Commotion à Québec: c'est la fin du Centre Vidéotron

Commotion à Québec: c'est la fin du Centre Vidéotron

Par David Garel le 2025-08-11

Trente ans après le départ des Nordiques de Québec, la blessure reste ouverte. La capitale nationale du Québec n’a toujours pas retrouvé son équipe de LNH et, pire encore, chaque année qui passe semble éloigner un peu plus cette possibilité.

Mais dans l’histoire des rendez-vous manqués, il y a un épisode qui restera comme une faute impardonnable : le refus de Pierre Karl Péladeau de payer les 500 millions de dollars exigés à l’époque par Gary Bettman pour une franchise d’expansion.

À l’époque, l’occasion était unique. Pour 500 millions US, environ la moitié de la somme que Michael Andlauer a payée pour obtenir les Sénateurs, Québec aurait pu sécuriser le retour de ses Nordiques.

L’amphithéâtre flambant neuf, le Centre Vidéotron, venait tout juste d’ouvrir ses portes. La ferveur populaire était intacte. Les sondages montraient un appui massif au projet.

Mais Péladeau, patron de Québecor et propriétaire du Centre Vidéotron, a reculé. Pas d’offre officielle. Pas de négociation jusqu’au bout. Juste un retrait sec, à la dernière minute, sans explication publique convaincante.

Aujourd’hui, on sait que cette décision a coûté très cher. Car le prix d’une équipe d’expansion a explosé. Selon les informations de Chris Johnston (TSN), confirmées par plusieurs sources proches de la LNH, la prochaine vague d’expansion coûtera… 2 milliards de dollars US.

Quatre fois plus que ce que Péladeau aurait eu à payer. En dollars canadiens, c’est près de 2,7 milliards. Un montant qui exclut complètement le Québec de la table des négociations, à moins d’une mobilisation d’investisseurs d’envergure.

Et c’est là qu’entre en scène un homme qui a fait exactement ce que Péladeau n’a pas su faire : Michael Andlauer.

Cet homme d’affaires, déjà propriétaire des Bulldogs de Hamilton dans la OHL et actionnaire minoritaire du Canadien de Montréal, a sorti son carnet de chèques et a acheté les Sénateurs d’Ottawa.

Il n’a pas hésité, il n’a pas reculé à la dernière minute. Il a mis l’argent sur la table. Il a sécurisé l’avenir d’une franchise canadienne dans un marché compétitif, et il a immédiatement lancé le processus pour moderniser ses installations. Bref, il a fait tout ce que Québec attendait de Péladeau… mais pour Ottawa.

L’humiliation a atteint un nouveau sommet avec l’annonce, par la Commission de la capitale nationale (CCN), que les Sénateurs avaient conclu l’achat d’un terrain de 11 acres sur les Plaines LeBreton pour y construire leur futur aréna.

Coût de la transaction : un peu plus de 30 millions de dollars. Un investissement stratégique qui assure à Ottawa un site central, facilement accessible, au cœur de la capitale fédérale.

Cela fait des années que les Sénateurs rêvaient de quitter le Centre Canadian Tire de Kanata, situé à l’écart du centre-ville.

Le défunt propriétaire Eugene Melnyk avait échoué à plusieurs reprises, incapable de s’entendre avec ses partenaires ou la CCN. Mais Andlauer, lui, a débloqué le dossier en quelques mois.

Résultat : Ottawa va obtenir un aréna moderne, parfaitement intégré dans un quartier en développement, avec un potentiel énorme de revenus et de dynamisme économique.

Pour Québec, c’est un coup de massue. Cela signifie que les Sénateurs sont là pour rester, solidement installés dans un marché qui ne sera jamais libéré pour une relocalisation éventuelle.

C’est la fin d’un fantasme que certains caressaient encore : voir une équipe déménager de la région de la capitale fédérale vers Québec. Avec LeBreton, Ottawa s’ancre pour des décennies.

Et pour Péladeau, c’est la démonstration que, quand on veut, on peut. Andlauer a fait ce qu’il fallait, au bon moment, avec les bons partenaires. Exactement l’inverse de l’histoire des Nordiques.

L’autre volet du cauchemar, c’est le Centre Vidéotron. Construit en 2015 au coût d’environ 400 millions de dollars, financé en grande partie par des fonds publics, il devait être le joyau qui attirerait la LNH à Québec. Dix ans plus tard, il est déjà en déclin technologique.

Un audit d’ingénierie a révélé que des systèmes critiques, comme le contrôle d’accès des portes et des ascenseurs, sont en fin de vie utile.

Résultat : l’agglomération a dû débloquer 350 000 $ pour une mise à jour d’urgence. L’éclairage et la sonorisation doivent aussi être modernisés.

Des travaux routiers autour du site sont encore nécessaires pour sécuriser l’accès piétonnier. Et surtout, la conception initiale a souffert de choix budgétaires discutables : plusieurs systèmes informatiques, de billetterie, de sécurité et de ventilation étaient déjà passés date dès l’ouverture.

Aujourd’hui, on se retrouve avec une coquille moderne à l’extérieur, mais dépassée à l’intérieur. Les mises à jour logicielles sont compliquées, certaines interfaces sont incompatibles avec les nouveaux standards, et même le réseau de fibre optique interne nécessite déjà un remplacement partiel.

C’est un amphithéâtre de calibre LNH… qui n’a jamais servi à accueillir une équipe de la LNH, et qui pourrait nécessiter des investissements massifs pour simplement rester aux normes.

Comme si cela ne suffisait pas, le fiasco du Stade Canac est venu compléter le tableau. Ce stade municipal, domicile des Capitales de Québec, a connu un épisode digne d’une mauvaise comédie : match interrompu en 5e manche parce que les nouvelles lumières LED, installées deux jours avant la saison, ont flanché.

Les voltigeurs perdaient les balles dans la pénombre, le système de son s’est éteint pendant la présentation des joueurs… Un désastre de 2,4 millions de dollars en fonds publics, bâclé sans tests ni précautions.

Pour une ville qui prétend vouloir accueillir la LNH, c’est une image catastrophique. Incapable de maintenir un stade de baseball semi-pro en état, comment pourrait-elle gérer une franchise de hockey au plus haut niveau?

Pendant que Québec patauge dans ses propres ratés, ailleurs en Amérique du Nord, les projets avancent à vitesse grand V.

Atlanta et Houston sont désormais considérées comme les favorites pour obtenir les deux prochaines équipes d’expansion.

Ces marchés offrent non seulement un potentiel économique supérieur, mais surtout, ils ont des investisseurs prêts à signer un chèque de 2 milliards sans cligner des yeux.

Québec, elle, n’a plus de figure de proue crédible. Luc Poirier a exprimé à plusieurs reprises son intérêt à ramener les Nordiques, mais il ne possède pas le Centre Vidéotron, qui appartient à Péladeau.

Et tant que ce dernier ne cède pas la propriété ou ne s’associe pas, le projet restera bloqué. Péladeau, de son côté, a raté sa chance en refusant l’investissement initial et ne montre aucun signe de vouloir replonger.

Tout cela forme un récit cruel pour Péladeau :

Il avait l’aréna.

Il avait la ferveur populaire.

Il avait le moment idéal.

Il avait un prix d’entrée abordable (500 millions).

Et il a tout laissé passer.

ix ans plus tard, l’aréna vieillit mal, les coûts d’entrée ont quadruplé, et d’autres villes raflent les opportunités.

Andlauer, lui, a écrit l’histoire inverse. Sans amphithéâtre flambant neuf au départ, il a sécurisé une franchise, trouvé un site central, et lancé un projet qui fera rayonner Ottawa pour les prochaines décennies.

Le cauchemar de Péladeau est total.

Ottawa s’ancre définitivement aux Plaines LeBreton.

Le Centre Vidéotron se dégrade avant même d’avoir rempli sa mission.

Le prix d’entrée dans la LNH explose à des niveaux inaccessibles pour le Québec.

Les villes rivales avancent à grande vitesse.

Dans ce contexte, le rêve des Nordiques ressemble de plus en plus à un mythe entretenu pour vendre quelques chandails rétro.

Et chaque fois que l’Avalanche du Colorado revêt l’uniforme bleu fleurdelisé, c’est un rappel douloureux : l’histoire des Nordiques appartient au passé, et leur avenir à Québec n’a jamais semblé aussi improbable.

Pour ne pas dire... impossible...

Dix ans plus tard, le verdict est sans appel : il restera à jamais un amphithéâtre vide, réservé au hockey junior et aux spectacles de passage.

La fin du Centre Vidéotron, c’est aussi la fin professionnelle du hockey à Québec. Le rêve est mort... et il ne reviendra pas.