Pour une fois, ce n’est pas un joueur, un DG ou un coach qui change la donne chez le Canadien de Montréal. C’est le propriétaire. Et il faut lui lever notre verre.
Parce que pour la première fois depuis des lunes, et peut-être pour la première fois de l’histoire moderne du Canadien, le Tricolore ne sera plus l’équipe la plus martyrisée par le calendrier.
Fini les vols absurdes, les séquences éreintantes à travers trois fuseaux horaires, les voyages-éclair dans l’Ouest pour deux matchs, et les retours à 4 h du matin pour jouer 24 heures plus tard au Centre Bell.
Enfin.
Et ce n’est pas arrivé par magie.
C’est Geoff Molson qui a pété les plombs.
L’an dernier, dans les coulisses de la Ligue nationale, le proprio du CH aurait littéralement sauté une coche. Ce n’était plus du simple mécontentement poli, version "diplomate corporate".
Non. Ce fut de la colère brute. Une colère noire. Parce que ce que le Canadien a vécu l’an passé, en matière de voyagement, frôlait le sabotage logistique.
Et cette fois, Molson n’a pas avalé la pilule. Il a utilisé tout son poids, tout son réseau… et surtout, toute sa proximité avec Gary Bettman.
Car ne vous y trompez pas : les deux hommes sont très, très proches.
Depuis des années, Bettman compte sur Molson comme l’un de ses relais les plus loyaux au sein du Bureau des gouverneurs.
À chaque décision sensible, à chaque vote serré, Molson est là. Toujours dans la ligne du commissaire. Toujours aligné sur les positions officielles.
C’est d’ailleurs l’un des grands freins au retour des Nordiques à Québec. Bettman suit les intérêts de ses alliés, et Molson ne veut surtout pas d’un nouveau voisin qui siphonnerait les commanditaires et le marché francophone.
Molson ne veut pas partager sa part du gâteau et Bettman l'a toujours aidé en se faisant passer pour le méchant qui ne voulait pas du retour des Nordiques.
Mais cette proximité, cette allégeance, vient aussi avec des retours d’ascenseur. Et cette année, Molson a utilisé son influence pour corriger une injustice flagrante : le Canadien était la risée du calendrier.
L’an dernier, c’était l’enfer.
Le CH a passé la saison à courir après son souffle. Des voyages interminables pour deux matchs, des segments de trois matchs en quatre soirs dans trois villes différentes, des retours à domicile suivis de départs 24 heures plus tard.
Personne ne le disait officiellement, mais en coulisses, c’était clair : le calendrier du CH frisait le ridicule.
Et si Martin St-Louis, fidèle à lui-même, refusait de s’en servir comme excuse, il ne se gênait pas non plus pour glisser subtilement qu’il en avait marre.
« Je ne veux pas d’excuses, mais… » C’était souvent le début de phrase de Martin.
Il le disait à demi-mot. Mais il le disait.
Parce qu’il voyait bien que son club, jeune, fragile, en reconstruction, payait un prix physique et mental pour ces horaires démentiels.
Les entraînements étaient écourtés. Les plans de match étaient bâclés. La récupération était impossible. Et les performances s’en ressentaient.
Alors Molson a agi.
Et le résultat est là : 2025-2026 sera une toute autre histoire.
Le site Bookies.com a publié les données de voyagement des 32 équipes de la LNH, et le CH figure… au 27e rang. Oui, vous avez bien lu. Seulement cinq équipes voyageront moins que le Canadien cette saison.
Le CH ne parcourra que 35 056 milles, bien en deçà de la moyenne de la ligue, fixée à 40 000. Et avec seulement 26 changements de fuseau horaire (contre 32 en moyenne), on peut parler d’un véritable soulagement logistique pour une équipe qui en avait désespérément besoin.
C’est un net recul par rapport à la moyenne de la LNH, qui s’établit à 40 692 milles et 32,84 fuseaux horaires.
Pendant que les Oilers d’Edmonton, par exemple, s’apprêtent à traverser 54 425 milles et 36 fuseaux, le Canadien pourra, pour une fois, gérer ses ressources sans se déchirer les mollets et les genoux à chaque escale.
C’est un petit miracle logistique, un gros gain stratégique… et peut-être la différence entre une qualification ou non en séries.
Est-ce un hasard ? Pas du tout.
C’est un message.
Un message clair de Molson aux autres propriétaires :
« Moi aussi, je veux que mon équipe ait une chance. »
Et un message silencieux, mais bien compris, de Bettman : « On te le devait bien. »
Parce qu’il faut le dire : Molson prend énormément de place dans les réunions du Bureau des gouverneurs. Il est écouté. Respecté.
Et quand il tape du poing sur la table, même les sceptiques s’ajustent. Il est le propriétaire de l’une des franchises les plus emblématiques de la LNH, dans l’un des marchés les plus passionnés. Quand Montréal souffre, la ligue en entend parler.
Et dans ce cas-ci, Molson a crié fort.
Mais il y a plus que les chiffres. Il y a le contexte.
La prochaine saison, 2025-2026, ne sera pas une saison banale. C’est une saison de confirmation. Le CH, après avoir goûté aux séries contre toute attente, doit maintenant démontrer qu’il est de retour pour de bon.
On veut du progrès. De la constance. De la crédibilité.
Et pour ça, il faut un calendrier qui donne une vraie chance. Pas un piège.
Alors oui, il y aura encore 16 séquences de deux matchs en deux soirs (un peu au-dessus de la moyenne). Mais globalement, le CH évitera l’usure chronique qui le plombait depuis des années. Ça change tout.
Et Martin St-Louis ?
Disons qu’il ne s’en plaindra pas. Même s’il refusera encore de dire merci. Parce que c’est son style. Il ne veut jamais d’excuses. Il veut que ses joueurs jouent. Peu importe les circonstances.
Mais cette année, il aura une chose en moins à justifier. Une chose en moins à camoufler.
Et ça, c’est grâce à Molson.
Le timing est parfait. Le Canadien s’apprête à vivre un tournant avec l’émergence d’Ivan Demidov, la stabilisation de la défensive, et l’espoir d’une attaque un peu plus équilibrée.
Dans un contexte pareil, avoir un calendrier raisonnable, c’est une bénédiction. Une arme cachée. Une chance réelle de compétitionner à armes égales.
Et ça, on le doit à Geoff Molson.
L’homme souvent discret. Souvent effacé. Souvent critiqué pour son silence ou sa loyauté aveugle à Bettman. Mais cette fois, il a parlé. Et il a été entendu.
Bien sûr, certains diront que c’est un détail. Qu’un calendrier n’a jamais marqué de but. Mais ceux qui connaissent le hockey savent : la fatigue tue les jambes, la répétition des décalages tue la concentration.
Et quand chaque match compte, chaque mille en moins devient une victoire mentale.
Voilà pourquoi il faut saluer Molson.
Pas pour avoir simplement obtenu un meilleur horaire. Mais pour avoir, pour une fois, utilisé son influence pour le bien immédiat de son équipe. Et pour avoir, dans l’ombre, corrigé une injustice qui durait depuis trop longtemps.
Il ne l’a pas fait pour les partisans. Ni pour les médias. Il l’a fait parce que son équipe en avait besoin. Et c’est tout à son honneur.
Qu’on le veuille ou non, Geoff Molson est un homme puissant dans l’organigramme de la LNH. Et quand il met ce pouvoir au service du Tricolore, les effets sont immédiats.
Le CH a maintenant un calendrier plus humain.
Il reste à Martin St-Louis et à ses joueurs de transformer cette faveur en résultats.
Mais une chose est certaine : ils n’auront plus l’excuse du millage.
Merci, monsieur Molson. C’était le temps que vous frappiez à la bonne porte.