Drame humain à New York: Jonathan Drouin veut sauver Anthony Duclair

Drame humain à New York: Jonathan Drouin veut sauver Anthony Duclair

Par David Garel le 2025-07-04

Il y a des ambiances lourdes,  et il y a du drame humain à la pelletée chez les Islanders de New York.

Un véritable téléroman. Du pur "soap opera". Si Long Island était un plateau de tournage, Patrick Roy incarnerait le personnage principal instable : génial, intense, mais imprévisible.

Il pète les plombs. Il s'excuse. Il crie. Il pleure presque. Et cette fois, c'est Anthony Duclair qui est au cœur de la tourmente.

Rappelons les faits. Le 1er avril dernier, après une défaite humiliante de 4-1 contre le Lightning de Tampa Bay, Roy a carrément détruit Duclair en conférence de presse.

« Il était vraiment mauvais, vraiment mauvais. Il était chanceux d’être dans la formation. Désolé si je m’emporte… mais c’est comme ça que je me sens.» avait-il dit.

« Il ne patine pas. Il ne compétitionne pas. Il ne bouge pas ses pieds. Il ne joue pas comme on s’attend à ce qu’il le fasse… Je pense que c’est une question d’effort.»

Une claque publique. Depuis, Duclair s'était éloigné de l'équipe. Officiellement pour des raisons personnelles. Mais tout le monde savait que la cassure était profonde.

Jeudi dernier, Roy a publiquement reconnu son erreur :

"Je vais le rencontrer à Montréal ou peu importe où il sera, et on aura une bonne conversation. Mais pas au téléphone. Je veux le rencontrer en personne, yeux dans les yeux. Je vais assurément m'excuser pour mes commentaires.

Je veux qu'il sache, parce qu'il a joué pour moi chez les juniors, à quel point je l'aime et que j'ai du respect pour lui."

L'image est poignante, certes, mais désormais, le doute plane. Comment croire en une réconciliation authentique quand Roy s'est muré dans le silence après avoir humilié son joueur publiquement?

Pourquoi avoir attendu aussi longtemps pour se racheter? Le pire, c'est qu'il n'avait jamais offert pareille réflexion pour Noah Dobson.

Ce dernier, lui aussi victime des "humeurs royennes", n'a jamais reçu d'excuses. On comprend donc que Roy s'excuse quand ça l'arrange. Quand il y a des tensions à gérer. Pas quand il est question de reconnaissance ou de principes.

Et pendant ce temps, on dirait que Mathieu Darche, le directeur général, tente de bricoler un plan à saveur locale : former un duo 100 % québécois sur une ligne avec Duclair et Jonathan Drouin.

Oui, ce même Drouin qui était son coéquipier chez les Lions du Lac Saint-Louis. Un geste qui sent la nostalgie. Ou pire : la panique.

Parce qu'objectivement, Drouin et Duclair sont deux joueurs au profil semblable. Talentueux, certes. Mais délicats. Physiquement et mentalement.

Ce sont des joueurs qui ont besoin d'un encadrement serré, d'un environnement sain et d'une confiance renouvelée chaque soir. Dans une ville comme Long Island, sous un entraîneur comme Roy, est-ce réellement possible?

Les statistiques de Duclair parlent d'elles-mêmes : 11 points en 44 matchs. Pour un attaquant de 3,5 millions de dollars par saison, c'est insuffisant.

Et pour un joueur censé se relancer auprès d'un entraîneur qu'il connaît bien, c'est un échec cuisant. Le fait qu'il ait dû s'éloigner de l'équipe pour des raisons mentales en dit long sur le climat interne.

Et voilà qu'on ajoute Drouin dans le portrait pour sauver Duclair. Deux saisons à rebondissements au Colorado, un joueur fragile, mais aimé. Capable du meilleur comme du pire.

On essaie de reproduire la magie du passé. Mais la LNH n'est pas un album souvenir. Ce n'est pas parce qu'ils ont dominé le midget AAA ensemble qu'ils vont devenir un tandem efficace aujourd'hui. La ligue est rapide, brutale, exigeante. Les sentiments n'ont pas leur place sur la feuille de match.

Ce qui ajoute encore à l'étrangeté du scénario, c'est la signature de Maxim Shabanov. Petit gabarit, joueur électrisant, mais typique du modèle "européen technique". Encore un joueur qui devra s'imposer dans un vestiaire fébrile, instable, et qui pourrait à tout moment basculer dans la crise.

C'est à se demander si Roy et Darche ne sont pas en train de transformer les Islanders en une expérience sociale.

Entre la rédemption de Drouin, le burn-out de Duclair, le conflit entre Dobson et Roy qui a mené à la transaction à Montréal et les excuses mélancoliques de Patrick Roy, on est loin de l'idéal d'une équipe de séries.

L'ironie, c'est que Roy parle souvent de responsabilité, de culture, de caractère. Mais en refusant d'affronter ses erreurs passées avec la même franchise que pour Duclair, il brise lui-même le message qu'il tente de transmettre. Il crée deux poids, deux mesures. Il cultive une forme d'inégalité entre ses joueurs.

En bout de ligne, la question est simple : est-ce que Long Island est devenue la maison des causes perdues? Ou s'agit-il plutôt d'une tentative sincère de reconstruire des carrières brisées?

Peut-être un peu des deux. Mais dans un marché où les attentes sont grandes, la patience est mince. Et la mémoire, très vive.

Un club de la LNH ne peut pas survivre sur des excuses et des vieux souvenirs. Il faut des résultats. Et pour le moment, tout ce que les Islanders offrent, c'est du drame. Encore du drame. Rien que du drame... humain...

Selon des sources proches du vestiaire des Islanders, Roy reprochait depuis plusieurs semaines à Duclair de ne pas démontrer le niveau d’engagement souhaité, surtout dans les replis défensifs.

Mais c’est moins le jeu de Duclair que sa personnalité qui semblait irriter l’entraîneur. Roy aurait eu de vives discussions avec son attaquant vedette sur ses habitudes hors-glace, son apparence nonchalante dans les médias, et sa tendance à s’isoler du groupe dans certaines séquences.

Il faut comprendre qu’Anthony Duclair, depuis toujours, est un joueur émotif, qui performe lorsqu’il se sent apprécié.

Dès que cette confiance est rompue, son jeu en souffre. Et Roy, fidèle à son style, n’a pas la patience pour gérer ce type de profil.

Il a même confié à certains journalistes « off record » que Duclair vivait « dans sa bulle » et qu’il n’était pas « branché sur l’équipe ».

La fracture a été rendue publique après ce fameux match contre le Lightning de Tampa Bay. Mais selon ce qu’on entend de l’entourage de Duclair, la tension couvait déjà depuis au moins un mois.

Roy l’avait souvent rétrogradé dans la formation, lui avait enlevé des minutes en avantage numérique, et avait cessé toute forme de communication directe à l’interne.

Le plus inquiétant dans cette histoire, c’est qu’aucun vétéran n’est intervenu pour défendre Roy. Aucun joueur ne s’est présenté devant les micros pour amortir l’impact des propos de leur entraîneur.

C’est dire à quel point la dynamique interne était devenue toxique. Un proche du club a même affirmé :

« Les gars ne comprenaient pas pourquoi il s’acharnait sur Duclair. C’était devenu personnel, ça se voyait. »

Et cette fois, Roy ne pourra pas se cacher derrière son image de gagnant ou sa réputation à Québec. Car à Long Island, les observateurs sont plus froids, plus pragmatiques.

Ce qu’ils voient, c’est un entraîneur qui multiplie les explosions de colère, les décisions impulsives, et maintenant, les excuses embarrassées. Et ce qu’ils comprennent, c’est qu’il s’agit d’un entraîneur en perte de contrôle.

Ce que Patrick Roy ne semble pas comprendre, c’est qu’à force de s’excuser, on finit par perdre ce qui fait notre autorité.

Roy, qui a bâti sa réputation sur la fermeté, la passion et l’instinct, donne désormais l’image d’un entraîneur en panique, prisonnier de ses excès passés. Un coach qui vacille, qui tempère, qui rétro-pédale.

Et dans le monde impitoyable de la LNH, surtout à New York, un entraîneur qui s’excuse publiquement est un entraîneur qui sent le tapis lui glisser sous les pieds.

Roy ne fait plus peur. Il tente de réparer, au lieu d’imposer. Et dans une ligue qui ne pardonne ni les résultats insuffisants ni les tensions dans le vestiaire, cela revient souvent à signer soi-même la fin de son règne.

À lui de relever la tête.