La saison n’est pas encore commencée que Martin St-Louis donne déjà des signes de lassitude.
Après avoir brassé la cage à l’entraînement en reléguant Ivan Demidov sur un troisième trio, le coach du Canadien a enchaîné avec une conférence de presse de quinze minutes où il est apparu agacé, arrogant et, surtout, incapable de répondre aux questions avec un minimum de transparence.
C’était un moment malaisant, où les journalistes ont ri par réflexe, plus par soumission que par conviction. Le ton employé par St-Louis, sec, répétitif, souvent réduit à des « je sais pas », a jeté un froid sur la couverture d’un camp d’entraînement déjà tendu.
Cette entrevue raconte mieux que n’importe quel résumé l’ambiance de ce face-à-face entre un entraîneur fatigué et une presse paralysée:
Dès les premières secondes, St-Louis a donné le ton. À une question sur l’utilité des tests en camp d’entraînement, il a balancé :
« Je sais pas. On va voir. Vous pensez que j’ai toutes les réponses? J’ai aucune idée, c’est pour ça qu’on essaye. »
Déjà, l’agacement était évidente. Le coach semblait irrité qu’on lui demande une analyse un peu plus poussée, comme si le simple fait de poser la question relevait de la provocation.
Dans un marché comme Montréal, où chaque mot est disséqué, ce refus répété d’entrer dans les détails sonne comme une provocation.
Puis est venue une question sur Oliver Kapanen, que St-Louis venait de placer avec Demidov et Newhook. Plutôt que d’expliquer son raisonnement, il a lâché une phrase confuse :
« Je pense qu’Ivan va être mieux servi par la rapidité de Kapanen. Je sais pas. On va voir. »
Ici encore, la répétition du « je sais pas » revenait, comme un bouclier contre toute forme de critique. Pourtant, ce n’était pas une question piège : pourquoi Demidov, un talent générationnel, se retrouve-t-il relégué avec Kapanen et Newhook? St-Louis aurait pu élaborer. Il a choisi de se fermer.
Un journaliste a ensuite voulu comprendre pourquoi Florian Xhekaj était toujours au camp. La réponse fut décousue, ponctuée d’hésitations et de chiffres lancés sans cohérence :
« C’est 29 joueur… oui, c’est vrai, deux blessés… 27… Vous m’embrouillez aujourd’hui. »
Avant de conclure, sans conviction :
« Florian, il sait ce qu’il est. Il amène de la physicalité. Il est combattif. »
Une réponse mécanique, sans profondeur. Comme si St-Louis avait décidé qu’il n’avait plus à justifier ses choix.
Sur Montembeault, même constat. Les mots semblaient sortir à contre-cœur :
« Je pense que pour cette position, surtout dans ce marché, tu dois être dans un bon endroit mentalement. Monty est assez équilibré. Quand il n’est pas à son meilleur, il reste dans son meilleur. »
Une phrase contradictoire, presque incompréhensible. Montembeault ressent la pression du fait que Jacob Fowler est le futur numéro un de cette équipe, certes, mais encore une fois, St-Louis se retranche derrière des banalités, sans livrer la moindre analyse concrète.
« Je ne suis pas un motivateur »
Interrogé sur ses discours d’avant-match, St-Louis a surpris par son ton désabusé :
« Je ne sais pas. C’est une sensation. Je ne suis pas là pour motiver les joueurs. Si tu n’es pas motivé pour jouer dans cette ligue, tu es dans le mauvais boulot. »
Ces mots, crus, pourraient passer pour de la franchise. Mais replacés dans le contexte d’un camp où plusieurs jeunes se battent pour un poste, ils sonnent comme un désengagement. Un entraîneur qui clame qu’il n’est « pas là pour motiver » envoie quel message à des recrues nerveuses?
Sur l’alignement du 8 octobre, St-Louis a répété la même idée, comme pour couper court à tout débat :
« Même la façon dont on va commencer le 8 octobre, c’est juste une journée. C’est un match. Je sais pas combien de temps ça va rester comme ça. »
Puis, en réponse à un journaliste qui voulait savoir pourquoi certains joueurs portaient des chandails différents, alors que les réservistes étaient en bleu (Beck, Xhekaj, Blais, Veleno) :
« Tout le matériel qu’on vous donne avec des chandails, ça n’a pas d’allure. Ça va remplir les journaux. »
Le ton était moqueur, presque condescendant. Comme si la curiosité légitime des journalistes était un fardeau ridicule.
Tout au long de l’entrevue, le malaise était évident. Les journalistes, au lieu de confronter le coach, riaient avec lui.
Rires nerveux, souvent mal placés, qui traduisaient une forme de soumission. Personne n’a osé relever l’arrogance du « je sais pas » répété dix fois en quinze minutes.
Personne n’a insisté pour obtenir une réponse claire sur Demidov. Le rapport de force était évident : St-Louis domine la salle, et la salle se couche.
Pourquoi cette arrogance maintenant?
La question demeure : quelle mouche a piqué Martin St-Louis? Pourquoi un tel ton, à peine quelques jours avant le début de la saison?
Est-ce la pression grandissante autour de Demidov? Est-ce la peur de voir ses choix contestés publiquement? Ou simplement une lassitude face à un cirque médiatique dont il n’a plus la patience?
Quoi qu’il en soit, ce n’était pas un bon signal. Le coach du Canadien semblait déjà usé, déjà irrité, déjà sur la défensive. Dans un marché où la tension est constante, commencer la saison sur cette note est dangereux.
Ce bras de fer entre St-Louis et les journalistes n’est pas pas un détail. Il s’inscrit dans un contexte où l’entraîneur est accusé de vouloir « casser » Demidov et de répéter les mêmes erreurs de gestion qu’avec Lane Hutson l’an dernier, alors qu'il a pris beaucoup trop de temps avant de remplacer Mike Matheson par le prodige.
Chaque décision sera scrutée. Chaque phrase, disséquée. Et si St-Louis continue de répondre par des « je sais pas » et des moqueries, la tension risque d’exploser.
Les partisans ne pardonneront pas un autre sabotage comme celui du début de saison l'an dernier. Ils n’accepteront pas que leur prodige russe soit relégué par orgueil. Et ils ne comprendront pas un coach qui refuse de livrer la moindre explication claire.
En quinze minutes, Martin St-Louis a révélé plus sur son état d’esprit que sur son équipe. Fatigué, arrogant, sarcastique, il a montré un visage qui inquiète. Non pas celui d’un coach en plein contrôle, mais celui d’un homme déjà tanné, déjà sur les nerfs, déjà prêt à en découdre avec les médias.
Et quand l’entraîneur d’une équipe jeune, encore fragile, montre autant d’impatience avant même le premier match, il y a de quoi se demander si le vrai problème de ce Canadien ne se trouve pas… derrière le banc.