Le plan caché de Martin St-Louis derrière l’absence de Demidov

Le plan caché de Martin St-Louis derrière l’absence de Demidov

Par André Soueidan le 2025-10-04

Chaque geste de Martin St-Louis semble calculé, même quand il prend tout le monde à contre-pied.

À quelques heures du dernier match préparatoire du Canadien contre les Sénateurs d’Ottawa, l’entraîneur du Tricolore a encore défié les attentes : Ivan Demidov restera dans les gradins.

Pas de blessure, pas de sanction. Juste un choix réfléchi.

Et, dans le langage de St-Louis, ça veut tout dire.

« Le trio à Kapi-Newy-Demi, ils m’en ont montré assez. Je veux donner l’opportunité à d’autres joueurs de se faire valoir », a-t-il expliqué calmement après l’entraînement matinal.

Derrière cette phrase banale se cache une stratégie limpide : le camp d’évaluation est terminé pour Demidov.

Ivan Demidov a fait exactement ce qu’on attendait de lui : dominer sans forcer, créer des jeux que personne d’autre n’ose tenter et imposer son rythme à chaque présence.

Mardi soir à Québec, il a confirmé qu’il voyait le hockey une seconde avant tout le monde.

Plutôt que de le brûler inutilement dans un autre match “de foire”, St-Louis le met à l’abri. C’est une décision d’adulte, de stratège, pas de romantique.

« On veut être prêts pour tout », a-t-il ajouté, comme pour sceller son plan sans en dire trop.

Autrement dit : le Canadien se prépare à la vraie saison. Le cirque de la présaison, les guerres inutiles avec Ottawa, les règlements de compte d’octobre ... tout ça, c’est derrière.

Ce qu’il veut, lui, c’est un Ivan Demidov frais, affamé et prêt à attaquer la LNH quand les vrais points compteront.

La décision de St-Louis cache aussi une autre vérité : le Canadien teste un mariage offensif à fort potentiel.

Lorsqu’ils ont partagé la glace en avantage numérique, Patrik Laine et Ivan Demidov se sont trouvés instantanément.

Des lignes de passe fluides. Une compréhension instinctive. Une efficacité chirurgicale dans les espaces restreints.

« Il trouve les lignes de passe, il est créatif. À cinq contre quatre, c’est presque impossible de défendre contre lui », disait récemment un analyste de TVA Sports.

Et St-Louis, lui, observe. Il expérimente sans le dire.

À cinq contre cinq, il veut que Laine apprenne à jouer le détail, la rigueur, la structure. À cinq contre quatre, il veut le laisser frapper. Comme un frappeur désigné au baseball : on le garde pour le moment clé.

Laine a encore du travail, St-Louis le sait, mais l’idée de bâtir deux unités offensives redoutables ...une autour de Suzuki-Caufield-Slafkovsky, l’autre autour du duo Demidov-Laine-Hutson ... excite déjà tout le monde dans les coulisses de Brossard.

L’autre réalité derrière cette décision : le contexte.

Trois jours plus tôt, à Québec, la partie contre les Sénateurs a viré à la foire.

Plus de 150 minutes de pénalité, des coups vicieux, des altercations ridicules.

Nick Cousins avait tenté de blesser Demidov, Hayden Hodgson s’en était pris à Newhook, et les frères Xhekaj avaient dû jouer les pompiers sur patins.

Alors, ce soir, St-Louis refuse de rejouer ce scénario.

« J’espère un match de hockey propre, fort, un vrai match. Mais on va être prêts pour tout », a-t-il dit d’un ton calme, presque zen.

Traduction : pas question d’offrir un nouveau cirque aux caméras. Si Ottawa veut encore brasser, qu’ils le fassent seuls. Montréal, cette fois, va jouer au hockey.

Le vrai test : la profondeur

C’est aussi une occasion pour d’autres.

En l’absence de Demidov et de son trio, Joe Veleno, Brendan Gallagher et Kirby Dach obtiennent une audition de luxe. St-Louis adore cette combinaison improbable.

« J’ai aimé ce que j’ai vu à Québec. Je ne sais pas si je vais continuer dans cette direction-là », a-t-il confié.

L’expérience, le chaos contrôlé de Gallagher, la taille et la vision de Dach, la polyvalence de Veleno : voilà le genre de trio qui peut survivre à tout.

Et à travers eux, St-Louis évalue ce qu’il a : du caractère, de la cohésion, du leadership.

Pendant ce temps, Lane Hutson continue de s’imposer comme le cœur offensif de la relance du Canadien.

Le jeune défenseur américain est dans une forme éclatante. Son cardio, son tir, sa vision du jeu ... tout respire la progression.

« Lane voit la glace d’une manière que très peu de joueurs voient. Il peut changer la direction d’un avantage numérique à lui seul », confiait un adjoint après la rencontre de mardi.

En surface, ce match contre Ottawa pourrait sembler banal. Mais dans les détails, c’est un test psychologique pour tout le monde.

Le Canadien doit prouver qu’il a appris de ses erreurs, qu’il peut imposer son style sans se salir les mains.

Et St-Louis, lui, doit prouver qu’il sait gérer un vestiaire où les jeunes prodiges ... Demidov, Hutson, Slafkovsky ... doivent cohabiter avec les vétérans.

Ce qu’il a fait ce matin, en retirant Demidov de l’équation, c’est simple : il a pris le contrôle du tempo. Il a envoyé un message à son équipe, à ses jeunes, à la ligue.

Le Canadien de 2025 ne réagit plus. Il anticipe.

Et la semaine prochaine, quand la saison commencera pour vrai, Ivan Demidov sera prêt.

Parce que Martin St-Louis, lui, l’est déjà.

AMEN