On entendait presque le vent de la tempête tourner au-dessus du Centre Bell lorsque le verdict est tombé : Martin St-Louis avait décidé de punir Ivan Demidov, encore une fois, en l’écartant de la première unité d’avantage numérique.
Un geste qui a déclenché un véritable tremblement à Brossard, et pas seulement sur les réseaux sociaux. Car dans le même souffle, l’entraîneur-chef a choisi, encore, de protéger Juraj Slafkovský, de le chouchouter, de l’amener dans des discussions où il n’a pas toujours sa place, et surtout de le défendre bec et ongles comme s’il fallait absolument justifier son rôle intouchable.
Et comme par magie, au même moment où Montréal explosait d’indignation devant la punition imposée à Demidov, The Athletic publiait un portrait flatteur de Slafkovský, vantant sa « vitesse de croisière », sa croissance, son rapprochement statistique avec Connor McDavid. Une coïncidence? Peut-être. Mais pour beaucoup, ça ressemblait à une opération pour protéger le Slovaque... et son coach qui le protège comme un papa poule.
Dans l’article, Slafkovský se réjouit d’avoir atteint 37,07 km/h en échec avant contre l'Utah. Une statistique impressionnante… sur papier. Lui-même était tout excité par la donnée envoyée par Adam Nicholas, allant jusqu’à demander :
« C’est quoi le plus vite, 24? » avant qu’on lui confirme que McDavid avait touché 39,61 km/h cette saison. Pour Slafkovský, ça devient un badge d’honneur : être passé « proche » de McDavid.
Le problème, c’est que le hockey ne se joue pas sur un sprint de trois secondes, mais sur une accumulation de décisions, de lectures de jeu, de finesse technique, trois domaines où Demidov excelle et où Slafkovský continue d’apprendre. Pourtant, dans l’univers de Martin St-Louis, les règles ne sont jamais les mêmes pour tout le monde.
Car pendant que Slafkovský se félicitait d’avoir atteint sa vitesse maximale sans la rondelle, Demidov, lui, a été retiré du powerplay pour… quoi au juste?
Une pénalité mineure en avantage numérique? Une erreur comme tous les jeunes joueurs en commettent? Une erreur qui, chez Slafkovský, serait expliquée par le vocabulaire habituel : progression, patience, apprentissage, vitesse de croisière, croissance, processus. Mais chez Demidov? Punition immédiate. Retrait de la première unité. Message public.
C’est là que la tempête a éclaté : les partisans ont rapidement compris que St-Louis venait d’appliquer une justice à deux vitesses. Slafkovský bénéficie d’une marge d’erreur infinie. Demidov, lui, marche sur un fil.
Dans l’entrevue, Slafkovský répète vouloir contribuer autrement que par les points, mais admet avec un sourire qu’il aime bien « avoir quelques biscuits ».
Une ligne sympathique, mais révélatrice : même lui reconnaît qu’il ne produit pas assez, qu’il cherche toujours ses repères offensifs, qu’il attend « un peu de chance ». Pendant ce temps, Demidov, qui produit plus avec moins de temps et moins d’occasions, est celui qui paie la note.
Cette différence de traitement alimente une frustration légitime à Montréal : pourquoi le joueur le plus talentueux depuis Guy Lafleur est-il traité plus durement que tous les autres?
Pourquoi un sprint de trois secondes de Slafkovský fait-il la manchette pendant que Demidov, pourtant bien meilleur sur le reste de la glace, est puni à la moindre bourde?
Slafkovský travaille fort, personne ne remet ça en doute. Il a fait un gros effort hors-saison, il progresse, il veut bien faire. Mais ce n’est pas la question. La question, c’est : pourquoi St-Louis ne lui applique jamais le même standard qu’aux autres?
Ce qui rend toute cette histoire encore plus déroutante, c’est que Slafkovský lui-même entretient cette comparaison avec Connor McDavid. Et il ne faut même pas lui en vouloir. Quand tu touches 10 millions de dollars en salaire versé cette saison, quand tu empoches une moyenne de 7,6 millions de dollars par année étalés sur 8 ans, il est normal que tu te compares aux joueurs les mieux payés de la LNH.
Slafkovský se compare à McDavid parce qu’il gagne, cette saison, exactement la même chose que McDavid en salaire versé. Même si l’impact sur le cap est différent, le chèque qui tombe dans le compte bancaire est le même. Dans sa tête, comment ne pas vouloir se mesurer au meilleur joueur au monde?
À Montréal, un joueur à 10 millions n’a pas le droit d’être un figurant.
Slafkovský entre dans la zone dangereuse où tout ce qu’il fait sera interprété à travers son contrat. Et dans un marché comme Montréal, où les chiffres deviennent des armes, il n’aura jamais droit à un moment de répit.
Voilà pourquoi Martin St-Louis continue de le chouchouter encore et encore.
Toujours plus facile de punir le kid qui empoche 940 000 dollars.
