Départ de Gary Bettman: l'heure est arrivée

Départ de Gary Bettman: l'heure est arrivée

Par David Garel le 2025-07-19

Il y a des moments charnières dans l’histoire d’une ligue professionnelle. Des instants où le statu quo devient une inacceptable, où l’aveuglement d’un dirigeant menace la crédibilité de toute une organisation. Dans la LNH, ce moment est arrivé. Et son nom est Gary Bettman.

Après plus de 30 ans à la tête du circuit, Bettman ne dirige plus : il bloque. Il refuse la modernisation, il s’accroche.

Et plus grave encore, il permet, consciemment, à certaines équipes de tricher ouvertement, tout en refusant d’implanter les changements structurels que réclame l’ensemble du monde du hockey.

Entre l’affaire des Panthers de la Floride, qui ont profité d’une évasion fiscale légalisée pour bâtir une équipe surpuissante, et son refus obstiné d’instaurer un tournoi de qualification comme celui de la NBA, Bettman prouve qu’il est devenu l’homme du passé dans une ligue qui veut aller de l’avant.

Commençons par le scandale des Panthers. LA Floride a célébré sa deuxième Coupe Stanley en deux ans. Une domination impressionnante… mais profondément entachée.

Selon les données de PuckPedia, la formation alignée par les Panthers lors du match ultime de la finale avait une masse salariale de 93 millions de dollars.

La limite imposée par la LNH pour la saison 2024-2025 était de 88 millions. Cinq millions de plus. Et ce n’est pas une rumeur : c’est un fait vérifié, documenté, chiffré.

Face à eux, les Oilers d’Edmonton présentaient une masse de 80,6 millions. Treize millions d’écart entre les deux équipes. Et on ose parler de « parité »?

Ce stratagème, bien connu depuis que le Lightning de Tampa Bay l’a utilisé en 2021 avec Nikita Kucherov, repose sur la liste des blessés à long terme (LTIR).

Une équipe place un joueur vedette sur cette liste toute la saison… puis le « ressuscite » pour les séries, alors que le plafond salarial n’est plus en vigueur. Ce tour de passe-passe permet de contourner les règles, avec la bénédiction tacite de la ligue.

Après des années de critiques et une pression médiatique intense, la LNH a finalement annoncé une réforme de cette faille.

Dès 2025-2026, les formations utilisées en séries devront respecter un encadrement strict, et des contrôles sur les salaires alignés seront instaurés.

Mais pourquoi avoir attendu que les Panthers trichent pour gagner deux fois avant d’agir?

Parce que Gary Bettman ne veut jamais reconnaître qu’il s’est trompé. Son orgueil démesuré le pousse à minimiser les injustices, à ignorer les signaux d’alarme, à protéger ses clubs fétiches des États sans impôt.

Et surtout, il refuse catégoriquement de s’attaquer au véritable scandale structurel de la LNH : l’évasion fiscale permise par les États comme la Floride, le Texas et le Nevada.

Une insulte aux équipes canadiennes...

Le nœud du problème, c’est que les équipes situées dans des États sans impôt sur le revenu personnel (Floride, Texas, Nevada, Tennessee, Washington, etc..) bénéficient d’un avantage illégal… mais toléré.

Un contrat de 10 millions de dollars à Sunrise vaut nettement plus qu’un contrat du même montant à Montréal, Toronto ou Vancouver, où les taxes fédérales et provinciales dépassent les 50 %.

Et pourtant, la LNH continue de faire comme si tout était égal. Comme si un dollar en Floride valait un dollar en Ontario.

Pire : quand interrogé à ce sujet, Gary Bettman a carrément ridiculisé la question. Voici ce qu’il a osé dire sur TNT en juin 2025 :

« Quand les équipes de la Floride étaient mauvaises pendant 17 ans, personne ne s’en plaignait. Les joueurs veulent aller là où ils se sentent bien, où ils aiment vivre. Ce n’est pas une question d’impôts. »

Faux. Tellement faux. La preuve : en analysant les contrats signés depuis cinq ans, la Floride a structuré plus de 80 % des salaires de ses vedettes en bonis à la signature, versés d’avance et non imposés localement. Ils ont payé 420 M$ en bonis. C’est de l’optimisation fiscale à grande échelle. C’est légal… mais c’est déloyal.

Et pendant ce temps, Kent Hughes à Montréal, Brad Treliving à Toronto et Kevin Cheveldayoff à Winnipeg, Patrick Allvin à Vancouver et Steve Staios à Ottawa doivent se battre avec des taux d’imposition asphyxiants et sans aucun levier pour compenser.

Résultat : les équipes canadiennes reculent. Leurs joueurs partent. Et Bettman hausse les épaules.

Le refus obstiné de réformer le format des séries est la dernière ne preuve qu’il doit partir

Son refus de moderniser les séries éliminatoires est ridicule. Alors que la NBA a montré la voie avec son tournoi de qualification (« play-in »), la LNH reste coincée dans un format rigide, injuste et dépassé.

Le journaliste Chris Johnston (The Athletic) l’a confirmé : la seule chose qui empêche l’instauration d’un tournoi play-in dans la LNH, c’est Bettman lui-même.

Pourquoi? Parce qu’il est persuadé que « les séries de la Coupe Stanley sont déjà le meilleur produit dans le sport professionnel ».

Comme si ajouter un tournoi excitant de qualification allait tout gâcher. Comme si générer plus de revenus, plus de suspense et plus de spectacle était une menace plutôt qu’une opportunité.

Et pourtant, les propriétaires veulent le changement. Les partisans aussi. Le tournoi play-in créerait une course plus animée en fin de saison. Il donnerait une chance aux équipes #9 et #10 de rêver. Il ferait monter les cotes d’écoute. Il serait une mine d’or.

Les équipes classées 7e à 10e dans chaque association s’affronteraient dans des matchs à élimination directe pour décrocher les deux dernières places donnant accès aux séries éliminatoires.

Le 7e affronterait le 10e, le 8e affronterait le 9e, et les deux vainqueurs obtiendraient leur billet pour les vraies séries. Un seul match, tout ou rien. Imaginez la tension, l’intensité, la folie d’un tel affrontement en direct.

Ce serait un rêve pour les partisans, une mine d’or pour les réseaux de télé, et une façon spectaculaire de garder l’intérêt jusqu’à la toute fin du calendrier régulier.

Mais Bettman s’y oppose. Encore. Toujours.

Parce qu’il est déconnecté. Parce qu’il croit encore diriger la ligue de 1994. Parce qu’il se croit plus brillant que tous les autres.

Gary Bettman est devenu commissaire de la LNH en 1993. Depuis, le monde du sport a changé mille fois. La NBA a explosé. La NFL a modernisé ses règles. Même la MLB, autrefois archaïque, a réformé ses formats, ses durées de match, ses règlements.

Et la LNH? Elle traîne les pieds. Elle protège des équipes de marchés faibles au détriment des grandes franchises canadiennes. Elle refuse d’attaquer les injustices fiscales. Elle tolère les tricheries, puis agit trop tard. Et elle dit non à toutes les idées qui viennent d’ailleurs.

Il y a eu de bons coups sous Bettman, c’est vrai. L’expansion réussie à Vegas. La stabilité du plafond. La croissance des revenus. Mais aujourd’hui, ces bons coups sont noyés dans un océan de décisions erronées et d’entêtement chronique.

Bettman doit partir... et vite...

Si la LNH veut redevenir compétitive. Si elle veut retrouver l’équité. Si elle veut reconnecter avec ses fans. Si elle veut être autre chose qu’un spectacle biaisé au service de la Floride, du Texas et du Nevada… alors le départ de Gary Bettman est la condition numéro un.

Il a trahi les principes fondamentaux de la ligue : la parité, l’équité, la transparence.

Il a ridiculisé ceux qui dénoncent les injustices fiscales.

Il a toléré les tricheries des Panthers.

Il a bloqué une réforme pourtant réclamée par tous.

Et il continue, année après année, à faire la sourde oreille, trop orgueilleux pour admettre qu’il est dépassé.

Assez, c’est assez. Gary Bettman doit démissionner. Pour le bien du hockey. Pour le bien des partisans. Pour le bien de la LNH.