Patrick Roy et Mathieu Darche sont devenus le cauchemar du Country Club du Canadien de Montréal.
Un modèle de courage et de clarté émerge à Long Island, là où Mathieu Darche, nouveau DG des Islanders, et Patrick Roy, entraîneur-chef ressuscité du hockey québécois, ont formé en quelques mois un tandem d’une cohérence impressionnante, uni par une vision partagée, mais surtout par une culture du travail qui refuse les demi-mesures, les faux-semblants et la peur de déranger.
Darche, pourtant parachuté dans un vestiaire qu’il ne connaissait pas, n’a pas attendu de se faire des alliés politiques avant d’agir.
Il aurait pu faire ce que plusieurs font en début de mandat : congédier les gens qu'il ne connaissait pas et nommer ses amis. Il a fait tout le contraire.
Et c’est justement cette mentalité qui l’a rapproché de Patrick Roy, avec qui il partage désormais un lien quotidien, tissé à la vitesse de la confiance réelle entre deux hommes... qui sont devenus des meilleurs amis.
Darche ne connaissait Roy que de réputation, une réputation dure, parfois caricaturale de gars sanguin qui saute des coches pour rien, mais il a voulu en avoir le cœur net.
Alors il a organisé une rencontre. Cinq heures plus tard, autour d’un repas, il savait. Il allait bâtir avec lui. Et ce qu’il a découvert, c’est un Roy humble, passionné, acharné, capable d’écouter, de douter, de demander conseil.
Le témoignage de Darche livré à Guillaume Lefrançois de La Presse, nous a donné des frissons dans le dos:
« Je suis revenu de notre rencontre, j’ai dit : je veux travailler avec toi. On a la même vision de la façon de jouer. On se parle pas mal tous les jours. Sur la route, on va toujours manger ensemble.
Mon image de lui avant, c’était “my way or the highway”. Ce n’est pas ça. Il est tellement plus humble que ce que les gens pensent. Il n’a pas fait 14 ans d’autobus dans le junior pour l’argent. Il est passionné, humble, il me demande toujours mon opinion. Je ne pouvais pas demander mieux. »
Tiens, tiens. Pas le caricatural “my way or the highway” qu’on brandit encore trop souvent à Montréal pour décrire la légende. (on devrait l'utiliser pour décrire Martin St-Louis et son système défensif man-to-man).
Non, un Roy transformé par les années dans le junior, quatorze ans à traverser le Québec en autobus, pas pour l’argent, mais pour le hockey, pour la transmission, pour le feu sacré.
“Je veux travailler avec toi”, lui a lancé Darche en sortant du restaurant. Et depuis, ils ne se quittent plus : ils se parlent chaque jour, mangent ensemble sur la route, échangent, débattent, mais surtout, ils avancent.
Pendant ce temps, les résultats suivent. Les Islanders n’ont pas seulement remonté la pente, ils ont dominé l’Est sur une séquence de deux mois avec une fiche de 18-8-3, surpassant toutes les attentes. Ils sont premiers de la conférence au moment où l'on se parle.
Et cette métamorphose, elle est venue d’une série de gestes concrets, comme la transaction de Noah Dobson, pilier défensif qu’on croyait intouchable, mais dont l’attitude et la mollesse n’avaient plus leur place dans la nouvelle culture de l’équipe.
Darche a osé tourner la page, sans attendre que la grogne s’installe. Il a finalement obtenu deux prodiges en l'attaquant Victor Eklund et le défenseur Kashawn Aitcheson.
Il a aussi fait preuve de flair en donnant une vraie chance à Matthew Schaefer, 18 ans à peine, propulsé hier dans un rôle de 28 minutes par match, une décision impensable à Montréal, où on enterre trop souvent le talent derrière la prudence. (parlez-en à Demidov).
Mais le geste le plus fort, celui qui a peut-être définitivement cassé l’ancien moule, c’est cette décision, rare dans le monde d’aujourd’hui, de laisser Mathew Barzal de côté pour un match, après un retard.
Un match perdu 6-2 contre la Caroline, certes, mais une leçon de vestiaire. Parce qu’à Long Island, désormais, la discipline et la culture de la responsabilisation ont préséance sur la peur des conséquences.
Darche n’a pas eu besoin d’imposer la peur pour faire régner l’ordre. Il a agi avec transparence, avec droiture. Il a écouté son coach, il a protégé ses jeunes, il a osé secouer ses vétérans.
Et Patrick Roy, dans ce contexte, peut enfin déployer tout ce qu’il n’a jamais pu faire sous la férule d’un Lou Lamoriello rigide et conservateur.
Roy a retrouvé un DG qui le respecte, le comprend, et lui laisse de l’espace pour exercer son leadership.
Et pendant qu'à Montréal, Jeff Gorton a engagé son meilleur ami Kent Hughes qui a engagé son meilleur ami Martin St-Louis qui s'est arrangé pour donner une fausse jon à son meilleur ami Vincent Lecavalier, on regarde ce qui se construit à Long Island avec envie, avec frustration, avec ce sentiment sourd que le CH est passé à côté de quelque chose d’historique.
On ne parle plus ici d’un fantasme de nostalgie, mais d’un tandem moderne, complémentaire, crédible, qui donne des leçons à toute la LNH et qui les donne, surtout, au Canadien de Montréal.
En deux semaines après être arrivé en poste, il a congédié l’entraîneur des gardiens Piero Greco, une décision qui aurait fait trembler les murs au Centre Bell, simplement parce qu’il avait identifié un problème criant : le déclin inexpliqué d’Ilya Sorokin, un des jeunes gardiens les plus talentueux de la ligue, qui venait de vivre une saison cauchemardesque.
À Montréal, un tel geste aurait exigé un vote unanime du comité fantôme du country club. Voilà pourquoi Éric Raymond est toujours en poste.
À Long Island, Darche a simplement pris une décision de hockey. Parce que le hockey, ce n’est pas une histoire d’amitiés. C'est une question de résultats. à
Parions que si Patrick Roy était coach du Canadien de Montréal, le Country Club aurait explosé depuis longtemps.
