Dans un vestiaire déjà miné par la tension, il aura suffi d’un moment, d’une marmite qui explose, pour que la chambre craque.
Selon ce qui circule, Brendan Gallagher a explosé contre Patrik Laine lors du deuxième entracte du match numéro deux à Washington.
Une altercation verbale bruyante. Une charge frontale. Devant tous les coéquipiers. Devant le personnel d’entraîneurs. Devant Martin St-Louis.
C’est la goutte qui a fait déborder le vase.
Et ce n’est pas un hasard si, après cet incident, Laine n’a pas disputé une seule seconde de la troisième période. Pas un seul shift.
Même lorsque le Canadien a retiré son gardien pour lancer six attaquants dans la mêlée, St-Louis a laissé Laine au bout du banc, l’air absent, les patins encore lacés, le regard vide. Le message était sans ambiguïté. Le coach prenait le bord de son vétéran Gally.
Ceux qui suivent le Tricolore de près savent à quel point Gallagher incarne l’esprit de combat. Il n’est pas le plus rapide, ni le plus talentueux.
Mais il est le cœur du Canadien. Le joueur que les jeunes regardent. Celui qui reçoit des bâtons au visage sans broncher. Celui qui mord dans son protecteur buccal à chaque mise en jeu comme si sa vie en dépendait.
Et c’est justement ça qui l’a fait exploser. Gallagher, usé par les coups reçus, les dents cassées, les séances de traitements pendant ses rares congés, ne pouvait plus tolérer de voir un joueur de 8,7 millions de dollars se traîner les patins dans un match de séries.
Il aurait dit, devant tous :
« Tu veux pas être ici? Va-t’en. Nous, on se bat. Toi, tu regardes. T’es un manque de respect à tout ce qu’on essaie de construire ici. »
Martin St-Louis n’a pas eu besoin d’intervenir. La tension dans la pièce était énorme. Les regards se sont tournés vers Laine, qui n’a pas répondu. Qui n’a même pas relevé la tête. C’était terminé.
Le leadership silencieux de St-Louis
En conférence de presse, Martin St-Louis n’a pas parlé de l’altercation. Il a évité de nommer Laine. Il a simplement dit :
« Ce sont des décisions que tu prends comme entraîneur. J’ai raccourci mon banc. »
Mais ce n’est pas un choix tactique. C’est un choix moral.
Parce qu’un entraîneur peut tolérer un joueur en mauvaise posture. Il peut tolérer une erreur. Il peut tolérer une passe ratée.
Mais il ne peut pas tolérer l’indifférence. Il ne peut pas tolérer qu’un joueur abandonne ses coéquipiers en séries éliminatoires.
Et c’est ce que Laine a fait. Pas volontairement. Peut-être même inconsciemment. Mais aux yeux de ses coéquipiers, il les a trahis.
Depuis plusieurs semaines, les signes étaient là. Le langage corporel. L’attitude en entraînement. Les « symptômes grippaux » à répétition. Les vidéos virales de shifts où Laine se promène sans conviction.
Les commentaires passifs-agressifs sur son temps de jeu. Le regard absent dans l’avion. L’isolement total.
Il ne s’agit pas de juger l’homme. La santé mentale de Laine a été fragilisée dans le passé. Il a parlé ouvertement de dépression, d’addictions, d’un dégoût profond du hockey à certains moments de sa vie.
Mais la réalité du sport professionnel est sans pitié : quand on n’est plus capable de contribuer, quand on devient un poids, on est mis de côté. Peu importe le contrat. Peu importe les intentions.
Et Brendan Gallagher, qui saigne pour cette équipe depuis plus d’une décennie, a été celui qui a mis des mots sur ce que tous pensaient tout bas.
L’incident dans le vestiaire a tout changé. Ce n’est pas seulement Gallagher qui en veut à Laine. Ce sont plusieurs jeunes joueurs qui, selon nos informations, ont cessé de croire en lui. Qui ne veulent plus être associés à lui sur la glace. Qui ne veulent pas voir un coéquipier abandonner pendant que l’équipe lutte pour sa survie.
Là où la situation devient intenable, c’est que Laine le sait. Il le sent. Il ne parle plus. Il ne rit plus. Il ne participe plus. Et ça devient un problème d’environnement. De culture. D’unité.
On parle souvent de rachat de contrat, de transactions impossibles. Mais aujourd’hui, il ne s’agit plus de cap salarial. Il s’agit d’un climat devenu invivable.
Ce n’est pas une guerre froide entre Laine et St-Louis. Ce n’est même plus un conflit de gestion de minutes. C’est une rupture. Un divorce. Une cassure complète.
Et quand Georges Laraque dit :
« Ce n’est pas vrai qu’on va mettre Demidov avec ce gars-là », il parle au nom de tous ceux qui veulent protéger le futur du Canadien.
Demidov, c’est l’avenir. Laine, c’est le passé. Et comme tout mauvais souvenir, on veut l’oublier le plus vite possible.
Dans quelques jours, le CH pourrait encore être en vie en séries. Mais une chose est certaine : Patrik Laine, lui, ne l’est plus à Montréal.
La scène du vestiaire avec Gallagher aura été la dernière étincelle. Le point de non-retour.
Pendant que Patrik Laine traînait les pieds sur la glace, sans émotion ni implication, Brendan Gallagher, lui, passait sa journée de congé sur la chaise d’un dentiste, à se faire reconstruire la mâchoire, une dent à la fois.
Deux doubles-échecs au visage en deux matchs, zéro pénalité sifflée, et pourtant, Gallagher est revenu à l'entraînement le sourire cassé, mais la volonté intacte.
Ce genre de sacrifice mérite le respect absolu de n’importe quel coéquipier. Alors comment Laine, avec son apathie flagrante et son désintérêt total, peut-il encore croiser le regard de Gallagher dans le vestiaire sans honte?
Comment peut-il s’asseoir à deux mètres de ce guerrier et prétendre faire partie de la même bataille? La vérité, c’est qu’il ne peut pas. Parce qu’à Montréal, on ne pardonne pas l’indifférence devant la douleur des autres.
Même si Laine voulait s’excuser. Même s’il voulait se racheter. Il est trop tard. Le respect, une fois perdu, ne se rachète pas.
Et le seul avenir possible, maintenant, passe par un rachat. Par une libération. Par un adieu.
Brendan Gallagher l’a dit avec ses tripes.
Martin St-Louis l’a confirmé avec son banc.
Le reste du vestiaire l’a accepté en silence.
Et le Centre Bell, vendredi soir, pourrait applaudir un Canadien sans Patrik Laine pour la première fois depuis longtemps. Et peut-être, pour toujours.