500 000 dollars: Lane Hutson répond à Jeff Gorton

500 000 dollars: Lane Hutson répond à Jeff Gorton

Par David Garel le 2025-08-03

Nous sommes à l’aube d’un moment charnière dans l’histoire récente du Canadien de Montréal.

Une négociation tendue, une guerre psychologique... sur le point de se terminer.

D’un côté, Lane Hutson, génie offensif de 21 ans, lauréat du trophée Calder, enfant prodige de la nouvelle génération. De l’autre, l’organisation du CH, menée par le tandem Kent Hughes–Jeff Gorton, bien décidée à ne pas faire exploser son écosystème salarial.

Et entre les deux, un écart minuscule, mais lourd de conséquences : 500 000 $ par année.

Le clan Hutson serait prêt à signer 80 millions pour 8 ans, soit 10 M$ par année, pendant que le CH est monté jusqu’à 9,5 M$, égalant le contrat de Noah Dobson.

C’est une différence de 4 millions sur l’ensemble du pacte. Une distance qui, à première vue, semble franchissable… mais qui a tout d’un champ de mines.

Pour le Canadien, le contrat de Noah Dobson n’est pas seulement une signature : c’est une arme pour le clan Hutson.

un plafond symbolique. Dobson, défenseur droitier de 25 ans, dans son prime, a accepté 9,5 M$ pour 8 ans. Une aubaine relative dans un marché inflationniste.

Alors comment justifier de payer plus cher un défenseur plus jeune, moins expérimenté, et, dans l’esprit de certains dirigeants, encore en phase de développement?

C’est la question que pose Jeff Gorton, le stratège froid, qui a décidé d’intervenir personnellement dans ces négociations, un fait rare, puisque les contrats sont normalement la chasse gardée de Kent Hughes.

Mais Gorton a été clair : pas question de donner 10 M$ à Hutson.

Il l’avait même annoncé lors d’une entrevue plus tôt cet été :

« Les agents argumentent toujours avec les pourcentages. Le plafond monte, donc eux, ils veulent monter aussi. Mais nous, on doit gérer un vestiaire. On doit expliquer pourquoi un gars gagne plus qu’un autre. Et ça, c’est réel. »

« Les agents, ils aiment ça. C’est comme ça qu’ils s’accrochent. Le plafond monte, et là, c’est le pourcentage, le pourcentage, le pourcentage. Mais en même temps, eux, ils n’ont pas à gérer une équipe.

« Ils ne sont pas dans le vestiaire, ils ne comprennent pas ce que ça fait quand un gars revient dans la chambre avec beaucoup plus d’argent qu’un autre… comment tu expliques ça? »

Ce n’est pas un détail. Car ce message, il visait Sean Coffey, l’agent de Lane Hutson, et son obsession de faire de son client le défenseur le mieux payé de l’histoire du Canadien.

Et Coffey ne s’en cache pas. Dans son esprit, son joueur vaut plus que Dobson. Et surtout : il vaut plus qu’un simple rabais maison. Il a gagné le Calder. Il a obtenu 66 points en 82 matchs.

Il a terminé 7e chez les défenseurs de toute la LNH en production. Il a reçu un vote de 3e place pour le Norris, à sa première année dans la grande ligue.

Et pendant que certains cadres de la LNH comme Evan Bouchard (10,5 M$ sur 4 ans) ou Alexander Romanov (6,25 M$ sur 8 ans) signent des contrats mirobolants, Coffey voit les chiffres grimper. Et il en veut une part.

Mais la direction du CH, elle, veut préserver son équilibre interne. Suzuki à 7,875 M$. Caufield à 7,85 M$. Slafkovsky à 7,6 M$. Dobson à 9,5 M$. Guhle à 5,5 M$. Si Hutson obtient 10 M$, comment expliquer ce déséquilibre dans le vestiaire?

Comme le souligne Elliotte Friedman dans son balado 32 Thoughts, toute la LNH est en mode attente stratégique. Personne ne veut signer le premier gros contrat avant de connaître les chiffres de Connor McDavid et Kirill Kaprizov, deux joueurs qui devraient redéfinir le marché avec des ententes qui flirteront avec les 15 M$ (Kaprizov) à 17 M$ (McDavid) par saison. 

« Je crois que nous traversons une période de réinitialisation des contrats. Les équipes et les joueurs ne sont pas encore assez confortables pour dire: “C’est là qu’on s’en va.” » affirme Elliotte Friedman.

Alors imaginez la position de Coffey. Il le sait. Il sait que le marché est sur le point de basculer. Et il ne veut surtout pas figer son client à un prix « d’avant l’explosion ».

Voilà pourquoi il exige le fameux 10 M$. Il veut passer à l’histoire. Il veut graver son nom à côté de celui de Matthews, Fox, MacKinnon. Il veut prouver que Lane Hutson n’est pas juste un bon joueur. C’est un joueur générationnel de la nouvelle ère.

Et si les deux camps n’arrivent pas à s’entendre? La pire issue pour Kent Hughes serait de voir Coffey proposer à Hutson un contrat de transition, comme l’a fait Auston Matthews à Toronto.

Un contrat de 4 ou 5 ans, très lucratif, mais qui mènerait Hutson vers l’autonomie à 25 ans… moment où il pourrait réclamer 12, voire 13 M$ par année.

Hughes ne veut pas de ça. C’est maintenant ou jamais pour verrouiller un joueur-clé à long terme sous l’ancienne convention collective, avant que le CBA change (ce qui est prévu après la saison 2025-26).

C’est ce qui explique pourquoi le CH est monté à 9,5 M$. Un geste d’ouverture. Une reconnaissance de la valeur du joueur.

Mais Coffey, lui, ne bouge pas. Il reste campé sur ses positions. Et Gorton refuse de céder à la pression.

Nous sommes à 500 000 $ de la paix, mais c’est une guerre totale. Une guerre psychologique. Une guerre de patience.

Un signal pour les autres agents?

Car attention. Ce contrat est aussi un précédent.

Parce que si Hutson signe à 10 M$, Ivan Demidov regardera ça de près. Son agent, Dan Milstein, ne rate jamais une occasion d’en tirer profit. 

C’est exactement pourquoi Jeff Gorton est intervenu. Pas pour sauver 500 000 $. Pour préserver une certaine hiérarchie salariale.

Mais ironiquement, la hiérarchie a explosé parce qu'elle est née d’une autre signature : celle de Noah Dobson.

Et c’est là tout le paradoxe.

La signature de Noah Dobson à 9,5 M$ par année, pour 8 ans, est peut-être la meilleure transaction de Kent Hughes depuis qu’il est en poste. 

Elle a permis de stabiliser la défense, d’amener un vrai quart-arrière sur la droite, de solidifier le top 4 avec Hutson, Guhle et Carrier.

Mais voilà que cette même signature devient un boulet dans les négociations avec Hutson. Parce qu’en fixant une barre salariale claire, Hughes s’est mis lui-même dans un coin.

Et aujourd’hui, il est coincé : soit il garde sa ligne dure et risque de perdre Hutson à long terme, soit il cède, et brise son plafond non écrit.

Selon plusieurs sources, les négociations sont à un point de rupture. Une décision pourrait tomber dans les prochaines semaines. Soit le clan Hutson accepte de dire adieu à 4 millions de dollars sur 8 ans, soit on trouve un terrain d’entente à 9,75 M$ par année.

Mais le CH, qui voulait signer Hutson à 9 M$ par année étalés sur 8 ans, ont accepté de monter à 9,5 M$ par année.

Est-ce que le clan Hutson voudra aider la situation en acceptant de ne pas toucher le 10 M$ par année?

Tous les scénarios seraient sur la table.

On ne parle plus de chiffres.

On parle de fierté.

On parle de principes.

On parle de hiérarchie, de perception, de pouvoir.

Et tout ça, pour 500 000 $.

Un demi-million qui pourrait redessiner l’avenir du Canadien de Montréal.