Si le rêve d’un retour des Nordiques vient d’être définitivement anéanti, l’avenir s’assombrit aussi pour certaines équipes déjà établies dans des petits marchés.
Winnipeg, Calgary et Ottawa, trois franchises canadiennes qui ont déjà connu des périodes d’incertitude, pourraient elles aussi être en danger à long terme.
La LNH est devenue une ligue dominée par les grandes métropoles américaines, où les profits dictent la prise de décisions.
Or, les équipes canadiennes, qui doivent jongler avec un dollar fluctuant, des taxes élevées et une base de commandites limitée par rapport aux franchises américaines, sont déjà en position de faiblesse.
Les Jets de Winnipeg sont revenus en 2011 après que l’ancienne franchise des Thrashers d’Atlanta ait été relocalisée.
Mais depuis leur retour, ils fonctionnent avec des revenus plus limités et un marché qui plafonne en termes de croissance.
Winnipeg reste la plus petite ville de la LNH et, malgré une base de partisans fidèles, le marché des affaires n’est pas suffisant pour rivaliser avec les grands marchés américains.
Le propriétaire Mark Chipman l’a reconnu à plusieurs reprises : le modèle économique des Jets repose sur des bases fragiles.
En cas de nouvelles difficultés financières ou d’une conjoncture défavorable, la relocalisation pourrait redevenir un sujet d’actualité.
Après tout, ce n’est pas la première fois que la LNH quitte Winnipeg.
Les Flames de Calgary, de leur côté, sont en plein projet de construction d’un nouvel aréna.
Mais le financement de cette infrastructure a fait l’objet de plusieurs débats et reste une source de tensions.
Si les coûts continuent d’exploser, et si les conditions économiques ne permettent pas aux Flames de maintenir un modèle rentable, le danger d’une instabilité à long terme ne peut être ignoré.
La ville de Calgary elle-même a dû intervenir financièrement pour soutenir le projet, ce qui montre bien à quel point les franchises canadiennes peinent à rivaliser avec les marchés américains bénéficiant d’exemptions fiscales et d’un environnement économique plus favorable.
Quant aux Sénateurs d’Ottawa, ils sont toujours dans l’attente d’un nouveau domicile.
Le projet d’un aréna au centre-ville, aux plaines LeBreton, est essentiel à la survie de la franchise à Ottawa.
Michael Andlauer, le propriétaire, a été clair : l’équipe ne peut pas survivre à long terme en restant à Kanata, un secteur trop éloigné du centre névralgique de la ville.
Si ce projet venait à échouer, la survie des Sénateurs pourrait être remise en question.
Et même si la LNH ne veut pas perdre une équipe dans la capitale du Canada, le scénario d’une relocalisation n’est jamais à exclure dans un monde où l’argent dicte les décisions.
Allain Roy, un agent influent du hockey professionnel, tire la sonnette d'alarme :
« Les équipes canadiennes font déjà face à de nombreux obstacles économiques, et maintenant, les nouvelles mesures protectionnistes des États-Unis risquent de les enfoncer encore plus. »
Allan Walsh partage la même inquiétude et rappelle que l'économie du hockey repose sur un équilibre fragile :
« Si des tarifs commerciaux rendent les transactions plus coûteuses et que le dollar canadien continue de chuter, les franchises canadiennes seront forcées de dépenser encore plus pour rester compétitives.
Ce n'est pas viable à long terme. »
Roy souligne aussi une inégalité grandissante dans la Ligue :
« Les équipes américaines situées dans des États avec des avantages fiscaux considérables, comme la Floride et le Nevada, deviennent beaucoup plus attractives.
Un joueur signant un contrat de 7 millions à Tampa peut toucher un salaire net beaucoup plus élevé qu'en Californie ou au Canada, où les taxes sont écrasantes. »
Il faudrait alors offrir 10 millions en Californie pour le même salaire dans les poches du joueur.
Le constat est sans appel : la LNH se transforme en une ligue où seuls les marchés les plus rentables peuvent prospérer.
Si les équipes canadiennes les plus riches comme Toronto et Montréal peuvent survivre à ces turbulences économiques, celles des petits marchés, elles, vivent sous une pression constante.
Le rêve d’un retour des Nordiques est mort, mais c’est peut-être aussi le début d’une nouvelle ère où certaines équipes déjà en place pourraient disparaître ou être forcées de se relocaliser.
La LNH ne regarde plus vers le Nord, elle regarde vers le Sud, et ceux qui ne peuvent pas suivre la cadence risquent d’être laissés derrière.
L'augmentation imminente du plafond salarial pourrait bien être le dernier clou dans le cercueil des équipes canadiennes et des petits marchés de la LNH.
Pendant des années, la ligue s’est targuée d’un modèle favorisant la parité, où toutes les équipes avaient une chance raisonnable de compétitionner grâce à des règles strictes sur le partage des revenus et un plafond salarial encadré.
Mais cette ère touche peut-être à sa fin.
Avec la hausse prévue du plafond, les équipes des grands marchés, bénéficiant d’une économie florissante et d’énormes revenus télévisés, pourront se permettre d’attirer encore plus de superstars.
À l’inverse, les franchises des petits marchés comme Winnipeg, Ottawa et même Calgary risquent de se retrouver écrasées sous le poids des nouvelles réalités financières.
Allain Roy l’a d’ailleurs mentionné : les franchises canadiennes sont déjà pénalisées par le taux de change et des conditions fiscales défavorables.
Si on ajoute à cela une explosion du plafond salarial, elles auront de plus en plus de mal à retenir leurs meilleurs joueurs face à des équipes comme Toronto, les Rangers de New York ou encore les Kings de Los Angeles, qui ont des moyens bien supérieurs.
Le danger est clair : la LNH pourrait progressivement se transformer en une ligue semblable à la MLB, où les équipes les plus riches règnent sans partage tandis que les plus pauvres peinent à rester compétitives.
La parité, qui faisait jadis la force de la LNH, pourrait disparaître, laissant place à une domination des grandes métropoles américaines.
Si la relocalisation des petits marchés n’est pas immédiate, l’éffondrement progressif de leur compétitivité risque de les pousser vers une issue inévitable.
La LNH ne regarde plus vers l’équilibre et l’accessibilité pour tous les marchés : elle regarde vers la maximisation des profits.
Et dans cette nouvelle ère, les franchises qui ne peuvent pas suivre risquent de disparaître, laissant derrière elles des villes et des partisans sans équipe pour représenter leur passion.
Triste réalité.