Colère à Brossard: David Reinbacher craque sur la glace

Colère à Brossard: David Reinbacher craque sur la glace

Par David Garel le 2025-09-16

C’est la scène la plus marquante depuis le début du camp des recrues du Canadien de Montréal. Et elle ne s’est pas produite pendant un match, ni devant les caméras. Elle s’est déroulée dans le silence d’un entraînement entre les murs de Brossard… lors du derrnier jour avant que le vrai camp ne commence..

Là où les masques tombent.

David Reinbacher a craqué.

Une explosion de frustration. Une démonstration que le cinquième choix au total de 2023 est humain, vulnérable, et surtout… au bord du gouffre.

La séquence n’a duré que quelques secondes. Mais elle en disait long.

Après une répétition mal exécutée, où il s’est fait déborder en arrière du filet, Reinbacher a lancé un cri et d’un coup sec, frappa contre la baie vitrée avec son bâton. Pas un geste discret. Un geste de désespoir.

Immédiatement, Francis Bouillon s’est approché. Le regard grave. Le ton bas, mais ferme. Pendant plusieurs minutes, les deux hommes ont échangé. Bouillon essayait de calmer la tempête. Reinbacher, visiblement émotif, hochant la tête sans conviction.

Le message était clair : le jeune homme est à bout.

Ce n’était pas la première séquence ratée de la séance. Depuis le début du camp, Reinbacher semble constamment en retard d’une fraction de seconde. Dans les confrontations en un contre un, il se fait bouger. Dans les batailles le long de la rampe, il perd ses repères. Et dans les sorties de zone, il hésite.

Même à l’entraînement, il n’impose pas sa présence. Il est lent. Timide. Il manque d’explosion dans ses premières foulées. Sa lecture du jeu, autrefois saluée, semble affectée par le manque de confiance.

Pire encore : on dirait qu’il joue avec la peur au ventre.

Le genou est guéri, mais la tête?

C’est là que le problème devient plus profond. Physiquement, David Reinbacher est guéri. C’est lui-même qui l’a dit aux journalistes : son genou va bien. Il est « à 100 % ».

Mais personne ne semble convaincu. Ni lui, ni le staff, ni les coéquipiers.

Depuis sa blessure au genou gauche en 2024, suivie d’un retour au compte-gouttes à Laval, Reinbacher n’a jamais retrouvé l’aplomb qui faisait de lui un espoir top 5. Il n’a joué que 23 matchs en tout et pour tout. Et ce qu’il montre en ce moment… c’est un joueur qui doute.

Comme l’a dit Pascal Vincent, « on voit qu’il manque de millage. » Il y a une rouille dans son jeu. Une hésitation. Et cette hésitation, elle contamine tout.

Et comme si ce n’était pas assez difficile mentalement, le fantôme de Matvei Michkov rôde.

Depuis le repêchage de 2023, chaque contre-performance de Reinbacher rallume la plaie ouverte chez les partisans : pourquoi ne pas avoir repêché Mishkov?

L’ailier russe est déjà devenu une vedette dans la LNH. Pendant ce temps, Reinbacher peine à bloquer des recrues de la ECHL.

Chaque fois qu’il touche à la rondelle, les réseaux sociaux explosent :

« Michkov aurait été une star. »

« On a repêché un défenseur moyen au lieu d’un génie offensif. »

Et même si Reinbacher ne le dira jamais, ça l’écrase. Il le sait. Il lit. Il entend. Et ça lui monte à la tête. Sa colère aujourd’hui? C’est le reflet de cette pression constante. Injuste, peut-être… mais bien réelle.

Pas prêt. Pas encore.

Tout indique que Reinbacher commencera la saison à Laval.

Et ce ne sera pas une punition. Ce ne sera même pas un échec. Ce sera une nécessité. Il faut qu’il retrouve ses repères. Qu’il joue 22 minutes par match. Qu’il fasse des erreurs sans que ça finisse sur YouTube.

Mais avant de penser à Laval, il doit se calmer. Mentalement. Émotionnellement. Parce que dans l’état où il est en ce moment, même un match à la Place Bell pourrait mal virer.

Il est à fleur de peau. Son regard est vide. Son langage corporel trahit un joueur qui ne croit plus en lui. Et ce sont souvent ces jeunes-là qu’on perd, parce qu’ils tombent dans le doute permanent.

Il faut aussi parler de ce qui s’est passé dimanche contre les Leafs. Reinbacher a été jumelé à Adam Engström… et ce fut un désastre.

Les deux se sont gênés. Engström a dû compenser. Et au final, c’est le Suédois qui a quitté la glace furieux. Il n’a pas parlé aux médias. Il a laissé entendre que Reinbacher l’avait plombé.

Une tension réelle. Une frustration qui s’est transposée à l’entraînement. Car même là, on a vu que les deux ne se faisaient plus confiance.

Pour Reinbacher, c’est une claque. Non seulement il joue mal, mais il commence à nuire aux autres.

Ce n’est pas anodin si Francis Bouillon a été celui qui est intervenu.

L’ancien guerrier du CH sait ce que c’est que de traverser des tempêtes. Il a vécu l’humiliation, les descentes dans la ligue américaine, les rappels, les critiques. Il comprend la douleur du jeune Autrichien.

Mais son regard, après la discussion, disait tout : Reinbacher doit se ressaisir. Rapidement.

La patience a ses limites. Et à Montréal, la pression n'a pas de sentiments ou de pitié.

Il y a quelque chose de tragique dans cette histoire.

Reinbacher n’a jamais rien demandé. Il ne s’est pas choisi au 5e rang. Il n’a pas mis son nom dans la bouche de tous les partisans. Il n’a jamais promis d’être le prochain Roman Josi. Il a juste voulu faire sa place. Tranquillement. Sérieusement.

Mais le poids du rang, le bruit médiatique, les comparaisons avec Michkov, la blessure, la rouille, le doute… tout s’est accumulé.

Et aujourd’hui, ça explose.

Heureusement, tout n’est pas perdu.

Reinbacher a encore tout le talent pour devenir un défenseur fiable de la LNH. Pas un quart-arrière. Mais un top 4 droitier intelligent, physique, constant.

Mais pour ça, il doit passer par Laval. Et surtout, il doit retrouver la paix intérieure.

Parce qu’en ce moment, il joue contre lui-même.

Et tant qu’il ne battra pas ce démon-là, il ne battra personne sur la glace.