Cole Caufield écrit l'histoire: sur les traces de Guy Lafleur

Cole Caufield écrit l'histoire: sur les traces de Guy Lafleur

Par David Garel le 2025-10-29

Parfois, une équipe change de dimension sans même s’en rendre compte. Et c’est exactement ce qui est en train de se produire à Montréal.

En ce début de saison, le Canadien n’est plus ce club de transition qui espère vaguement surprendre. Il est redevenu un prétendant crédible. Et au cœur de cette renaissance se dresse un homme : Cole Caufield.

L'Américain a rappelé pourquoi il est désormais le cœur battant du Canadien de Montréal et le symbole d’une équipe qui refuse de mourir.

Son deuxième but du match, inscrit après seulement 44 secondes de jeu en prolongation, a scellé une victoire de 4-3 contre le Kraken de Seattle, prolongeant la fiche victorieuse du Tricolore à 8-3-0.

L’ailier américain, que plusieurs analystes voyaient plafonner à 35 ou 40 buts, vient d’inscrire son neuvième filet en onze matchs, un rythme infernal de 0,82 but par rencontre, digne des plus grandes légendes de la franchise.

Si la tendance se maintient, Caufield terminerait la saison avec 67 buts. Oui, soixante-sept. Ce serait non seulement un nouveau record du Canadien de Montréal, mais un accomplissement qui dépasserait la mythique marque de Guy Lafleur, établie en 1977-1978. Et le plus fascinant, c’est que Caufield ne donne pas l’impression de forcer les choses.

Car ce n’est plus le jeune marqueur opportuniste des débuts. C’est un sniper calme, précis et complet. Sa constance est déconcertante. Après avoir marqué deux fois contre Seattle, dans une victoire de 4-3 arrachée en prolongation, il ne s’est pas contenté d’aider l’équipe à maintenir sa fiche victorieuse (8-3-0). Il a inscrit son nom seul au sommet de l’histoire du Canadien pour le plus grand nombre de buts en prolongation, dépassant Howie Morentz Morin avec son onzième but gagnant en carrière après 60 minutes.

À 24 ans, il devient déjà l’un de ces joueurs capables de marquer l’imaginaire à chaque instant. Montréal n’a pas eu ce type de finisseur depuis des décennies, et c’est tout le club qui en profite.

Cole Caufield reproduit presque trait pour trait la trajectoire de Lafleur lors de son année record. En 1977-1978, le « Démon blond » avait amorcé la saison avec huit buts à ses dix premiers matchs, un rythme de 0,80 but par match. Caufield, lui, le dépasse à 0,82. Lafleur avait ralenti en décembre et février avant de conclure à 60 buts en 78 matchs, soit une moyenne de 0,76 but par match.

Avec 82 matchs au calendrier moderne, Caufield dispose de quatre rencontres supplémentaires pour pulvériser cette marque.

Mais à la différence de Lafleur, Caufield évolue dans une Ligue plus fermée, face à des vrais gardiens et non les passoires de l'époque, dans un environnement statistique moins propice aux saisons de 60 buts. C’est dire à quel point sa performance actuelle frôle l’exploit absolu.

Cette montée en puissance de Caufield n’est pas un hasard. Elle s’inscrit dans une culture de confiance reconstruite pierre par pierre par Martin St-Louis.

Caufield, souvent caricaturé comme un simple marqueur unidimensionnel est devenu un joueur complet. Il crée du jeu, replie intelligemment, se place dans les zones dangereuses avec un timing impeccable.

Ses neuf buts en onze matchs ne sont pas le fruit d’une chance temporaire : ils résultent d’un système de possession et de créativité où chaque séquence offensive vise à le mettre dans sa zone de tir.

Et Suzuki, son capitaine, le comprend mieux que quiconque. Le duo ne cesse de s’élever avec Juraj Slafkovsky. Leur chimie rappelle celle des grands trios du passé.

Mais au-delà des chiffres, c’est le ton général qui a changé à Montréal. L’équipe joue avec confiance. Elle ne panique plus. Aujourd'hui quand le Kraken est revenu à 3-3, l'ancien CH se serait effondré.

Mais cette équipe croit. Et cette confiance découle directement du sentiment que quelque chose de spécial est en train de naître.

Quand Caufield saute sur la glace en prolongation, tout le monde retient son souffle. Ses coéquipiers le savent : il va trouver le moyen

Cette efficacité en prolongation est incroyable. Le Canadien est tout simplement imbattable dans ces circonstances depuis le début de la saison.

À chaque fois, c’est Caufield qui dicte le tempo. Son sang-froid fait la différence. Là où tant d’équipes perdent la tête, Montréal reste patient, organisé.

Et cette sérénité découle du sentiment que le club a enfin une superstar capable de renverser n’importe quel scénario. Car c’est bien cela : Caufield, aujourd’hui, n’est plus un espoir prometteur, mais une vedette planétaire.

Dans l’histoire du Canadien, seul Guy Lafleur a atteint la barre des 60. Stéphane Richer (51 en 1989-1990) et Vincent Damphousse (40 en 1992-1993) sont les seuls à s’en être approchés depuis.

Si Caufield parvient à franchir ce seuil mythique, il deviendra le premier joueur de l’ère moderne à inscrire 60 buts avec le Tricolore Cette simple possibilité explique l’euphorie qui gagne Montréal.

Les partisans n’ont pas vécu pareille sensation depuis des décennies. On parle souvent de Carey Price, de P.K. Subban, de Saku Koivu, mais aucun n’a eu le potentiel d’un marqueur historique.

Dans un calendrier aussi long, il serait facile de tempérer les attentes. De rappeler qu’il reste 71 matchs, que les blessures et les passages à vide guettent. Mais cette fois, quelque chose est différent. Caufield n’a plus l’air d’un joueur qui va ralentir.

Lafleur, en 1978, avait terminé la saison avec la Coupe Stanley, le trophée Hart et le Art Ross. De quoi faire rêver Caufield.

Et le Québec en entier...