Cauchemar à TVA: un journaliste abandonné en direct

Cauchemar à TVA: un journaliste abandonné en direct

Par David Garel le 2025-07-27
hockey30 tva

C’est l’un de ces moments de télévision que personne ne veut vivre, surtout pas un journaliste d’expérience.

Jean-Nicolas Blanchet, collaborateur régulier de TVA et chroniqueur à Québecor, s’est retrouvé malgré lui au centre d’un malaise télévisuel qui résume à lui seul l’état inquiétant de l’empire médiatique fondé par Pierre Karl Péladeau.

Alors qu’il était en duplex avec le studio pour intervenir en ondes dans un segment d’actualité sur les suites du procès d’Équipe Canada junior, un sujet qu’il connaît bien, lui qui s’est fait le porte-parole de la dénonciation du culte des hockeyeurs, Jean-Nicolas Blanchet a connu un moment de solitude que seuls les techniciens de TVA pouvaient comprendre… et peut-être anticiper.

L’animateur en studio, Yves Poirier, lance poliment une question, attendant la réponse de son collègue en télétravail. Silence. Rien. Aucun son ne parvenait aux oreilles du pauvre Blanchet.

Et là, dans ce vide sonore un peu gênant du côté du journaliste, ce qui ne devait jamais arriver à l’écran survient : Jean-Nicolas Blanchet, croyant probablement son micro fermé, se mouche bruyamment en direct.

@utilisateur125514756

Un journaliste s'est mouché en direct à la télévision avec Yves Poirier à LCN

♬ son original  - utilisateur125514756

Il ne parle pas. Il se mouche. Devant tout le monde. Devant tout le Québec.

Le cauchemar absolu

C’est le cauchemar de tout journaliste moderne. Non seulement la réponse ne part pas, non seulement l’audio ne fonctionne pas, mais voilà qu’une action complètement personnelle, intime, presque animale, est captée en direct par des caméras qui n’avaient aucune pitié.

Et ce n’est pas arrivé à un simple stagiaire. C’est arrivé à Jean-Nicolas Blanchet, celui qui, quelques instant plus tôt, s’en prenait à la culture du hockey dans un texte virulent publié sur les plateformes de Québecor.

Celui qui écrivait que les joueurs de hockey avaient perdu leur aura, leur crédibilité, leur statut d’élite. Celui qui rappelait que, jadis, on leur pardonnait tout, mais qu’aujourd’hui, même leurs moindres travers étaient scrutés à la loupe. Ironie du sort, c’est exactement ce qui s’est produit avec lui, devant des milliers de téléspectateurs.

C’est comme si le karma avait voulu rétablir l’équilibre.

Mais au-delà du moment gênant et des moqueries sur les réseaux sociaux, ce malaise révèle un mal beaucoup plus profond. Ce n’est pas un simple pépin technique. C’est le symptôme d’un système qui craque de partout.

L'empire TVA au complet est en chute libre.

Car ce qui est survenu ce jour-là en dit long sur l’état de TVA. Les erreurs techniques sont devenues si fréquentes qu’on ne les remarque presque plus.

Les plans qui gèlent, les micros qui ne partent pas, les duplex qui ne fonctionnent pas, les bandeaux qui affichent les mauvaises nouvelles… C’est la norme. C’est la routine.

Et à travers cette routine de décadence, on voit des employés comme Jean-Nicolas Blanchet faire de leur mieux avec ce qu’il leur reste : un plateau instable, un support technique anémique, et une direction trop occupée à rêver d’acheter Transat pour s’occuper de la qualité de son réseau d’information.

C’est cruel, mais c’est vrai : plus rien ne va à TVA. Le personnel est démoralisé, les journalistes sont surchargés, les départs s’enchaînent, et les revenus fondent à vue d’œil.

Et maintenant, même l’image de professionnalisme et de rigueur journalistique s’effrite à l’écran.

Ce qui rend ce moment encore plus malaisant, c’est le contexte éditorial dans lequel il survient. Blanchet venait de publier une chronique assassine sur la culture du hockey, dénonçant le comportement passé de certains joueurs, leur statut d’idole, leur égo démesuré, leur impunité.

Mais en se mouchant en ondes, il est lui-même devenu, malgré lui, le protagoniste d’une scène dont les joueurs de hockey ont longtemps été la cible : une erreur humaine tournée en ridicule public.

Et contrairement à eux, il n’avait même pas le filet de sécurité d’une machine médiatique pour le défendre. Au contraire : c’est son propre réseau, affaibli, mal géré, surchargé, qui l’a laissé tomber.

Car le problème, ce n’est pas que Jean-Nicolas Blanchet se soit mouché. Tout le monde se mouche. Le problème, c’est que TVA ne l’a pas protégé. Que le système a failli. Que personne ne s’est assuré que le micro était bien fermé, que le lien était bien établi, que la séquence se déroulerait correctement.

Quand un réseau fonctionne bien, ces choses-là n’arrivent pas.

Mais quand tout s’écroule…

Et pendant que les employés encaissent les malaises, Pierre Karl Péladeau, lui, garde le silence. Trop occupé à se battre pour Transat. Trop concentré sur son rêve de restructuration. Trop éloigné de ce qui a longtemps fait la force de son empire : l’information, le terrain, la télé.

Ce qui s’est passé avec Blanchet n’est qu’un symptôme. Un cri d’alarme. Un rappel que TVA est en train de s’éteindre à petit feu, non pas à cause des journalistes, mais à cause du désintérêt flagrant de son propriétaire.

Et dans cette ambiance sombre, même les meilleurs peuvent flancher. Même les plus rigoureux peuvent craquer. Même les plus éloquents peuvent… se moucher en ondes.

Ce qui devait être un segment d’analyse sérieux est devenu une gifle sonore à la dignité journalistique. Mais pas celle de Jean-Nicolas Blanchet. Celle de TVA. Car c’est le réseau qui est humilié ici, bien plus que l’homme.

C’est tout le système technique, organisationnel, éditorial et humain qui a montré ses failles. Ce n’est pas un éternuement qu’on a entendu : c’est une toux de fin de règne.

Et dans un monde où chaque image compte, où chaque son est scruté, TVA n’a plus le luxe de tels moments de relâchement.

Si elle veut survivre, elle doit se ressaisir. Elle doit redevenir une chaîne capable de protéger ses journalistes, de maîtriser ses directs, de livrer de l’information sans que ses employés deviennent malgré eux des mèmes.

Mais pour ça, il faudra d’abord que quelqu’un en haut daigne lever les yeux pour regarder ce qui se passe à l’écran.

Et en attendant, Jean-Nicolas Blanchet reste seul avec son mouchoir, victime involontaire d’un système qui fait de plus en plus de bruit quand il craque.