Le cirque médiatique montréalais n’a jamais manqué de personnages plus grands que nature, mais rarement un chroniqueur aura incarné à ce point l’obsession de l’excès que Jean-Charles Lajoie.
Pendant un an, il a été l’ombre malveillante planant au-dessus de Martin St-Louis, multipliant les prédictions apocalyptiques, insistant sur la démission imminente, allant même jusqu’à évoquer la dépression et l’épuisement psychologique de l’entraîneur.
Il n’y a pas si longtemps encore, il répétait à qui voulait l’entendre que la fin était proche, que le coach du Canadien n’avait ni la carrure ni la stratégie pour mener un club en reconstruction vers des jours meilleurs.
Et voilà qu’aujourd’hui, en un virage digne d’un cascadeur désespéré, Jean-Charles Lajoie annonce sans rire que le Canadien de Montréal va… faire la finale de la Coupe Stanley.
Un retournement de situation qui frise la caricature, mais qui en dit long sur l’état de panique dans lequel se trouve l’animateur de TVA Sports.
Car ne nous leurrons pas : l’homme sait que son émission vit ses derniers instants. Le Québec sportif ne lui a jamais pardonné sa « primeur » ratée de l’an passé, lorsqu’il avait balancé à l’antenne que Martin St-Louis était sur le point de démissionner.
Une bombe qui s’est révélée totalement fausse, qui a ridiculisé son auteur et qui a érodé le peu de crédibilité qu’il lui restait auprès d’un public saturé de ses envolées sensationnalistes.
Aujourd’hui, ce même Lajoie tente de se racheter, de sauver les meubles, de faire oublier ses errements passés. Mais sa soudaine conversion à l’optimisme béat laisse un goût amer : est-ce la voix d’un analyste éclairé ou le cri de détresse d’un homme qui sent le couperet tomber ?
Quand Jean-Charles Lajoie regarde la caméra et annonce, le regard grave, que le Canadien sera finaliste de la Coupe Stanley cette saison, on peine à retenir un éclat de rire.
Comment croire cet homme qui, il y a encore quelques mois, martelait que l’organisation devait couper les ponts avec son entraîneur, que St-Louis n’était pas taillé pour Montréal, et que le club risquait de s’effondrer sous le poids de la pression ?
Comment accorder le moindre crédit à ce nouveau discours triomphaliste quand il est prononcé par le même qui, semaine après semaine, enfonçait le clou de la médiocrité et annonçait la catastrophe ?
Les raisons de ce virage sont faciles à deviner. D’abord, les rumeurs persistantes de fin d’émission. TVA Sports se délite, les droits télé se redessinent, et TVA Sports peine à s’imposer dans le paysage.
Jean-Charles Lajoie n’est plus l’attraction qu’il a été, il le sait. Ses patrons lui ont fait sentir que ses frasques et ses sorties improvisées nuisent davantage qu’elles ne rapportent.
On l’a averti : il est temps de corriger le tir, de remonter dans l’opinion, de redevenir un « ami du peuple ». Et quelle meilleure stratégie, dans une province où le CH est une religion, que de se poser en nouveau prophète de la gloire ?
Il ne faut pas oublier que Jean-Charles Lajoie traîne déjà derrière lui un lourd passif avec les régions du Québec, et cette cicatrice n’est pas près de se refermer.
On se souvient de ce tweet incendiaire publié en pleine pandémie, puis rapidement effacé après l’indignation générale.
Fidèle à son franc-parler, JiC avait craché son mépris en toutes lettres :
« Les imbéciles heureux en région qui ne se sentent pas concernés par la crise #COVID19quebec et qui réclament le déconfinement et la relance économique, je vous méprise. Votre JE avant le NOUS. Que seriez-vous sans l’apport inestimable de la grande région de MTL COLLECTIVEMENT? »
Une sortie qui a fait l’effet d’une bombe et qui lui a valu une vague de haine durable dans l’ensemble du Québec rural, où ses propos sont encore brandis comme la preuve de son arrogance et de son mépris pour tout ce qui n’est pas Montréal.
Même s’il a fini par s’excuser, le mal était fait : dans la mémoire collective, Lajoie est demeuré celui qui a insulté les régions au moment le plus sensible, révélant un mépris de classe qui colle encore à sa réputation et qui alimente aujourd’hui la méfiance généralisée à son égard.
Ce qu’on voit à travers ce pronostic insensé du CH en finale, ce n’est pas la vision d’un analyste éclairé, c’est la panique d’un homme qui sent que son micro lui échappe.
Jean-Charles Lajoie ne parle plus pour informer, il parle pour survivre. Son discours est moins une analyse qu’un acte désespéré, un dernier coup de poker médiatique.
Après avoir joué le rôle du fossoyeur de Martin St-Louis, il se costume aujourd’hui en messie du Canadien. Mais les partisans n’oublient pas. On se souvient de ses sarcasmes, de ses métaphores cruelles, de ses envolées où il dépeignait St-Louis comme un coach dépassé, pris « culottes baissées » devant ses propres joueurs.
On se souvient de ses rires acides lorsque les défaites s’accumulaient. Et on se souvient surtout de cette annonce catastrophique d’une démission imminente, lancée comme une vérité, alors qu’il ne s’agissait que d’un bruit de vestiaire amplifié à outrance.
Depuis ce fiasco, Jean-Charles Lajoie n’a jamais regagné la confiance du public. Sur les réseaux sociaux, son nom est devenu synonyme de « mauvais scoop ».
Dans les tribunes du Centre Bell, on le cite souvent pour rire, comme l’exemple de l’analyste qui se trompe toujours. Même au sein du milieu journalistique, il est isolé.
Ses collègues, parfois eux aussi adeptes de formules chocs, se tiennent désormais à distance, craignant d’être éclaboussés par ses excès. Ce qui reste, c’est un homme seul, enfermé dans son studio, multipliant les déclarations extrêmes comme un boxeur vieillissant qui jette ses derniers crochets dans le vide.
Alors, quand il affirme aujourd’hui que le Canadien atteindra la finale de la Coupe Stanley, il ne convainc personne. Il fait sourire, il amuse, mais il n’impose plus rien.
Et surtout, il trahit sa propre incohérence. Comment passer du tout au tout sans perdre le peu de crédibilité qui reste ? Comment expliquer qu’on ait pu voir hier la déchéance totale et aujourd’hui la gloire éternelle ?
Pour justifier son nouvel enthousiasme, Jean-Charles Lajoie s’accroche à la blessure d’Aleksander Barkov, le centre étoile des Panthers de la Floride.
Selon lui, cet incident ouvre une brèche dans l’Est, offrant au Canadien la possibilité de s’y engouffrer et de filer vers la finale. Mais l’argument est fragile.
Croire que l’absence d’un seul joueur adverse propulsera le Canadien en finale, c’est de la magie de pacotille, pas de l’analyse. C’est du Jean-Charles pur jus : une prophétie spectaculaire, mais vide de substance.
Derrière cette sortie, on devine la stratégie : se réconcilier avec les partisans, apparaître soudain comme celui qui croyait au CH quand tous doutaient.
Si jamais le Canadien réussissait une saison miracle, Lajoie serait le premier à rappeler sa prédiction, à brandir son micro comme une coupe imaginaire, à répéter qu’il avait vu juste.
Et si, comme il est plus probable, le CH cale en première ronde ou manque les séries, il aura toujours l’excuse de la blessure, du manque d’expérience, du destin capricieux. Dans tous les cas, il sortira son sempiternel « je vous l’avais dit ».
Mais les gens ne sont plus naïfs. Le public québécois est passionné, mais pas idiot. Il sait reconnaître un virage de panique, une tentative maladroite de sauver une carrière en chute libre. Jean-Charles Lajoie ne convainc plus ; il amuse, il irrite, mais il ne fédère pas.
Au fond, ce revirement n’est pas seulement celui d’un analyste qui change d’avis. C’est le signe d’un homme arrivé au bout de son cycle médiatique.
Pendant des années, Lajoie a joué sur la corde de l’excès, du scandale, de la déclaration plus grosse que nature. Ça a fonctionné, un temps. Mais à force de tirer sur l’élastique, il a fini par le briser.
Aujourd’hui, il paie le prix de ses outrances. Ses patrons le savent, ses collègues le voient, et lui-même, probablement, le sent. Ce qu’il reste à l’antenne, ce sont des soubresauts, des coups d’éclat désespérés.
Alors, que restera-t-il de Jean-Charles Lajoie ? Un homme qui a tenté de brûler Martin St-Louis sur la place publique, avant de se présenter comme son défenseur.
Un chroniqueur qui a bâti sa carrière sur le choc des mots, mais qui n’a jamais su bâtir la moindre cohérence dans ses analyses. Voilà pourquoi le public l'a abandonné.
Un animateur qui, dans un ultime accès de panique, annonce que le Canadien atteindra la finale de la Coupe Stanley, non pas parce qu’il y croit, mais parce qu’il n’a plus rien d’autre à offrir.
Au bout du compte, le public jugera. Mais déjà, une impression domine : celle d’un homme qui s’agite pour ne pas sombrer, qui crie pour couvrir le silence qui s’installe autour de lui. Jean-Charles Lajoie n’est plus le chroniqueur qu’il a voulu être.
Il est devenu le clown triste d’un cirque médiatique qui, lui, continue de tourner...