Quand les rumeurs s’envolent dans un club de hockey, elles ne restent pas au plafond : elles descendent dans les couloirs, dans les chambres, dans l’esprit des joueurs.
À Montréal, depuis que Jacob Fowler a illuminé le camp, les murmures se sont transformés en grondement. Et Samuel Montembeault, au cœur de la tempête, en ressent déjà les secousses.
Il sait tout. Il entend tout. Il lit tout. Il voit les gros titres, les podcasts, les réseaux: « Fowler est l’avenir », « Montembeault ne prolongera pas », « il va partir avant son contrat ».
Ces phrases ne sont plus des rumeurs : elles sont devenues des certitudes pour certains. Et dans un vestiaire ultra compétitif, elles creusent des fissures invisibles.
Ce soir, Montembeault s'est effondré devant nos yeux.
Le stress s’accumule, les regards changent. Quand un jeune entre après lui et réalise une performance étincelante, ce contraste brut met les projecteurs sur Montembeault d’une façon cruelle : hier le héros, aujourd’hui le spectateur de son propre effacement.
Les rumeurs n’ont pas seulement affecté Montembeault, elles ont contaminé tout le vestiaire. L’organisation d’une équipe se nourrit de confiance collective.
Quand l’un doute, d’autres le sentent. Quand on lit dans les yeux d’un coéquipier qu’il se demande « est-ce que je mise sur Fowler?”, le lien se fissure. Et c’est dans ces moments-là que les défensives lâchent, que les passes hésitent, que les joueurs s’effacent.
Ajouter à la pression mentale le facteur physique, c’est jeter de l’essence sur un incendie. Le match contre les Maple Leafs a été une véritable hécatombe : Guhle, Dobson et Reinbacher touchés à l’aine, tous trois évacués ou incapables de terminer.
Noah Dobson, que l’on voyait vaillant et pressant, a manqué de chien avant de s’écrouler. Guhle, fragile comme toujours, absent. Les deux sont blessés à l'aine.
Reinbacher, le jeune espoir mal-aimé, encore au sol, corps fragile comme une porcelaine dans une tempête. Ces blessures ne sont pas coïncidentes, elles tombent quand les rumeurs montent. Et dans l’air du vestiaire, on sent que les fondations bougent.
Quand tu combines un gardien déjà fragilisé par le doute avec des défenseurs fragiles, tu n’as plus une équipe, tu as une jambe de bois prête à se briser.
Martin St-Louis tente de rester rassurant : « ce n’est pas sérieux », « ce n’est pas alarmant », mais tout le monde sait que le camp est d’abord un laboratoire, et là, les drapeaux rouges sont immenses... et nombreux...
Fowler joue comme s’il n’avait pas à rendre de comptes. Tellement calme. Il est frais, concentré, sans cicatrices. Après chaque arrêt, pas de grognement, pas de plainte : il se remet en position, prêt pour le suivant. C’est cette constance, cette sérénité quand tout s’agite autour, qui fait mal à regarder.
Parce que Montembeault, lui, porte le fardeau du passé, de la loyauté, du « je suis ici parce que je l’ai mérité ». Toutes ces rumeurs sur lui semblent vouloir lui ôter ce mérite.
Quand Fowler fait des arrêts à la Carey Price, les rumeurs deviennent vraisemblables : « il est prêt pour Montréal », « le CH s’en débarrasse de Montembeault ».
Dans les tribunes, certains applaudissent Fowler. Dans les bars, on chuchote : « C’est lui maintenant ». Et dans le vestiaire, on lit l’inquiétude dans les yeux de Montembeault : il sait qu’il n’est plus intouchable.
La vérité, c’est que les rumeurs l’ont déjà précipité dans une blessure invisible : celle de l’ego égratigné, de la confiance brisée, du regard derrière lui.
Quand tu combines les doutes internes, les blessures défensives, la montée d’un espoir inarrêtable, et la pression media, tu n’as pas un camp harmonieux. Tu as une équipe en danger.
Pendant que Dobson et Guhle soignent leur aine, c’est Montembeault qui devra absorber la tempête. Et s’il est en doute mental, ou s’il sent l’ombre de Fowler grandir derrière lui… c’est l’effondrement assuré.
Parce qu’aujourd’hui, les rumeurs ne tuent plus le moral. Elles alimentent le feu. Et ce feu pourrait bien brûler celui qui a accepté un contrat à rabais pour demeurer à Montréal.
Encore deux ans à 3,15 M$ par année... pour lire à chaque jour que Montréal ne veut que Jacob Fowler.
Triste destin pour Sam.
Mais à un moment, il faut arrêter.
Arrêter avec la pitié. Arrêter avec les excuses. Arrêter de faire semblant que ce club est encore dans une phase de développement éternelle alors que nous sommes rendus à l'étape de gagner.
Jacob Fowler est prêt. Ce n’est pas une question d’années d’expérience, mais d’attitude, de mentalité, de lecture du jeu. Il dégage quelque chose qu’aucun autre gardien du CH n’a affiché depuis Carey Price à son sommet.
Et pendant que Montembeault se bat contre les rumeurs, les doutes et sa propre tête, Fowler avance, lui, sans se retourner.
Et pendant ce temps, les autres équipes sentent l’odeur du sang.
Les Flyers sont désespérés pour un gardien. Daniel Brière ne peut pas se permettre une autre année avec une passoire devant les buts, que ce soit Samuel Ersson ou Dan Vladar.
Les Oilers ont toujours une fenêtre de Coupe ouverte… mais aucun gardien fiable. Les Hurricanes veulent oublier l’échec Carter Hart qui s'enligne pour signer avec Vegas. Le Mammoth de l'Utah veut faire un splash et viser les séries.
Tout le monde regarde Montréal. Parce qu’il y aura une transaction. Peut-être demain. Peut-être à Noël. Peut-être l’été prochain. Mais elle va venir. Et le CH va faire sauter la banque avec la bonne équipe. Que ce soit Montembeault, Dobes, le Canadien est assis sur une mine d’or devant le filet en vue du marché des transactions.
Et c’est là où ça devient jouissif.
Montréal regarde les Flyers pleurer. Montréal regarde l’Ouest supplier. Montréal domine le marché des gardiens.
Et dans les coulisses du Centre Bell, on sent une énergie nouvelle. Fini la pitié. Fini les compromis. Fini les choix molassons.
L’ère Jacob Fowler vient de commencer.
Et si les autres clubs veulent un morceau du filet du CH, qu’ils paient le prix.