À Brossard, une rumeur enfle depuis plusieurs jours. Une rumeur qui en dit long sur la passion dévorante de deux prodiges, deux artistes de la rondelle qui refusent de dormir tant qu’ils n’ont pas inventé un nouveau move.
Ivan Demidov et Lane Hutson sont devenus inséparables. Ils vivent littéralement au Complexe CN. Et selon les témoins, ils s’entraînent tard le soir, parfois au point de donner l’impression de passer des nuits blanches sur la glace.
Quand la folie devient leur méthode.
Appelons un chat un chat : ce qu’ils font, c’est du jamais vu à Montréal. On a déjà vu des joueurs rester après l’entraînement pour lancer des rondelles dans un filet désert.
On a déjà vu des recrues arriver à l’aube pour impressionner l’entraîneur. Mais des gars qui restent tard le soir, qui s’amusent à inventer des feintes comme si la patinoire était leur laboratoire? Ça, c’est une première.
Le père de Lane Hutson révélé que son fils et Demidov s’entraînaient ensemble « la nuit » depuis deux semaines. « Bon, j’imagine qu’il voulait dire très tard le soir, mais c’est tout de même hallucinant », a-t-il précisé. Et il a raison : c’est hallucinant.
On parle ici de deux jeunes qui refusent d’arrêter, qui veulent transformer chaque geste en magie. Ils se montrent des moves inédits, ils testent des feintes improbables, ils cherchent à créer des séquences jamais vues.
Un témoin a même filmé huit minutes consécutives de feintes qu’ils ont inventées ensemble, et les images font déjà frissonner ceux qui les ont vues.
Martin St-Louis doit prendre des notes.
Si le coach a un minimum de flair, il ne peut pas ignorer ce duo. L’entraîneur du Canadien a souvent répété qu’il voulait « libérer la créativité » de ses joueurs. Eh bien, voilà deux machines à créativité qui demandent une seule chose : être réunies sur l’avantage numérique.
Et pourtant, il existe encore une résistance dans le staff. Certains craignent qu’un duo aussi offensif soit trop risqué, trop porté vers le spectacle. Mais en voyant ce qu’ils développent à Brossard, il devient difficile de nier l’évidence : ces deux-là sont faits pour jouer ensemble.
Il faut aussi replacer cette histoire dans son contexte. Car si Hutson est présentement l’un des noms les plus discutés à Montréal, ce n’est pas seulement à cause de ses nuits blanches avec Demidov. C’est aussi à cause de son père, Rob Hutson.
Rob a lancé une autte bombe : il a rappelé que son fils avait la citoyenneté canadienne et qu’il pourrait, un jour, porter l’unifolié.
Une déclaration qui a fait l’effet d’un coup de théâtre médiatique. Bill Guerin, patron de USA Hockey, est en furie. Les dirigeants du CH, eux, n’ont pas aimé du tout. Et Lane Hutson, au milieu de tout ça, s’est retrouvé pris entre deux feux.
Ce qui aurait pu l’écraser moralement, il a décidé de l’oublier en se réfugiant sur la glace. Et c’est là qu’intervient Ivan Demidov. Le Russe est devenu son pilier, son contrepoids, son ami.
Quoi de mieux qu’être sur la glace et tout oublier avec son ami.
Le père a ajouté de l’huile sur le feu. L’agent, Sean Coffey, a dû éteindre l’incendie en parlant de « propos sortis de leur contexte ».
Mais pendant ce temps, Demidov a simplement dit à Hutson :
« Viens, on retourne sur la glace. »
Et c’est exactement ce qu’ils ont fait.
Deux génies qui se reconnaissent.
La citation de Hutson à propos de Demidov est nous donne des frissons dans le dos :
« Il possède un cerveau de hockey intégré. Son intelligence sur la glace est vraiment spéciale, et c’est rare de voir ça chez un jeune qui arrive dans la ligue. Ce qu’il fait avec la rondelle, les jeux qu’il voit et que les autres manquent, c’est impressionnant. »
Ironie du sort, cette phrase aurait pu s’appliquer mot pour mot à Hutson lui-même l’an dernier. Lui aussi avait été décrit comme un prodige qui voyait tout, qui inventait tout.
Aujourd’hui, il reconnaît ces mêmes qualités chez un autre. Et ce respect mutuel est le ciment de leur complicité.
Ils ne se contentent pas de répéter les classiques. Ils innovent. Ils imaginent de nouvelles trajectoires de passes, de nouvelles feintes, de nouveaux maniements de rondelle.
Ils s’entraînent à combiner leurs forces : la vision de Hutson et les mains de Demidov. Les deux ensemble? C’est un cauchemar annoncé pour les défenses adverses.
Mais derrière la magie des feintes, il y a la réalité brutale du hockey moderne : les contrats. Hutson est en pleine négociation. Son agent réclame 9,5 M$ par année, Kent Hughes refuse d’aller au-delà de 8,5 M$. La tension est énorme.
Et voilà que Renaud Lavoie, sur BPM Sports, a ajouté un élément de plus : selon lui, Noah Dobson devrait prendre le rôle de quart-arrière de la première unité de powerplay, reléguant Hutson à la deuxième vague. Une hypothèse qui, si elle se concrétise, pourrait faire baisser ses statistiques… et donc son prix.
Dans ce contexte, l’entente invisible entre Demidov et Hutson prend une dimension politique. Car si St-Louis les utilise ensemble, Hutson aura de quoi gonfler ses chiffres. Sinon, son agent risque de hurler à la manipulation.
La fameuse vidéo de huit minutes circule déjà dans certains cercles. On y voit les deux amis tenter des feintes improbables, se sourire après chaque succès, se taper dans les gants après chaque raté. Une chimie pure.
On a l’impression de voir deux enfants qui jouent au hockey dans leur rue, sauf que ces enfants-là valent chacun des dizaines de millions dans le futur.
C’est cette vidéo que les partisans brandissent déjà comme preuve : ces deux-là doivent être ensemble. Pas sur la deuxième unité, pas en option B. Ensemble, sur la grande scène, pour électriser le Centre Bell.
On le sait : Hutson a déjà été élu recrue de l’année. Demidov, lui, est déjà pressenti pour le Calder. Et si le premier devenait le mentor du second? Si, ensemble, ils formaient le noyau offensif du Canadien pour la prochaine décennie?
Tout est possible. Mais ce qui est sûr, c’est que leur complicité dépasse le simple cadre du hockey. Ils vivent pour le jeu, ils vivent à l’aréna, et ils s’entraînent comme s’ils voulaient réinventer le sport. Montréal rêvait d’un artiste depuis Guy Lafleur. Elle en a maintenant deux.
Les « nuits blanches » de Demidov et Hutson ne sont pas qu’une anecdote croustillante. Elles sont le symbole d’un duo qui refuse la norme, qui veut repousser les limites.
Et elles posent une question fondamentale à Martin St-Louis : aura-t-il le courage de miser sur eux ensemble, sur la première unité d’avantage numérique?
Car si ce duo est brisé, si Hutson est relégué à la deuxième vague, tout change. Son contrat, ses statistiques, même la valeur qu’on lui accorde dans les pools de hockey fantasy.
Mais si St-Louis les réunit… alors Montréal pourrait bien avoir trouvé la recette pour dominer la LNH dans les prochaines années.
Deux génies, deux insomniaques du hockey, deux amis devenus inséparables.
Les nuits blanches de Brossard ne font que commencer.