Martin St-Louis est en train de préparer une bombe à retardement. Et cette bombe pourrait encore une fois lui exploser en plein visage.
On peut observer lors des matchs intra-équipe que l’entraîneur du Canadien songe sérieusement à former sa première paire défensive avec Mike Matheson et Noah Dobson. Une combinaison qui, sur papier, peut sembler excitante.
Deux patineurs de haut niveau. Deux défenseurs capables de relancer l’attaque et de dicter le tempo. Mais dans la réalité, c’est une recette pour multiplier les revirements et exposer le CH à des désastres défensifs.
Dans un article publié dans le NY Times, Arpon Basu rapporte que l’idée derrière ce duo, c’est de maximiser la possession. Si Matheson et Dobson ont la rondelle, l’équipe passera moins de temps dans sa zone et pourra imposer son rythme. Un raisonnement séduisant. Mais incomplet.
Parce que le hockey, ce n’est pas seulement un jeu de possession. C’est un sport de transitions, de revirements, d’erreurs. Et c’est précisément là que le bât blesse : que se passe-t-il quand ces deux défenseurs, tous les deux portés vers l’offensive, se font surprendre ?
Matheson est reconnu pour sa vitesse et sa créativité. Il adore transporter la rondelle, sauter dans le jeu, créer des ouvertures. Dobson, lui aussi, se distingue par sa mobilité, sa capacité à anticiper, ses passes rapides.
Individuellement, ils sont précieux. Mais ensemble ? Ils se dédoublent. Ils pensent la même chose, au même moment. Et quand deux défenseurs offensifs prennent des risques en même temps, l’adversaire n’attend qu’une erreur pour frapper.
Ce qui choque, c’est que le Canadien avait sous la main une option beaucoup plus logique : jumeler Dobson avec Kaiden Guhle. Guhle est, de loin, le meilleur défenseur défensif du CH. Solide, calme, fiable, capable de fermer le centre et de bloquer les entrées.
À côté de lui, Dobson aurait eu la liberté de s’impliquer en attaque, tout en sachant que son partenaire couvrait ses arrières. C’est ça, une vraie paire numéro un : un joueur qui provoque, un joueur qui éteint. Un équilibre naturel.
Au lieu de ça, Martin St-Louis choisit l’audace pure. Deux défenseurs offensifs ensemble. Comme s’il voulait faire de la première paire un prolongement de son système homme-à-homme, ce fameux système défensif qu’il a imposé en début de mandat… et qui a explosé en plein visage du CH.
On se souvient tous de ces séquences où les joueurs poursuivaient chacun leur homme, se perdaient en couverture, et laissaient le gardien exposé. St-Louis s’est entêté des mois avant de revenir à un système plus traditionnel.
Ce n’est pas la première fois que son entêtement soulève des doutes. On l’a vu avec l’avantage numérique : pendant longtemps, il a refusé d’utiliser un défenseur comme quart-arrière, préférant un schéma à cinq attaquants.
Résultat : un jeu de puissance anémique, incapable de créer du danger. Il a fini par céder, mais seulement après avoir gaspillé plusieurs matchs.
Aujourd’hui, on a l’impression qu’il retombe dans ses travers. La logique veut que tu répartisses tes forces, que tu balances tes profils. Mais St-Louis préfère tenter un coup d’éclat. Comme si l’histoire ne lui avait rien appris.
Prenons un exemple concret. Toronto arrive au Centre Bell. Dobson tente une passe transversale à la ligne bleue. Interception. Matthews file avec Nylander à ses côtés. Matheson, déjà projeté en avant, doit se replier en catastrophe. Résultat : un deux-contre-un, un but.
On a beau répéter que « défendre commence en zone neutre », quand tu te fais piéger en haut, c’est ton filet qui paie le prix.
C’est ça, le danger de ce duo. Pas leur talent, leur talent est indéniable. Pas leur mobilité, ils sont parmi les meilleurs patineurs de la ligue. Mais leur mentalité. Ce sont deux défenseurs qui pensent d’abord à créer.
Pas à éteindre. Pas à bloquer. Pas à protéger. Et une première paire doit être capable de tout faire.
On comprend ce que St-Louis veut faire. Le CH veut devenir une équipe de possession, rapide, imprévisible. Mais le hockey, c’est aussi une question de gestion du risque. Et une défense construite sur des paris offensifs sans garde-fous, ça casse toujours.
Les partisans du CH méritent mieux qu’un spectacle qui se transforme en roulette russe. Ils méritent une défensive stable, qui protège Samuel Montembeault quand les tempêtes frappent. Parce qu’elles vont frapper.
La saison est longue, les erreurs s’accumulent, les blessures surviennent. Et dans ces moments, ce n’est pas ton défenseur le plus créatif que tu veux voir. C’est celui qui bloque le tir, qui gagne la bataille le long de la rampe, qui nettoie l’enclave.
Matheson et Dobson peuvent être utiles. Très utiles. Mais pas ensemble. Les mettre côte à côte, c’est nier une évidence : dans le hockey moderne comme dans l’ancien, une paire de défenseurs doit être complémentaire.
L’un attaque, l’autre couvre. L’un ose, l’autre protège. Sinon, c’est un château de cartes.
En conclusion, si Martin St-Louis persiste avec ce duo, il répétera la même erreur que dans ses expériences passées : s’accrocher à une idée séduisante, mais irréaliste.
Le Canadien ne peut pas se permettre de transformer sa première paire en génératrice de revirements. Parce que ce n’est pas seulement un choix de composition. C’est une question d’identité.
Et en ce moment, l’identité défensive du CH repose sur une illusion dangereuse.