Coup de circuit de Kent Hughes: il déniche le nouveau Pavel Datsyuk

Coup de circuit de Kent Hughes: il déniche le nouveau Pavel Datsyuk

Par David Garel le 2025-10-29

Montréal n’avait peut-être pas prévu que la plus grande surprise russe de l’automne viendrait de la KHL, mais Ivan Demidov, lui, le savait.

Quelques heures après le repêchage 2025, la nouvelle sensation du Canadien avait glissé une phrase passée inaperçue :

 « Zharovsky, c’est un centre naturel. Vous verrez. » 

Trois mois plus tard, les faits lui donnent raison. Viktor Kozlov, entraîneur du Ufa Salavat Yuyalev (Oufa), a pris une décision audacieuse : déplacer le jeune Aleksandr Zharovsky au centre du troisième trio. Et depuis, tout ce qu’il touche se transforme en or.

Mercredi, Oufa affrontait Vladivostok. Une rencontre banale en apparence, mais qui a confirmé la transformation du jeune espoir du CH.

Zharovsky a récolté trois points en 16 minutes de jeu : une mention d’aide sur le jeu de puissance, une autre sur un effort acharné après une mise au jeu perdue, et un but chanceux, dévié sur un défenseur.

Chanceux, peut-être, mais révélateur de son instinct : toujours présent dans les bons espaces, toujours prêt à transformer un jeu mort en occasion.

Résultat : une victoire de 6 à 1, et un joueur qui s’impose lentement comme une pièce maîtresse de son club. À 18 ans seulement, Zharovsky affiche une moyenne d’un point par match (4 buts, 8 passes en 12 rencontres). Il est deuxième meilleur pointeur chez les joueurs de moins de 20 ans dans toute la KHL, derrière Yegor Surin des Predators de Nashville.

Mais il surpasse tous ses rivaux quand on parle de moyenne de points par match. Le Canadien n’a pas seulement repêché un talent : il a mis la main sur un prodige.

Sur un centre… qui ne devait pas en être un.

C’est là que tout devient fascinant. À Oufa, Viktor Kozlov avait d’abord juré que le jeune Russe allait débuter à l’aile gauche.

Trop jeune, trop léger, disaient les recruteurs. Ses 6 pieds 1, mais à peine 163 livres, semblaient trop fragiles pour affronter des centres adultes au gros gabarit. Pourtant, depuis qu’on lui a confié la position de centre, Zharovsky s’épanouit.

Il contrôle le tempo, ralentit le jeu, dicte les entrées de zone. Il gagne même des mises au jeu importantes, une facette pourtant étrangère à son répertoire il y a encore six mois.

Kozlov a confié après la rencontre que « le jeune comprend mieux que quiconque comment se placer entre la rondelle et son adversaire », signe qu’il a déjà intégré les automatismes du rôle.

C’est ici qu’entre en scène Ivan Demidov. Ami d’enfance de Zharovsky, il l’a côtoyé dès l’âge de huit ans dans les ligues mineures russes.

Les deux ont grandi ensemble, ont passé leurs étés à s’entraîner dans la même patinoire d’Oufa, et ont développé une chimie que leurs entraîneurs qualifient encore aujourd’hui d’« instinctive ».

Ivan Demidov affirme même qu'il fait de la télépathie avec celui qu'il considère comme un frère.

Quand Montréal a sélectionné Zharovsky au 34e rang du repêchage, Demidov n’a pas tardé à célébrer sur les réseaux sociaux : 

« On va enfin jouer ensemble ! »

Et le documentaire La Reconstruction nous a ensuite appris que c'est Demidov qui a convaincu Hughes de sélectiionner son "chum".

Mais ce que peu de gens savaient, c’est qu’à ses yeux, son ami n’a jamais été un ailier. Pour lui, Zharovsky a toujours été un centre de création, un passeur et surtout un cerveau du jeu. Et il n’avait pas tort : depuis qu’il occupe cette position, ses statistiques explosent.

Ses 12 points en 12 matchs ne disent pas tout. Il touche la rondelle plus souvent, il génère des occasions de tir, et il élève le niveau de ses compagnons de trio.

À Vladivostok, il a été impliqué directement dans quatre des six buts, même si la feuille de match n’en comptait que trois à son nom. Son entraîneur Kozlov a d’ailleurs déclaré : 

« Il joue comme un vétéran. Il anticipe le jeu mieux que certains trentenaires. »

Dans sa manière de manœuvrer, Zharovsky rappelle un autre Russe adoré des puristes : Pavel Datsyuk. Même posture basse, même habileté à feinter sans effort, même capacité à se faufiler dans les angles morts. Et ce n’est pas un hasard : Zharovsky l’a avoué lui-même:

« J’admire Datsyuk et Kucherov. Deux cerveaux sur patins. »

Le parallèle n’est pas exagéré. Comme Datsyuk à ses débuts à Détroit, Zharovsky compense son manque de masse par une intelligence supérieure.

Ses feintes, ses angles de passes et son sens du timing rappellent cette école russe du hockey qui privilégie la vision sur la puissance. Et cette philosophie s’intègre parfaitement dans le projet Kent Hughes à Montréal, où la finesse technique reprend le dessus sur le jeu nord-américain traditionnel.

Dans les bureaux du Canadien, on suit son développement avec fascination. Martin St-Louis et Jeff Gorton savent que leur joyau Demidov aura besoin, tôt ou tard, d’un partenaire à sa hauteur au centre.

Et si ce partenaire venait de sa propre ville natale ? Ce n’est plus un rêve lointain. Zharovsky et Demidov se parlent presque chaque jour, s’échangent des vidéos de leurs matchs, se donnent des conseils techniques.

Leur plan commun est clair : jouer ensemble à Montréal. Et de plus en plus de recruteurs russes estiment que ce duo pourrait recréer une dynamique à la Panarin–Kuznetsov ou même à la Kucherov–Point dès 2027 : un duo russo-offensif, complémentaire, où le centre lit le jeu pendant que l’ailier finit les pièces.

Pour le Canadien, ce scénario est en or. Zharovsky est un choix de 2e ronde équivalent à un premier choix top 10.

Son contrat KHL expire à la fin de la saison 2026-2027, et il manifeste déjà son désir de venir en Amérique. Dans son entrevue accordée à TVA Sports, il a lancé un « Bonjour ! Enchanté ! » en français, un geste charmant qui a conquis les partisans.

« C’est mon rêve de jouer pour Montréal. » 

Ce n’est pas une phrase apprise par cœur. C’est une promesse.

Les observateurs russes sont unanimes : Zharovsky est en train de « percer le mur » de la KHL. À 18 ans, il a déjà un rôle stable, du temps de jeu en avantage numérique et la confiance de son coach. Kozlov a expliqué qu’il voulait « tester sa résistance au centre » et qu’il n’a « jamais vu un joueur s’adapter aussi vite à cette position ».

Le plus impressionnant ? Son intelligence défensive. Alors qu’il était souvent critiqué pour ses replis hésitants l’an dernier, il montre désormais une maturité rare.

Il récupère les rondelles, coupe les lignes de passes et se sert de son patinage pour étirer les défenses. Même dans un système fermé comme celui d’Oufa, il parvient à créer du spectacle.

Pour les partisans du CH, le cas Zharovsky est plus qu’un simple développement de "prospect" : c’est une histoire de continuité. Demidov est déjà la sensation qu’on attendait. Et voilà que son meilleur ami d’enfance, celui qui parlait avec lui de Montréal à huit ans, devient lui aussi une étoile montante.

Dans les coulisses, plusieurs joueurs russes de la KHL évoquent déjà le « Montréal Connection » entre les deux jeunes, persuadés qu’ils finiront côte à côte dans la LNH.

Kent Hughes ne cache pas qu’il voit dans Zharovsky « un futur complément naturel à Demidov ». Son sens du jeu, sa vision périphérique et sa capacité à transporter la rondelle sur 200 pieds font de lui un prototype parfait pour le jeu de possession que Martin St-Louis veut instaurer.

Ce qui se passe actuellement en Russie est bien plus qu’un simple feu de paille. Aleksandr Zharovsky n’est pas seulement en train de progresser : il est en train de se transformer.

De jeune ailier prometteur à centre complet, de joueur discret à leader offensif, il change de dimension, exactement comme son meilleur ami avant lui.

Ivan Demidov l’avait vu venir avant tout le monde. Et si la prophétie se poursuit, Montréal pourrait bientôt voir renaître sur sa glace un duo russe digne des plus grandes époques du hockey créatif.

Pincez-nous quelqu'un... on croit rêver...