C’était censé être le moment de sa vie. Un camp d’audition, un camp crucial, un face-à-face avec la réalité.
Joshua Roy devait prouver à tous, entraîneurs, dirigeants, partisans, qu’il appartenait à la Ligue nationale. Qu’il pouvait enfin s’imposer comme joueur top-9 avec le Canadien de Montréal.
Mais au lieu de s’élever, il s’est effondré. Et le plus brutal dans ce naufrage, ce n’est même pas sa performance sur la glace. C’est le silence. Le silence glacial de Martin St-Louis. Pas un mot. Pas une mention. Comme si Roy n’avait jamais existé.
Lorsqu’un journaliste a demandé à l’entraîneur quels joueurs avaient, selon lui, pris un pas de plus dans leur développement, la réponse de Martin St-Louis a été tranchante. Non par ce qu’il a dit, mais par ce qu’il n’a pas dit.
Lorsque Patrick Friolet a demandé à Martin St-Louis si certains jeunes joueurs comme Owen Beck ou Oliver Kapanen semblaient avoir franchi une nouvelle étape cette année, l’entraîneur n’a pas hésité à les inclure dans sa réponse.
Il a mentionné non seulement Beck et Kapanen, mais aussi Filip Mesar, Sean Farrell, Florian Xhekaj, et même Jared Davidson.
Une énumération méthodique, presque chirurgicale. Tous les noms y étaient. Tous, sauf un. Celui de Joshua Roy. Oublié. Rayé de la carte. Délibérément. Ce silence en disait bien plus long que n’importe quel reproche direct.
Ce extrait vidéo confirme que c'est bel et bien la fin pour Joshua Roy à Montréal:
Ce n’était pas un oubli. C’était un message. Une condamnation implicite. Et dans les corridors du Centre Bell, cette omission a résonné comme un coup de massue.
Un membre de l’entourage de l’équipe n’a pu s’empêcher de glisser : « Il est invisible. » Le message était clair : Roy a raté sa chance. Définitivement.
Pourtant, tout avait été mis en place pour qu’il s’impose. Il avait amorcé le camp sur le troisième trio, aux côtés d’Alex Newhook et de Zachary Bolduc, une combinaison qui ressemblait étrangement à ce que le CH pourrait aligner en début de saison.
Il avait une audition réelle. Mais il a "choké sa vie" et a été écarté aussitôt. Trop peu de tirs au but, trop de tentative de passe molle interceptée, trop de nonchalance. Trop peu. Trop tard.
St-Louis a pris le micro et a parlé de tout le monde. Même du nain Sean Farrell ou du plombier Davidson. Mais de Joshua Roy? Rien. Le néant. Comme s’il n’avait même pas joué.
La blessure est d’autant plus profonde qu’elle vient au terme d’un long processus d’alerte. Ce n’est pas comme si Roy n’avait pas été averti. Pascal Vincent, en mars dernier, avait déjà sonné la cloche publiquement :
« Il peut le faire, mais pour le maintenir, il va devoir faire un gros été. Il va devoir travailler cet été pour créer ce rythme. Quand il joue avec du rythme… wow, c’est un excellent joueur. Mais il faut que ça devienne partie intégrante de son ADN. »
À l’époque, le Rocket venait de s’assurer de la première place dans la Ligue américaine, mais Roy, lui, trainait les pieds.
Et Martin St-Louis avait été sans pitié:
« Nous n’allons pas le tenir par la main. Roy ne doit pas s’attendre à ce qu’on le guide comme des parents le feraient avec leur nouveau-né. »
L’exigence était claire. Le défi posé. Roy devait revenir au camp d’entraînement transformé. Plus rapide. Plus engagé. Plus affamé. Et il avait promis qu’il le ferait. Il avait perdu 15 livres. Il s’était affiché en entrevue avec une confiance renouvelée.
Il avait juré que son rythme était meilleur, que sa condition physique était optimale. Et pourtant, lorsqu’il s’est retrouvé sur la glace contre des joueurs de niveau NHL, il a semblé lent, hésitant, déconnecté.
Chaque séquence semblait le dépasser. Il a tenté de se rendre utile, mais à contretemps. Il a raté des replis, perdu des batailles le long des rampes, brisé des montées avec des passes risquées.
Et chaque erreur semblait irriter Martin St-Louis un peu plus. Quand Roy a créé un hors-jeu par manque de synchronisme, l’entraîneur a frappé sur la bande. Quand il a manqué une passe facile sur une montée, il a levé les yeux au ciel. Des signes, subtils mais éloquents, que la confiance s’effritait.
Un recruteur présent dans la loge des observateurs l’a résumé cruellement :
« Roy a été trop lent pour penser, trop lent pour agir, trop lent pour survivre. » C’est toute la tragédie d’un joueur coincé entre deux mondes. Trop bon pour la Ligue américaine, pas assez rapide pour la LNH. Un “tweener”. Un joueur entre deux niveaux.
Et comme si la sentence ne suffisait pas, Gilbert Delorme est venu l’enfoncer un peu plus lors de son intervention à la radio. Sa déclaration a fait frémir :
« Je vais le dire. Il jouera pas pour le Canadien. Pas de malice, rien envers le kid. Mais y a pas de place pour un gars de même. L’année passée, il avait une chance. Cette année, il a encore une chance. Il est arrivé en shape. Mais c’est pas encore assez. Il patine pas. Tu peux pas jouer dans la Ligue nationale si tu patines pas. »
La colère de Delorme reflète une opinion de plus en plus partagée dans l’organisation. Roy n’a pas répondu à l’appel. Il n’a pas su saisir sa chance, malgré des conditions parfaites.
Et désormais, tout indique qu’il sera échangé. Déjà cet été, le CH avait tenté de l’inclure dans des offres, notamment pour Pavel Zacha à Boston (avec Kapanen et Struble), ou même dans des discussions plus ambitieuses pour Crosby, McCann ou Ryan O’Reilly.
À chaque fois, le nom de Roy revenait dans les offres comme un actif en déclin. Un joueur qu’on voulait valoriser en tant que throw-in, mais qu’on savait voué à partir.
Et pourtant, selon une source très proche du joueur, tout n’était pas à jeter. Dans l’intimité, Joshua Roy avait changé. Un colocataire proche, qui l’a vu au quotidien durant l’été, nous a affirmé que Roy avait coupé tous les liens avec son passé.
Fini les soirées, fini les sorties. Il n’était pas sorti au bar depuis plusieurs mois. Il s’était soumis à un régime strict, avec sommeil optimisé, entraînements rigoureux, taux de gras surveillé.
« Je l’ai vu mettre les efforts comme jamais cet été, et là, il se fait ramasser pour des histoires de l’an passé », nous a confié cette source.
Roy avait compris. Il avait essayé. Mais l’effort hors glace ne s’est pas traduit sur la glace. Le système de jeu du CH repose sur la rapidité d’exécution, sur la lecture dynamique, sur le “jump” sans rondelle. Et dans toutes ces facettes, Roy a échoué.
C’est ce qui rend cette histoire tragique. Ce n’est pas un cas de je-m'en-foutisme. Ce n’est pas un joueur qui n’a pas écouté. C’est un joueur qui a essayé… et qui a échoué.
Quand Roy a parlé devant les caméras hier soir, avec sa petite voix non-confiante qui essayait de se convaincre qu'il lui restait encore du temps pour séduire Martin St-Louis, tout le monde a senti le malaise d'un gars au fond du trou:
Malgré ses efforts. Malgré sa volonté. Malgré son sérieux retrouvé. Mais à la fin, dans la LNH, seule la performance compte. Et Roy n’a pas été à la hauteur.
Aujourd’hui, Martin St-Louis regarde vers l’avenir. Quand tu parles des plombiers Owen Beck, Oliver Kapanen, Filip Mesar, Sean Farrell, Jared Davidson, Florian Xhekaj, tu passes par ceux qui ont sauté une marche. Par ceux qui, aux yeux de l’organisation, ont grandi.
Joshua Roy, lui, est resté en bas de l’escalier. Et la porte s'est refermée... pour de bon...