Cauchemar pour Sean Farrell: la fin de son aventure à Montréal

Cauchemar pour Sean Farrell: la fin de son aventure à Montréal

Par David Garel le 2025-09-28

Cole Caufield avait crié au génie. Devant les micros, il s’était presque enflammé : « C’est un vol ! »

Le Canadien venait de repêcher Sean Farrell au 124e rang, en 2020, et son ancien coéquipier à l’équipe américaine y voyait un coup de maître.

L’attaquant cérébral, petit de taille mais immense en vision du jeu, avait tout pour devenir un magicien du troisième trio. Une sorte de Tyler Johnson moderne. Un pick and steal comme on en voit dans les dynasties.

Mais cinq ans plus tard, le rêve est mort. Pire encore : il vient d’être piétiné par une décision brutale. Sean Farrell a été soumis au ballottage.

Et pour plusieurs observateurs, ce n’est pas seulement une mesure administrative. C’est une exécution en bonne et due forme.

Le Canadien a lancé la serviette. Il ne l’a pas dit en ces mots, mais il l’a fait savoir. Farrell n’a même pas été intégré dans les plans de pré-saison. Il a été confiné au groupe « des rejetés » dès les premiers entraînements.

Et pour enfoncer le clou, la montée surprise de Florian Xhekaj, le géant contre le nain, est venue refermer la trappe sur ses derniers espoirs.

Cet été, Farrell signait un contrat d’un an, deux volets, qui ressemblait à un ultimatum poli. Il y voyait une opportunité. Le club, lui, y voyait un test final.

Et il l’a échoué.

Encore une fois... on voit le syndrome du petit joueur qui ne compense pas...

Farrell mesure 5 pieds 9, pèse 175 livres, et n’a jamais été le plus robuste du vestiaire. À l’université, il compensait par une intelligence rare, une vision digne des meilleurs passeurs. Mais dans la LAH, où les coins sont plus étroits et les coups plus sourds, son style a rapidement montré ses limites.

C’est Jean-François Houle, ancien entraîneur-chef du Rocket, qui avait lancé le premier avertissement public :

« Farrell doit prendre de la masse. Sa force physique doit vraiment être meilleure. Quand tu es un petit joueur, tu n’as pas le choix. Tu dois toujours bouger tes pieds. »

Le coach ne s’était pas arrêté là. Il avait cité les indésirables Joshua Roy et Xavier Simoneau comme modèles à suivre. Des joueurs de petite taille eux aussi, mais qui n’avaient jamais reculé devant un duel. Qui avaient fait du courage et de l’intensité leur carte d’entrée.

La honte.

Farrell, lui, est trop souvent passif. Absent en repli. Transparent le long des rampes.

Et quand Houle avait martelé, à propos de Joshua Roy :

« Il gagne ses bagarres dans les coins. Il sort toujours avec la rondelle. », il visait indirectement Farrell.

Le message était clair : talent ou pas, le hockey professionnel ne pardonne pas la mollesse.

Le drame Farrell s’est construit lentement. Il n’y a pas eu d’éclatement spectaculaire, pas de scène de rage. Juste une série de constats de plus en plus accablants.

Le message ? Il ne fait même plus partie du plan B. Il est à peine une roue de secours.

Ironie du sort, Pascal Vincent est peut-être le seul à encore y croire. Le nouveau coach du Rocket a livré des propos lumineux, presque touchants, au sujet de Farrell :

« Ce gars-là est plus intelligent que moi. »

Il voulait lui offrir une saison complète. Il croyait que l’intelligence pouvait compenser le déficit physique. Il rêvait d’un joueur capable de guider les jeunes, de jouer un rôle de leader silencieux.

Mais à peine arrivé à Laval, Vincent a dû revoir ses plans. 

Farrell a été relégué aux entraînements dans le groupe des oubliés.

Farrell fut parfois le 13e attaquant. Peut-être même 14e... à Laval...

Une fragilité physique qui le hante

Et comme si ce n’était pas assez, la santé de Farrell commence à inquiéter. Il a raté 20 matchs l’an dernier. Il s’est encore blessé en match simulé cette semaine, après une chute anodine… qui l’a mis hors combat.

Une mauvaise nouvelle de plus.

Le joueur est talentueux. Personne ne le nie. Mais son corps ne suit pas. Et dans une ligue aussi impitoyable que la AHL, le corps est tout.

La question commence à se poser : Sean Farrell a-t-il simplement le physique de l’emploi ?

Même ses partisans les plus fidèles se taisent. Cole Caufield n’a pas réagi à la nouvelle du ballottage. Le vestiaire n’a pas pris sa défense. Et les fans, eux, ont déjà tourné la page.

Du rêve à Harvard à la peur de l’Europe

Farrell a passé deux saisons à Harvard, où il avait fait saliver les recruteurs avec ses mains magiques et sa QI hockey hors normes. Mais dans le hockey professionnel, les diplômes ne comptent pas. Ce sont les résultats, la robustesse, la constance.

Et Farrell n’offre ni robustesse, ni constance.

S’il n’est pas réclamé au ballottage, il retournera à Laval. Mais même là, il n’aura pas de place garantie.

Et c’est là que l’Europe commence à faire son apparition dans les conversations.

La Finlande. La Suisse. La Suède.

Des terres d’asile pour les petits joueurs brillants, mais trop frêles pour survivre dans les circuits nord-américains.

Farrell n’a que 22 ans. Mais déjà, la LNH s’éloigne comme un mirage. Et la Ligue américaine elle-même commence à lui échapper.

Une génération en train de mourir

Le cas Farrell est révélateur d’un phénomène plus large : celui des espoirs “chouchous” qui ne deviennent jamais ce qu’ils étaient censés être.

Joshua Roy est sur le fil du rasoir. Riley Kidney n’a jamais percé. Jan Mysak est déjà oublié. Et maintenant, c’est Sean Farrell qui tombe.

Kent Hughes ne fait plus dans la dentelle. Il cherche des joueurs robustes, prêts. Il a coupé Joshua Roy. Il a sacrifié Farrell. Et il ne regarde plus en arrière.

L’ère des “petits joueurs cérébraux” semble terminée à Montréal.

Place à la puissance. À la rapidité. Au volume.

Et dans ce nouveau monde, Farrell est un vestige... des nains...

Il y a cinq ans, on rêvait d’un trio Caufield-Suzuki-Farrell. Une attaque de petits génies virevoltants, insaisissables.

Aujourd’hui, Sean Farrell mangera ses repas seul à Laval. Il ne reviendra plus jamais à Montréal.

Pourtant, dans d’autres organisations, ce type de profil, petit, mais créatif, visionnaire, intelligent, est parfois vu comme une pépite à polir, pas comme un rejet.

Si un club plus "gros" que le CH en terme de taille et de méchanceté, osait lui tendre la main… peut-être que Sean Farrell aurait une toute dernière chance. Mais disons que les chances sont aussi petites... que Sean Farrell...

Il est passé de “vol de repêchage” à “ballotté silencieusement, sans un mot”.

Il est devenu un nom sur une liste. Un dossier administratif. Un joueur de la LAH parmi tant d’autres.

Mais dans son cœur, il reste ce jeune homme qui croyait. Qui rêvait du Centre Bell. Qui pensait que son intelligence allait suffire.

La réalité vient de lui donner sa réponse.

Et elle est brutale.