C’est une sortie que personne ne croit.
Une déclaration rédigée de manière "fake", publiée sur Facebook dans un moment de panique stratégique, et qui tente, sans grande conviction, de faire croire à un départ volontaire.
Pourtant, tout le monde sait : Yanick Bouchard n’a pas quitté le 98.5 FM par grandeur d’âme. Il a fui. Il a fui l’humiliation publique d’un congédiement annoncé.
Il a quitté parce que la direction allait l’éjecter. Et il tente maintenant de sauver sa dernière planche : son poste à temps plein à RDS.
Le message est clair, mais le fond sonne faux :
« À la suite des propos inacceptables transmis par erreur à Caroline Proulx, je tiens à réitérer mes excuses les plus sincères à toutes les personnes touchées. J’assume la pleine responsabilité de cet incident et j’accepte les conséquences qui en découlent actuellement.
De ce fait, j’ai décidé de quitter définitivement mes fonctions de chroniqueur sportif au 98.5. Je garderai un souvenir précieux de cette expérience et je remercie mes collègues pour leur confiance. Maintenant, je désire me concentrer exclusivement sur mon emploi à temps plein que j’espère retrouver en temps et lieu.
Je ne tenterai pas de justifier l’injustifiable. Je consacrerai désormais mes énergies à démontrer par mes gestes à quel point le respect, la courtoisie et l’empathie sont des valeurs importantes à mes yeux et que cette erreur ne reflète en rien la personne que je suis. »
C’est d’un ton larmoyant, mais terriblement hypocrite. Le message n’a pas été « transmis par erreur », comme il l’écrit.
Il faut rappeler que dans les premiers jours suivant le scandale, Bouchard avait affirmé qu’un collègue avait pris son téléphone pour envoyer le message à un ami commun.
Ce message? Une insulte d’une bassesse sans précédent : « Deux vulves aux funérailles », écrit sur la page Instagram de la ministre du Tourisme, Caroline Proulx, pendant qu’elle enterrait sa propre mère.
Ce que Bouchard a tenté de faire dès le départ, c’est de fuir la responsabilité. Il a menti. Il a essayé de détourner l’attention.
Aujourd’hui, il veut donner l’impression qu’il assume. Mais il assume seulement parce qu’il n’a plus le choix. Sa crédibilité est ruinée. Son image est irrémédiablement salie. Et son départ du 98.5 FM est une tentative de garder la face – et surtout de garder son emploi à RDS.
Et c’est bien là que c'est inacceptable. Bouchard écrit noir sur blanc qu’il veut maintenant « se concentrer exclusivement sur son emploi à temps plein ».
Il espère donc être réintégré à l’antenne du 5 à 7, sur les ondes de RDS. Et jusqu’ici, Bell Média n’a émis aucun communiqué. Pas de condamnation. Pas de suspension officielle. Pas de position publique. Rien. Un silence complice.
Pourtant, il s’agit d’un message d’une rare violence. Une ministre de l’État, en deuil de sa mère, est la cible d’un commentaire aussi ignoble, et RDS pense peut-être qu’il est acceptable de ramener cet homme en ondes, sous prétexte qu’il est dans le sport, pas dans les nouvelles?
Si tel est le raisonnement, alors c’est toute la structure éthique de Bell qui est à revoir.
Si Bouchard revient, malgré ce qu’il a dit, malgré les mensonges, malgré l’insulte faite à toutes les femmes du Québec, ce ne sera pas simplement une erreur. Ce sera un acte de mépris institutionnel.
Pendant ce temps, au 98.5 FM, la ligne était claire. Marc Pichette, directeur des communications, l’a dit lui-même : Cogeco a présenté des excuses à Caroline Proulx.
L’indignation a été immédiate. Les mots étaient fermes. Et maintenant, le geste suit : Bouchard quitte. Mais là aussi, ne soyons pas naïfs.
Ce n’est pas un départ volontaire. C’est une démission déguisée. Il a quitté parce qu’il savait ce qui s’en venait. Parce que tout le monde dans les couloirs savait que son congédiement était imminent.
Cette stratégie de dernière minute vise un seul objectif : préserver son poste à RDS. C’est d’ailleurs la seule chose qu’il mentionne avec espoir dans sa lettre.
Et c’est ce que le public doit refuser. Car si Bouchard revient à l’antenne, après avoir tenu des propos aussi méprisables, et après avoir tenté de mentir pour se couvrir, alors tout ce que Bell dira sur l’égalité, le respect et l’éthique ne vaudra plus rien.
La ministre Proulx, dans sa réponse publique, a précisé que ce sont les dirigeants de Cogeco qui se sont excusés. Pas Bouchard.
Pas RDS. Et elle n’a pas nommé son agresseur. Parce qu’il ne mérite même plus d’être nommé. Il est devenu invisible, rayé du paysage moral.
Pourtant, dans son message, Bouchard veut se faire passer pour un homme de cœur. Il parle d’empathie, de courtoisie, de respect. Mais où étaient ces valeurs le jour où il a écrit ce message immonde?
Où étaient ces principes quand il a tenté de faire porter le blâme à un collègue imaginaire? Où étaient ces qualités humaines pendant ces longues heures de silence, alors que le Québec était en état de choc?
Il ne faut pas se laisser berner par le ton de la lettre. Elle est rédigée pour les patrons. Pour les RH. Pour la direction de Bell. Elle n’est pas adressée au public. Elle n’est pas sincère. Elle est stratégique. Et le Québec n’est pas stupide.
Yanick Bouchard a perdu sa place au 98.5 FM. Il doit maintenant perdre celle qu’il occupe encore à RDS. À tout le moins être suspendu assez longtemps pour qu'il comprenne la gravité de ses gestes... et de son mensonge.
Toute autre issue serait une insulte à la ministre Proulx, mais aussi à toutes les femmes qui ont vu dans ce message une attaque personnelle, sournoise, et terriblement cruelle.
Il y a des erreurs qui ne peuvent pas être réparées avec des mots bien choisis. Il y a des gestes qui ne peuvent pas être effacés par un message Facebook. Et il y a des gens qui, après avoir franchi une ligne, ne méritent plus de micro. Yanick Bouchard est de ceux-là.
S’il revient un jour à l’antenne sans conséquences, ce ne sera pas une réhabilitation. Ce sera une honte. Et une claque à la dignité collective du Québec.