C’est une idée folle.
Audacieuse. Inconcevable pour certains. Mais dans un contexte où le Canadien de Montréal voit la fenêtre s’ouvrir plus rapidement que prévu, et où la direction sent que le momentum est là, il n’est plus interdit d’imaginer Kent Hughes poser un geste aussi spectaculaire que celui de tout sacrifier pour repêcher Matthew Schaefer.
Le directeur général des Sharks de San Jose, Mike Grier, ne l’a pas nié : il est prêt à écouter les offres pour le premier choix au total si les enchères deviennent sérieuses.
Pas pour des peanuts. Pas pour un espoir incertain ou un simple choix tardif. Mais pour un package de type Herschel Walker ou Ricky Williams, deux des transactions les plus légendaires (et déséquilibrées) de l’histoire du sport professionnel.
« Je ne fermerai pas la porte si on me fait une très bonne offre incluant plusieurs choix au repêchage, ou de jeunes joueurs établis. J’ai dit non à tout l’an dernier. Cette année, c’est différent », a lancé Grier, faisant comprendre à la planète hockey que tout est possible.
Dans l’histoire du sport professionnel nord-américain, peu de transactions ont autant marqué l’imaginaire que celles de Herschel Walker et Ricky Williams, toutes deux survenues dans la NFL.
En 1989, les Cowboys de Dallas ont échangé Walker, leur joueur vedette, aux Vikings du Minnesota contre un package monumental : trois choix de premier tour, trois choix de deuxième tour, un choix de troisième tour, et plusieurs joueurs, pour un total de 18 éléments impliqués.
Cet échange a permis à Dallas de bâtir sa dynastie des années 1990, remportant trois Super Bowls. Dix ans plus tard, en 1999, les Saints de La Nouvelle-Orléans ont offert tous leurs choix au repêchage (sauf un déjà échangé) aux Redskins de Washington pour obtenir le cinquième choix et repêcher le porteur de ballon Ricky Williams.
Résultat : un échange catastrophe pour les Saints, et un avertissement historique sur les dangers de tout miser sur un seul joueur.
Ce sont ces deux transactions mythiques qui inspirent aujourd’hui les références utilisées par Mike Grier pour décrire le type d’offre qu’il accepterait pour échanger le premier choix au total du repêchage 2025.
Et à Montréal, un homme écoute attentivement : Kent Hughes.
Hughes n’arrive pas les mains vides. Le Canadien possède deux choix de première ronde en 2025 (16e et 17e), deux choix de deuxième ronde (41e et 49e), trois choix de troisième ronde, deux choix de quatrième, ainsi qu’un choix dans chacun des cinquième, sixième et septième tours.
En tout, 12 choix au repêchage. Un coffre de munitions capable d’alimenter la reconstruction de n’importe quelle franchise.
Si le DG du CH veut impressionner Mike Grier, il peut littéralement lui déposer tout son repêchage sur la table. Une stratégie extrême? Oui. Mais pas farfelue si elle permet d’obtenir Matthew Schaefer, décrit comme le meilleur défenseur gaucher de sa génération, une fusion de vitesse, de QI hockey et d’impact physique.
Avant sa blessure, il dominait dans les rangs juniors avec 22 points en 17 matchs à seulement 17 ans. C’est un futur "stud". Un gars qui changerait le visage de la défensive du Canadien pendant 10 à 15 ans.
Et Hughes n’aurait pas à sacrifier ses meilleurs joueurs. Pas de Suzuki. Pas de Caufield. Pas de Slafkovsky. Pas de Demidov. Seulement des choix.
Même Mathias Brunet, journaliste respecté de La Presse, n’a pas hésité à jeter de l’huile sur le feu en évoquant une hypothèse aussi audacieuse que révélatrice : offrir tous les choix du Canadien au repêchage 2025 pour mettre la main sur Matthew Schaefer, si les Sharks de San Jose remportent la loterie.
On parle ici du 16e et du 17e choix au total, des deux choix de deuxième tour (41e et 49e), des trois choix de troisième tour, de deux choix de quatrième tour, et d’un choix dans chacun des cinquième, sixième et septième tours.
Quand un média comme La Presse avance une idée aussi extrême, c’est qu’elle ne vient pas de nulle part. Et dans ce milieu, on le sait, il n’y a jamais de fumée sans feu.
Il ne faut pas oublier aussi que toute cette équation, le nom de Mailloux revient constamment.
Le Canadien a déjà tenté de l’échanger à Anaheim en 2024 dans un scénario où Trevor Zegras devait être acquis.
La transaction a avorté lorsque Ivan Demidov est tombé entre les mains de Montréal au 5e rang, et que Hughes a voulu garder son 21e choix pour repêcher Michael Hage. Mais Mailloux était déjà sur le bloc. Il l’est encore. Et plus que jamais.
À Laval, Mailloux vit une saison de tourmente. Rétrogradé de la première vague du jeu de puissance à plusieurs reprises, il ne reçoit plus les signaux positifs d’une organisation qui croyait encore en lui il y a un an.
Ses performances sont inconstantes. Son jeu défensif demeure problématique. Et ses ennuis hors glace — garde de sécurité personnel, nightlife, retards aux entraînements — ont définitivement ébranlé sa réputation.
Pascal Vincent, entraîneur-chef du Rocket, l’a d’ailleurs dit clairement à Mario Langlois :
« Il a été repêché comme défenseur, pas comme attaquant. Il doit apprendre à jouer sans la rondelle. »
Une déclaration cinglante, qui en dit long sur la patience qui s’effrite à l’interne.
Selon les recruteurs du CH, Logan Mailloux, ce n’est pas un joueur de la LNH. C’est un Jared Tinordi. Il va se promener d’une équipe à l’autre. Anaheim, Columbus, San Jose… mais à Montréal?
Le silence assourdissant de Kent Hughes sur Mailloux dans ses plus récentes entrevues, traduisent une vérité désormais évidente : Mailloux ne fait plus partie des plans à long terme.
Si les Sharks obtiennent le premier choix au total à la loterie, tout devient possible.
Un montage incluant les choix 16e et 17e, le défenseur Logan Mailloux, et au moins un autre choix de 2e ou 3e ronde, pourrait sérieusement attirer l’attention de Mike Grier.
D’autant plus que San Jose a déjà Will Smith, Macklin Celebrini, William Eklund, Quentin Musty, Igor Chernyshov à l’attaque, ainsi que Shakir Mukhamadullin et Luca Cagnoni à la ligne bleue. Ajouter Mailloux à leur flanc droit ne serait pas illogique.
De son côté, Kent Hughes obtiendrait enfin le défenseur gaucher d’élite qui permettrait à terme de tourner la page sur Mike Matheson, et de créer un duo gauche-droite avec Lane Hutson, David Reinbacher et Kaiden Guhle. Ce serait l’aboutissement d’un chantier défensif ambitieux lancé il y a trois ans.
Et ce serait surtout le coup d’éclat du repêchage 2025, un mouvement digne des plus grandes manœuvres de l’histoire du CH.
On a longtemps reproché à Kent Hughes d’être trop prudent. Trop scolaire. Trop dans le long terme.
Mais aujourd’hui, l’heure est peut-être venue pour lui d’appuyer sur l’accélérateur. De miser sur les jeunes qu’il a déjà — Suzuki, Slafkovsky, Demidov, Hutson — et de faire sauter la banque pour aller chercher le prochain grand défenseur de la LNH.
Il en a les munitions. Il en a les motifs. Il en a l’opportunité.
Et il a Logan Mailloux à offrir en pièce secondaire.
Alors, la vraie question n’est pas de savoir si Kent Hughes va tenter quelque chose. La vraie question, c’est de savoir si Mike Grier osera dire non.