Crise dans un taxi: Pierre-Karl Péladeau refuse de payer

Crise dans un taxi: Pierre-Karl Péladeau refuse de payer

Par David Garel le 2025-04-13

C’est un signe clair, un aveu criant de la déchéance silencieuse qui frappe Québecor. 

Selon nos informations, les journalistes du Journal de Montréal ne se font plus rembourser leurs déplacements en Uber ou en taxi. 

Même lorsqu’ils se déplacent pour des assignations professionnelles, même lorsqu’ils travaillent sur le terrain pour faire rayonner l’entreprise. 

Les allocations de transport ont été abolies. Point final. Et si cette décision frappe le Journal de Montréal, elle touche forcément les autres entités de TVA, notamment TVA Sports, qui fait partie du même navire qui prend l’eau de toute part.

Voilà la preuve concrète que Québecor est dans le trouble profond. Une entreprise qui refuse de rembourser un journaliste pour une course de 18 $ en Uber, mais qui dans le même souffle accorde 18,5 millions de dollars de prime à Pierre-Karl Péladeau, son grand patron, pour son « travail exceptionnel », c’est le comble de l’indécence.

C’est une gifle en pleine figure pour tous les employés qui se font demander de faire « plus avec moins », pendant que le sommet de la pyramide s’enrichit de façon obscène.

Ce scandale, qui concerne des montants ridicules à l’échelle d’une telle entreprise médiatique – des Ubers et des taxis  – expose la nature sans pitié et brutale de la gestion actuelle de Québecor : couper à la base, préserver le sommet. 

Dans les coulisses du Journal de Montréal, la colère gronde. Et elle ne se limite plus à des soupirs discrets ou à des conversations murmurées entre collègues. 

De plus en plus d’employés expriment ouvertement leur frustration, écoeurés de devoir payer de leur poche des déplacements professionnels, alors qu’ils assistent impuissants au festin de luxe que s’offre la famille Péladeau.

Cette injustice insupportable – entre les pauvres emplotés et une élite qui nage dans l’opulence – est en train de déchirer la culture interne du groupe Québecor.

« On nous dit que l’entreprise n’a plus d’argent, mais tout ce qu’on voit, ce sont des millions qui se ramassent dans les poches de la même famille. » 

Cette phrase, répétée à travers les salles de rédaction, résume l’état d’esprit d’un grand nombre de journalistes et d’employés. 

Pierre-Karl Péladeau et ses proches – Jean B. Péladeau, Érik Péladeau – incarnent à leurs yeux une aristocratie médiatique totalement déconnectée. Avec plus de 7,7 millions $ versés à la famille en 2023, et 20,4 millions $ pour PKP en 2024, la coupe est pleine.

Mais ce qui choque peut-être encore plus que ces montants, c’est le traitement de faveur constant envers TVA Sports, la chaîne que tout le monde dans le groupe sait être un gouffre financier, avec près de 300 millions de dollars de pertes accumulées depuis sa création.

Au lieu de freiner l’hémorragie, Québecor continue de siphonner des fonds pour entretenir un train de vie luxueux pour ses journalistes sportifs vedettes.

Prenons quelques exemples concrets qui font bondir les employés du Journal de Montréal :

Renaud Lavoie est régulièrement logé dans des hôtels cinq étoiles, à moins de 500 mètres des arénas, que ce soit à Toronto, Ottawa, New York ou Boston. Pas question de prendre un taxi ou de marcher quelques coins de rue.

Anthony Martineau, lui aussi, profite de chambres dans des établissements de prestige, souvent dans des hôtels où le prix de la nuit dépasse les 600 $, même lorsqu’il s’agit de couvrir des événements mineurs.

Pendant ce temps, des journalistes de La Presse, eux, doivent loger dans des motels à 30 minutes du centre-ville, par mesure d’économie. Et ceux du Journal de Montréal doivent payer leur Uber pour aller travailler.

À Québecor, la règle est claire : on coupe à TVA, au Journal de Montréal, chez les techniciens, chez les assistants de production, mais on roule le tapis rouge à TVA Sports – chaîne déficitaire, marginalisée par les audiences, bientôt privée de la LNH… mais encore traitée comme la vitrine dorée du groupe.

Cette situation n’est plus tenable. Les employés du Journal de Montréal se sentent trahis. Eux qui travaillent sans relâche pour alimenter l’un des journaux les plus lus de la province sont traités comme des figurants de bas étage, pendant que TVA Sports, dont les cotes d’écoute sont en chute libre, continue d’être gâtée comme une chaîne vedette.

Pour eux, la vraie question n’est plus “quand va-t-on couper davantage ?”, mais bien “quand va-t-on enfin couper au bon endroit ?” 

Tant que la famille Péladeau continuera de s’auto-récompenser avec des primes à huit chiffres, et que TVA Sports pourra s’offrir le Ritz pendant que le reste du groupe vit dans l’austérité, la révolte interne ne fera que grandir.

Il n’y a pas de meilleur symbole du naufrage en cours. Alors que le soleil tremble sur l’avenir du Journal de Montréal, que TVA Sports s’enfonce inévitablement vers la fin, que les employés broient du noir, la direction impose l’humiliation du quotidien : payer soi-même pour aller travailler.

Pendant ce temps, la haute direction continue de rouler sur l’or, littéralement.

Dans les couloirs de Québecor, c’est la commotion. Personne ne comprend comment on en est arrivé là. Personne n’accepte que des journalistes dévoués, envoyés sur le terrain pour couvrir des événements d’intérêt public, doivent désormais avancer les frais de leurs déplacements, parfois sans garantie de remboursement. 

Personne ne comprend non plus comment une entreprise qui coupe sur tout peut encore loger ses chroniqueurs sportifs dans des hôtels cinq étoiles, à deux coins de rue des arénas, pendant que les autres doivent prendre le métro et marcher 30 minutes, parfois sous la pluie, pour sauver quelques dollars.

Cette gestion incohérente, presque sadique, est en train de briser la crédibilité et la légitimité de Québecor de l’intérieur. 

Ce n’est plus un débat idéologique ou politique : c’est une crise morale, une faillite de vision, une tempête de mépris. Et à ce rythme, ce sont les fondations du plus grand empire médiatique francophone du pays qui risquent de s’effondrer.