Le moment a duré à peine quelques minutes, mais il a suffi pour changer complètement le ton de l’entraînement du Canadien.
Avant même que la première rondelle touche la glace, Martin St-Louis a pris Zachary Bolduc à part pour une longue discussion, loin du groupe, dans un coin de la patinoire:
Pas un échange brusque, pas un sermon en public, mais une conversation soutenue, front contre front, le coach expliquant longuement, Bolduc écoutant avec intensité, les bras croisés, le regard fixe.
Une scène calme en apparence, mais avec un message clair : le statut de Bolduc dans l’équipe est en jeu, et on vient de le lui dire en face.
Ce qui a suivi sur la glace n’avait rien d’ordinaire. Si certains joueurs ont traversé l’entraînement avec la nonchalance habituelle d’un lundi matin, Bolduc, lui, a patiné comme si sa saison dépendait de chaque foulée.
On l’a vu manger les bandes, multiplier les accélérations, attaquer chaque exercice avec une intensité rarement vue depuis son arrivée à Montréal. Ce n’était pas un joueur qui “essaie de bien paraître”, c’était un gars qui se battait pour son rôle, pour son identité, pour son futur dans cette formation.
Dans un drill de transitions latérales, il a explosé au point où certains joueurs se retournaient pour suivre son rythme. Dans les cycles le long de la rampe, il frappait les bandes avec une force qui résonnait jusque dans les estrades.
On aurait dit un joueur qui voulait prouver qu’il avait entendu le message et qu’il refusait de redevenir un ailier périphérique sans identité. Pendant près d’une heure, Bolduc a été le meilleur joueur sur la patinoire. Aucun doute là-dessus.
Il y avait dans cet entraînement une sorte d’urgence que l’on ne voyait pas chez lui ces derniers jours. Peut-être parce qu’il sait que s'il ne se réveille pas demain soir contre les Capitals, il va chuter dans la hiérarchie pour de bon.
Malgré un match pénible à Columbus et des statistiques avancées qui jouent contre lui, Martin St-Louis a décidé de prolonger l’expérience Zachary Bolduc sur le premier trio.
Lors de l’entraînement de mercredi matin à Brossard, Bolduc patinait toujours à la gauche de Nick Suzuki et Cole Caufield, signe que le personnel d’entraîneurs veut lui offrir une chance réelle de s’implanter dans un rôle offensif majeur plutôt que de le condamner après une seule mauvaise sortie.
Bolduc - Suzuki - Caufield
Slafkovsky - Kapanen - Demidov
Roy - Evans - Anderson
Davidson - Veleno - Gallagher
On en connaît pas la nature des discussion entre St-Louis et Bolduc, mais clairement le coach lui a dit que c'était sa dernière chance.
Dès le premier coup de sifflet, Bolduc patinait comme un joueur qui se sent redevable : coups de patins explosifs, accélérations répétées dans les coins, mises en échec sur les bandes, il était le joueur les plus intense sur la glace.
Reste maintenant à voir si cette énergie pourra enfin se traduire dans un match réel, car les comparaisons avec Slafkovsky et Demidov, tous deux dominants avec Kapanen à Columbus, veulent tous les deux regoûter (Slaf) ou goûter (Demidov) au premier trio.
Bolduc sait très bien que les médias commencent à le cibler. Il sait que tout le monde est au courant qu'il était "out of shape".
La question maintenant n’est plus ce qui s’est dit entre St-Louis et Bolduc, mais ce que St-Louis attendait réellement de lui.
Et clairement, il s'attend à ce qu'il retrouve une forme physique digne de la LNH.
Si l’on se fie au langage corporel du coach, calme, mais direct, ce n’était pas un message émotionnel, mais un ultimatum technique : gagne tes batailles, utilise ton gabarit, arrête de jouer léger. Et Bolduc a répondu immédiatement.
Mais l’entraînement n’est jamais la preuve finale. Toute cette énergie doit maintenant se transporter dans un match réel, devant un adversaire, dans un contexte où il n’a pas le luxe de se cacher derrière Caufield et Suzuki ou d’observer la rondelle en périphérie. Bolduc a eu un message clair, il a réagi aujourd’hui. La vraie question : réagira-t-il demain?
Parce qu’au prochain match, il n’y aura plus de bande à frapper, plus de vidéo à analyser, plus de “bon effort en pratique”. Il y aura un entraîneur qui décidera si Bolduc joue huit minutes ou seize, s’il touche au power play ou s’il en sort, s’il reste sur le banc ou s’il regagne la confiance.
Si l’entraînement d’aujourd’hui est un indice, Bolduc n’a pas l’intention de laisser quelqu’un d’autre écrire son histoire.
Mais ce soir, c’est Martin St-Louis qui tranche.
