras. Nick Suzuki l’avait fait avec Tim Hortons. Cole Caulfield l’avait fait avec McDonald’s, Arber Xhekaj le fait avec La Belle et le Boeuf. Dans les deux cas, le ton était clair : ce n’était pas un signe d’intégration culturelle, mais un outil marketing.

Un sourire, un « Bonjour » enregistré trois fois pour avoir la bonne intonation, et hop : on vend des cafés, des burgers, des matelas. La langue devient un outil de consommation.

Et Michel Bergeron, qui a toujours été le grand défenseur du français dans le vestiaire du Canadien, ne décolère pas. Surtout, "Bergy" a mal.

Depuis toujours, il mène la même croisade : exiger que les joueurs du Canadien parlent français. C’est son cheval de bataille, son obsession, son combat identitaire. Mais à chaque fois, il perd. Nick Suzuki avait promis, au moment de sa nomination comme capitaine, qu’il allait apprendre le français et l’utiliser devant les médias.

Les années passent, et rien ne change. Suzuki se contente de quelques mots préparés en coulisses pour "cash in", jamais plus.

Pour le Tigre, c’est une immense déception. Lui qui croyait encore incarner la voix du peuple francophone voit son combat s’éteindre, une défaite symbolique qui le laisse amer et isolé.

Il attendait que Suzuki fasse un effort sérieux : qu’il réponde en français lors du tournoi de golf, qu’il prononce quelques phrases spontanées dans ses points de presse. Mais non. Rien. Silence radio. Jusqu’à ce qu’un contrat publicitaire arrive.

Il faut comprendre que Michel Bergeron a une mémoire d’éléphant. Il n’a jamais pardonné à Nick Suzuki d’avoir séjourné dans un hôtel à 4000 $ la nuit en République dominicaine, pendant que ses coéquipiers canadiens s’épuisaient au Championnat du monde.

À ses yeux, Suzuki représentait déjà une génération « molle », trop portée sur les privilèges et pas assez sur les sacrifices.

Alors imaginez sa réaction en voyant Demidov, fraîchement débarqué à Montréal, dire « C’est chez nous »… alors que Suzuki, capitaine, refuse encore de parler français au micro de TVA Sports.

Pour le Tigre, c’est une claque au visage. Une humiliation publique.

Les partisans eux-mêmes ont commencé à comparer. À Madrid, Kylian Mbappé a appris l’espagnol en moins d’un an. Oui, il avait une base. Mais il a fait l’effort, car en Europe, la culture sportive est claire : on respecte les supporters, on apprend leur langue.

À Montréal? On se contente de quelques mots quand une marque paie la facture. C’est là que ça devient indécent.

Tout est là : ce n’est pas une question de respect, c’est une question de portefeuille. La preuve est flagrante. Suzuki ne dit rien en français au tournoi de golf, là où l’exercice aurait été symbolique, gratuit, authentique.

Mais il se force pour un café Tim Hortons. Demidov, qui n’a pas encore joué une seule saison complète, fait le même calcul avec Essentia.

Les joueurs vont parler français quand il y a de l’argent au bout. C’est la réalité du sport moderne au Québec.

Michel Bergeron, fidèle à lui-même, ne va pas rater cette occasion. Il prépare déjà une sortie virulente à TVA Sports. Le Tigre considère cette pub comme un affront.

« Quand il y a des dollars, là, tout le monde trouve une façon de dire trois mots. Mais pour les partisans, y’a rien. Pas un mot. C’est inacceptable » va nous lancer Bergy.

Et connaissant son tempérament, il ne tardera pas à passer du privé au public.

Il serait naïf de croire que tout cela reste sans conséquence. Les coéquipiers voient bien que Demidov est déjà la coqueluche des fans, qu’il attire les sponsors, qu’il apprend trois langues pour plaire. Pendant ce temps, Suzuki se fait encore accuser d’être trop effacé.

Même Cole Caufield, pourtant proche de Suzuki, se retrouve comparé défavorablement. Car au moins, lui a fait un clin d’œil au public francophone dans une pub. Suzuki, lui, semble toujours un pas en arrière.

Et ça, c’est exactement le genre de perception qui peut miner un vestiaire.

Soyons francs : tout le monde est complice. Les compagnies, qui se contentent d’un « Bonjour » pour vendre leurs produits. Les médias, qui relaient la pub comme si c’était un geste culturel. Et les joueurs, qui acceptent de monnayer un effort linguistique qu’ils refusent de faire spontanément.

C’est cette hypocrisie qui met Michel Bergeron en furie. Parce que pour lui, le hockey à Montréal n’est pas qu’un sport. C’est une identité, une culture, une fierté collective. Et voir cette culture réduite à un outil marketing, c’est insupportable.

Au final, cette pub Essentia restera peut-être un détail dans la carrière de Demidov. Mais elle symbolise un malaise profond.

Elle montre que, dans ce marché unique au monde, le français n’est pas encore perçu comme un devoir naturel… mais comme une opportunité financière.

Les partisans peuvent bien applaudir, sourire devant le « C’est chez nous ». Michel Bergeron, lui, grince des dents.

Et il n’a pas tort : tant que parler français sera une question de portefeuille, et non de respect, le malaise ne fera que grandir.