50 000 dollars de la honte: les sueurs froides de Samuel Montembeault

50 000 dollars de la honte: les sueurs froides de Samuel Montembeault

Par Marc-André Dubois le 2025-04-17

Parmi les héros silencieux de la saison 2024-2025 du Canadien de Montréal, Samuel Montembeault s’impose sans contredit comme l’un des piliers ayant porté cette jeune équipe jusqu’à une qualification surprise en séries éliminatoires.

Mais derrière cette grande réussite sportive se cache une réalité beaucoup plus cruelle : l’homme le plus perdant dans l’ombre du succès de Montembeault n’est autre que son propre agent, Paul Corbeil.

Et c’est triste à dire, mais au moment même où Montembeault est sur le point d’amorcer une série contre les Capitals de Washington, il traîne au pied une entente salariale qui fait frissonner les observateurs les plus aguerris.

Un contrat de trois saisons, à 3,15 millions par année. Un pacte signé trop tôt, trop modestement, avec trop peu d’anticipation sur le potentiel réel du gardien québécois.

Renaud Lavoie a été cinglant aujourd'hui à TVA Sports :

« Il est deuxième dans la Ligue nationale pour la fiche, une fiche victorieuse de 13 victoires depuis le 22 février. Il y a un autre gardien qui en a plus que lui, il s’appelle Andrei Vasilevskiy. »

Voilà. On ne parle plus ici d’un simple gardien de soutien. Montembeault est dans la discussion sérieuse pour les meilleurs portiers de la deuxième moitié de saison dans la LNH. Et pourtant, il est payé comme un gardien auxiliaire.

Son pourcentage d’efficacité depuis la pause du tournoi des 4 Nations est de .912, bon pour le 7e rang de la ligue, avec une moyenne de buts alloués de 2,48, tout aussi admirable.

À l’heure où ses homologues de même niveau négocient des contrats de cinq à six millions par année, Montembeault doit se contenter de 3,15 millions bruts… en jouant plus de 60 matchs cette saison.

Ce n’est pas une exagération. Il est l’un des gardiens les plus sollicités de la ligue. Et dans un marché comme Montréal, cela ne pardonne pas.

Prenons un instant pour comparer. Charlie Lindgren, celui-là même que le Canadien avait laissé filer sans trop de regrets il y a quelques années, est aujourd’hui le deuxième gardien des Capitals de Washington.

Il a disputé 39 matchs cette saison. Résultat ? Un contrat de 3 millions par année. Si l’on fait le calcul, cela représente 76 900 $ par match joué.

Montembeault ? En disputant 62 matchs cette saison, cela lui revient à 50 800 $ par match. La différence fait mal au portefeuille.

Et que dire de Logan Thompson, le gardien des Golden Knights ? Il va empocher 5,85 M$ par année jusqu'en 2031. Sauf qu’il a été blessé pendant une bonne partie de la saison. Il est toujours blessé d'ailleurs et n'a joué...que 43 matchs...

Pendant que Montembeault tenait le fort à bout de bras dans l’un des marchés les plus durs au monde, les gardiens des Capitals, adversaire du CH en première ronde, sont moins utilisés mais empilaie les chèques.

Ce contrat-là est une claque au visage. Une claque pour Montembeault… mais surtout une humiliation pour son agent, Paul Corbeil. à

Comment expliquer qu’un agent ait pu laisser passer une telle opportunité ? Comment se fait-il qu’on ait accepté de figer le potentiel d’un gardien en pleine ascension à un prix aussi bas ?

Peut-être croyait-on, à tort, que Montembeault ne franchirait jamais ce fameux cap de la régularité. Peut-être doutait-on de sa constance. Mais aujourd’hui, les faits sont là. Montembeault a éclaté.

Même Jean-Charles Lajoie l’a souligné cette semaine :

« Montembeault, vraiment, c’est une année de la grande éclosion. »

Tous les signaux étaient présents. Tous. Et pourtant, l’agent Corbeil a donné un contrat d’un gardien de soutien à un homme qui allait porter le flambeau du Tricolore jusqu’en séries éliminatoires.

Et ça, Kent Hughes le savait. C’est là où l’histoire devient fascinante. Le directeur général du Canadien a flairé la bonne affaire.

Il a vu venir la montée en puissance de son gardien. Et il l’a signé au bon moment. Pas pour récompenser la grandeur du joueur, non.

Pour l’obtenir à rabais. Il a joué son rôle à la perfection : offrir la sécurité à court terme au joueur, tout en protégeant la flexibilité salariale de l’équipe.

C’est son travail. Mais celui de Paul Corbeil, c’était de s’assurer que son client ne devienne pas le gardien le plus sous-payé de la ligue. Et il a échoué.

Pire encore : ce contrat bloque Montembeault à un âge critique. À 28 ans, il est en pleine force de l’âge. Mais à la fin de son contrat, il aura 31 ans. Il n’aura probablement plus cette fiche miraculeuse de 13-3-3 en fin de saison.

Il ne sera plus aussi attirant pour les autres équipes. Il aura manqué sa chance de signer LE contrat de sa vie. Parce qu’au fond, c’était maintenant ou jamais.

Et pendant que Montembeault s’échine à prouver qu’il est l’homme de la situation, le débat au Québec continue : est-il un vrai numéro un ?

Faudra-t-il le remplacer par Jacob Fowler dans deux ans ? Peut-on faire confiance à Dobes ? À la moindre contre-performance en séries, les critiques vont tomber. On ne lui pardonnera rien. Mais ceux qui devraient s’en vouloir, ce sont ceux qui l’ont mis dans cette situation.

Paul Corbeil, en tête de liste.

Et ce n’est pas tout. Montembeault, malgré cette pression, malgré ce salaire de misère, reste un coéquipier exemplaire.

Il a accueilli Ivan Demidov comme un petit frère, comme il l’avait fait pour Lane Hutson et Jakub Dobes avant lui. Il est le ciment invisible de cette équipe.

Il joue les grands frères. Il console, il encourage, il encadre. Il fait tout ça… pendant qu’il arrête des rondelles à un rythme de Vezina. Mais il est payé comme un gardien d’appoint.

Renaud Lavoie l’a dit avec émotion :

« Quand Samuel Montembeault joue comme ça, tes chances de gagner sont toujours très grandes. »

On parle d’un joueur indispensable, mais traité comme un joker interchangeable dans la structure salariale de l’équipe.

Et c’est ça qui fait mal.

Ce n’est pas juste une mauvaise évaluation. C’est un crime professionnel. Paul Corbeil ne pourra pas dire qu’il ne savait pas.

Il ne pourra pas dire que les signes n’étaient pas là. Il avait sous la main un joueur adoré, performant, résilient. Un joueur qui allait faire taire les critiques et faire vibrer Montréal.

Mais il a laissé filer sa chance.

Et maintenant, à chaque arrêt, à chaque victoire, à chaque série de statistiques éblouissantes, c’est Kent Hughes qui sourit.

Et Paul Corbeil qui s’efface.