C’est le genre de phrase qu’on n’aurait jamais pensé écrire un jour. Carey Price, dans l’uniforme des Sharks de San Jose.
Même si on sait tous qu’il ne disputera plus un seul match dans la LNH, l’image frappe comme un uppercut.
Les partisans de Montréal l’ont rêvé, les partisans de San Jose l’ont imaginé, et aujourd’hui, avec la transaction qui a expédié son contrat en Californie, le fantasme a pris vie.
Les réseaux sociaux se sont enflammés.
Des montages de Price dans un chandail sarcelle circulent partout, provoquant autant de rires nerveux que de pincements au cœur.
Après près de 20 ans d’association indéfectible entre le gardien et le CH, voir son nom collé à un autre logo semble presque blasphématoire.
Et pourtant, la réalité est bien là : Carey Price est désormais officiellement un joueur des Sharks. Du moins, sur papier.
Les partisans ne s’y trompent pas.
Ils savent très bien que Price ne mettra pas les jambières à San Jose.
Mais ça ne les empêche pas de jouer le jeu. « Imaginez juste deux secondes Price devant le filet des Sharks… » écrivait un fan sur X, déclenchant une avalanche de commentaires ironiques.
Certains riaient de voir “Jesus Price” dans une équipe qui patauge depuis des années. D’autres, plus émotifs, admettaient que ça faisait mal de le voir sous d’autres couleurs, même pour rire.
Le contraste est brutal.
D’un côté, Montréal qui efface lentement mais sûrement l’héritage Price, allant jusqu’à changer le logo au centre de la glace du Centre Bell, comme pour tourner la page.
De l’autre, San Jose, qui hérite du contrat comme d’un trophée encombrant, mais qui, pour quelques heures, savoure l’attention médiatique en imaginant Price en requin.
Une ironie parfaite : le gardien qui a incarné l’élégance et la stabilité dans un club chaotique, maintenant projeté dans une franchise qui cherche désespérément à se réinventer.
Et puis, il y a eu la sortie de Marc-Édouard Vlasic.
L’ex-défenseur des Sharks, racheté cet été après une longue carrière dans la baie, n’a pas manqué l’occasion de réagir.
Sur X, il a lancé avec humour : « On s’est manqué de peu, mon chum », en référence à leur complicité lors des Jeux olympiques de Sotchi en 2014, quand ils avaient décroché l’or ensemble sous les couleurs du Canada.
Un clin d’œil nostalgique qui a fait sourire bien des fans, rappelant que Price, même loin de la glace, garde des liens profonds avec ceux qui ont partagé son parcours.
Pour comprendre pourquoi cette transaction, qui n’est au fond qu’une opération comptable, fait tant réagir, il faut replonger dans le parcours de Carey Price.
Drafté cinquième au total en 2005, le gardien venu d’Anahim Lake, en Colombie-Britannique, a rapidement été présenté comme le sauveur du Canadien.
Le “franchise goalie”. Celui qui devait ramener la Coupe Stanley à Montréal.
Pendant un temps, il a porté cet espoir sur ses épaules comme peu d’athlètes l’auraient fait. Saison 2014-2015 : Hart Trophy, Vézina, Ted Lindsay, William M. Jennings.
Une domination totale, digne des plus grands. Le meilleur gardien du monde, point final.
Mais voilà : le genou. Cette maudite blessure qui l’a frappé au pire moment, alors qu’il avait encore la trentaine devant lui.
On le répète souvent, les gardiens vieillissent mieux que les attaquants.
Ils peuvent tenir jusqu’à 38, 39, parfois 40 ans.
Carey Price, lui, a vu son corps l’abandonner en plein cœur de sa gloire.
Comme un mauvais sort.
Une carrière qui aurait pu se prolonger jusqu’à 2022, 2023, 2024… s’est éteinte brutalement après la finale de 2021.
Ironie cruelle : il était encore assez fort pour pousser son équipe jusqu’au dernier chapitre, mais plus capable de tenir la distance après.
Voilà pourquoi cette transaction prend une telle dimension symbolique.
Parce que ce n’est pas juste un contrat. C’est l’ombre d’une carrière brisée par la malchance. C’est l’écho d’un joueur qui aurait dû, qui aurait pu, marquer son époque encore davantage.
Et c’est pour ça que l’image de Price dans un chandail des Sharks fait réagir : elle confronte les fans à tout ce qui aurait pu être, et à tout ce qui ne sera jamais.
San Jose n’a pas acquis un gardien. Ils ont acquis une relique.
Un morceau d’histoire vivante. Un poids comptable, certes, mais aussi un symbole qui dépasse la simple logique des chiffres.
L’affaire, en réalité, illustre parfaitement la froideur de la LNH.
Derrière les émotions, il y a la business. Hughes voulait libérer de l’espace.
Les Sharks voulaient absorber un contrat pour obtenir un choix.
Et le reste, ce sont des colonnes Excel.
Mais le hockey, surtout à Montréal, n’est jamais qu’une question d’Excel.
C’est une question de mythes, d’attachements, de fantômes.
Carey Price est un fantôme qui continue de hanter le Centre Bell, même depuis la Californie.
Et c’est ça qui est le plus troublant dans cette histoire : la capacité de Price à dominer l’actualité sans même jouer.
Pas un arrêt, pas une conférence de presse, pas un mot public.
Juste son nom, associé à un chandail qui n’est pas le sien, et tout le Québec s’enflamme.
On débat, on commente, on rit, on pleure. C’est le pouvoir des légendes.
Alors oui, ce montage de Price en uniforme des Sharks, c’est bizarre.
Mais c’est aussi révélateur. Révélateur d’une carrière trop courte, d’un héritage trop lourd, et d’une émotion collective qui refuse de s’éteindre.
Price ne sera jamais un Shark
Mais pour quelques heures, il l’a été dans l’imaginaire. Et c’est suffisant pour rappeler à quel point son ombre reste immense.
Carey Price, dans l’uniforme des Sharks.
Un mirage. Un gag. Un rêve.
Mais surtout, un rappel brutal : même quand il ne joue plus, il est encore capable de faire trembler le monde du hockey.
Hahaha...