Le Canadien a beau enchaîner les bons moments, la réalité finit toujours par rattraper ceux qui refusent de la regarder en face.
Et depuis quelques semaines, malgré l’excitation autour du jeune noyau, il y a une vérité qui flotte au-dessus du vestiaire comme une ombre que Kent Hughes ne peut plus ignorer.
Ce n’est pas une crise. Ce n’est pas un effondrement. C’est simplement un constat brutal : Montréal n’arrive pas à battre les équipes dont le noyau est composé de vétérans aguerris.
Et ce motif commence à être trop clair pour qu’on puisse encore parler d’un hasard.
Les défaites les plus révélatrices de la saison pointent toutes dans la même direction.
Les Kings, avec Kopitar qui joue sa dernière saison, Danault, Fiala, Kempe et un groupe blindé d’expérience.
Les Rangers, où Zibanejad et Panarin ont dicté le tempo comme des horloges suédo-russes.
Les Maple Leafs, qui peuvent encore compter sur les automatismes d’un Matthews-Nylander-Tavares-Rielly...
Les Oilers, menés par McDavid et Draisaitl, qui ont volé le Canadien sur l'avantage d'un homme.
Et quand on regarde ce jeune groupe, on comprend pourquoi. Le Canadien est l’une des équipes les plus jeunes du circuit.
Le talent est là, la vitesse est là, la créativité aussi.
Demidov, Slafkovsky, Dach, Kapanen, Newhook, Hutson : la construction est excitante, différente, rafraîchissante.
Mais l’expérience, elle, ne s’achète pas au dépanneur. Elle se construit à force de batailles que ces jeunes n’ont pas encore livrées.
Et quand Montréal se retrouve devant des équipes qui ont connu la guerre des séries, ça paraît.
On peut bien célébrer les victoires convaincantes comme celle contre Utah.
On peut se réjouir de la progression fulgurante de Demidov, de la constance de Suzuki ou de la renaissance lente mais réelle de Kirby Dach.
Mais dès que le Canadien tombe contre des clubs qui savent fermer un match, ralentir le tempo, éteindre un jeune feu comme on souffle une chandelle, on voit immédiatement où se situe le plafond de cette équipe.
Le Canadien n’a pas encore ce joueur d’impact d’âge mûr, celui qui a déjà gagné, déjà dominé, déjà traîné une équipe sur son dos dans un match tendu.
Et c’est là que le constat devient sérieux, parce qu’il touche directement ce que Kent Hughes tente de construire.
Le directeur général a misé sur la jeunesse, et il avait raison.
Mais pour monter d’un étage, il manque une pièce. Pas un autre espoir, pas une autre recrue : un vétéran de calibre élite capable de dicter le tempo d’un match contre ces équipes qui ne pardonnent rien.
Et c’est exactement là que la réalité rattrape le Canadien. On peut répéter tant qu’on veut que « la jeunesse va apprendre », mais il y a des moments dans un match où l’apprentissage ne suffit plus.
L’action d’hier le résume mieux que n’importe quelle conférence de presse : Joel Armia, un gars qui n’a jamais été une superstar, mais qui a vu mille batailles dans la LNH, a littéralement volé la rondelle à Lane Hutson en lui soulevant le bâton comme on le ferait à un junior trop sûr de lui en repli défensif.
Hutson, brillant offensivement, s’est cru confortable pendant une seconde. Une seule. Et Armia l’a fait payer avec un but.
C’est ce genre de séquence qui expose le vrai manque de ce club : pas plus de talent, pas plus de jeunes, pas plus de projets… mais des gars qui ont déjà gagné, qui savent exactement comment fermer la porte quand l’autre équipe pousse.
Ces joueurs-là ne poussent pas sur les arbres. Tu ne les repêches pas. Ils ont déjà vécu les séries, les guerres, les grosses minutes.
Aujourd’hui, au sein du Canadien, il n’y a qu’un seul homme dans toute l’organisation qui répond à ce critère : Martin St-Louis.
Nos vétérans? Aucun n’a gagné quoi que ce soit. Ce n’est pas une critique : c’est seulement une vérité brute.
Montréal n’a pas de Kopitar, pas de Perry, pas de Pietrangelo.
Tant que cette pièce manquante ne sera pas ajoutée, les jeunes du CH joueront contre des clubs qui, eux, savent déjà comment tuer l’espoir dans l’œuf.
Un joueur du calibre d’un Kopitar, d’un Panarin, d’un Stone, d’un Forsberg ou d’un Marchessault dans son meilleur temps.
Un gars qui sait comment survivre dans la jungle quand la cadence se resserre.
C’est la grande vérité cachée dans ce début de saison : le Canadien progresse, mais les défaites contre les équipes expérimentées révèlent à quel point ce groupe est encore jeune.
Et ce n’est pas un défaut. C’est une étape. Une étape normale, logique, inévitable dans une courbe de reconstruction.
Mais une étape qui force Kent Hughes à regarder la suite avec lucidité.
Le talent est là. Le potentiel est immense. Les fondations sont solides. Il manque simplement ce joueur capable d’affronter les grands clubs de front.
Celui qui sait comment gagner des matchs où chaque décision compte. Celui qui, quand le jeu se ferme, reste ouvert.
Quand Montréal sera capable de battre ces équipes-là avec constance, on saura que ce club est prêt pour le prochain chapitre.
Pour l’instant, le constat flotte, lourd, mais honnête : ce jeune Canadien a besoin d’un pilier d’expérience pour affronter les géants de la LNH.
Et Kent Hughes le voit. Pas besoin qu’il le dise pour comprendre que la réflexion est déjà amorcée.
À suivre ...
