450 000 dollars au ballottage: c’est la fin de Rafaël-Harvey Pinard

450 000 dollars au ballottage: c’est la fin de Rafaël-Harvey Pinard

Par David Garel le 2025-10-04

On y est. Le couperet est tombé. Les Penguins de Pittsburgh ont officiellement soumis Raphaël Harvey-Pinard au ballottage.

Il ne restait plus rien à sauver. Ni même la belle histoire usée du petit guerrier, ni le capital sympathie accumulé à Montréal, ni la naïveté de croire qu’un contrat à deux volets lui garantissant 450 000 dollars américains dans la AHL allait réécrire l’histoire. La Ligue nationale vient de lui dire, noir sur blanc, qu’il ne faisait plus partie de son plan.

Au moins, il peut se consoler: il a empoché un contrat de 2 ans et 2,2 M$ au total à Montréal. Puis, il s'est garanti un 450 000 dollars supplémentaires dans son compte en banque... pour aller remplir un chandail dans la AHL.

Il n’y a pas de mystère. Ce ballottage était prévisible. Inévitable. Programmé dès sa signature en juillet. Un contrat à deux volets, sans promesse, sans réel espoir. Juste un chèque garanti, et un billet pour les autobus de la ligue américaine.

Tous ceux qui suivaient le dossier savaient qu’il ne percerait pas l’alignement. Il n’était pas dans les plans de Kyle Dubas. Il n’était pas dans les plans du nouveau coach Dan Muse. Il n’était même pas dans les plans de Wilkes-Barre.

Mais Raphaël Harvey-Pinard, lui, y croyait encore. Et c’est ça qui rend le moment d’autant plus cruel. Car ce n’est pas seulement la fin d’un parcours. C’est la fin d’une illusion. Celle d’un joueur qui a confondu persvérance avec rêve impossible. Celle d’un Québécois qui pensait que l’effort pouvait encore compenser l’érosion du corps.

Le problème avec Raphaël Harvey-Pinard n’a jamais été mental. Ce gars-là, tout le monde le respecte. Dans les chambres, sur les bancs, dans les gradins. Mais le hockey professionnel, surtout en 2025, ne récompense plus les belles histoires. Il récompense la vitesse. Le timing. L’explosivité. Et de ce côté-là, Harvey-Pinard était déjà largué.

Depuis sa fracture à la jambe dans une partie de balle molle, il ne patine plus comme avant. Son coup de patin est devenu un poids. Déjà qu'il était lent comme une tortue, il n'avance tout simplement plus.

Il encaisse mal les coups, glisse en périphérie, arrive en retard sur les jeux. Il est lent. Trop lent. Et dans une ligue où les joueurs de soutien sont maintenant de véritables bolides capables de tuer des punitions et de marquer à court d’un homme, Raphaël Harvey-Pinard n’a plus sa place.

Les Penguins l’ont compris rapidement. Déjà à la fin du camp, il ne figurait dans aucune combinaison sérieuse. Il ne s’est même pas battu pour une place sur le quatrième trio. Pire : à mesure que les jours passaient, on le voyait reculer dans la hiérarchie.

Il n’était plus dans les projections. Il ne participait pas aux entraînements spéciaux. Il ne touchait pas la rondelle. Il faisait déjà partie du décor de l’équipe-école.

Et puis, ce matin, l’officialisation : ballottage. Trente-deux équipes auront 24 heures pour le réclamer. Mais personne ne le fera. Pourquoi? Parce que tout le monde connaît l’état de son dossier médical. Parce que tout le monde a vu ses chiffres à Laval. Parce que tout le monde a compris qu’il est désormais un joueur sans impact.

Il y a quelque chose de brutal à écrire cela. Car Harvey-Pinard représente beaucoup pour le hockey québécois. Un symbole. Un espoir. Un rappel que les “petits” peuvent encore percer. Mais la réalité l’a rattrapé. Et le verdict est sans appel.

Ce qui est encore plus cynique dans cette affaire, c’est le rôle joué par Kyle Dubas. On ne peut pas parler d’erreur. Dubas savait ce qu’il faisait. Il savait qu’en signant Harvey-Pinard, il achetait un peu de bonne volonté médiatique, quelques manchettes sur l’« effort », un semblant de profondeur locale.

Mais il n’a jamais eu l’intention de lui offrir une vraie opportunité. Ce contrat, c’était un une honte écrite d'avance.  Et maintenant que la poussière est retombée, on passe à la phase suivante : l’éjection.

Dubas ne veut plus de vétérans inutiles ou de plombiers de la ligue américaine. Il veut tasser les restes. Il veut transformer l’alignement des Penguins en un terrain vague sur lequel reconstruire. Et Harvey-Pinard n’est pas un matériau recyclable. Il est trop usé. Trop limité. Trop brisé.

Pour Harvey-Pinard, il ne reste qu’une issue : l’Europe. Mais même là, il est peut-être déjà trop tard. Il y a quelques mois encore, il aurait pu décrocher un contrat à Lausanne, à Fribourg, à Genève. Un salaire net de 300 000 $, une voiture, un logement, un horaire humain. Mais depuis, les recruteurs européens ont aussi vu les mêmes images que nous. Un joueur en retard. Un joueur effacé. Un joueur à bout.

Les clubs suisses, même ceux du bas de tableau, ne veulent pas de problèmes physiques. Ils veulent du rendement. De l’énergie. Du flair. Ce qu’offrait Harvey-Pinard en 2023. Mais ce qu’il n’offre plus aujourd’hui.

S’il trouve une place, ce sera peut-être en Allemagne, ou en Autriche. Peut-être même en France, où la Ligue Magnus accueille souvent les Québécois en fin de parcours. Mais il devra revoir ses attentes. Ce ne sera pas 450 000 $. Ce sera 60 000 €. Avec un studio en périphérie et un char manuel.

C’est ça, aujourd’hui, la réalité de Raphaël Harvey-Pinard. Un gars au ballottage. Ignoré par 32 équipes. Abandonné par le Canadien. Et instrumentalisé par Pittsburgh.

Le plus triste, c’est qu’il ne méritait pas ça. Mais le hockey n’est pas une affaire de mérite. C’est une affaire de résultats. Et les siens sont en chute libre. Un total de 19 points à Laval l’an dernier. Une épaule en morceaux. Une jambe qui grince. Et un moral probablement en miettes.

Le public l’a aimé. Il a incarné quelque chose. Mais il n’a jamais été un joueur de la LNH. Pas dans le sens moderne du terme. Il a été un moment. Une bouffée d’air dans une saison morte. Une anomalie passagère.

Aujourd’hui, il est à la croisée des chemins. S’il n’est pas réclamé, et il ne le sera pas, il aura une décision à prendre. Il va encaisser son 450 000 boulettes.

Puis, il devra décider s'il cherche un autre contrat dans la ligue américaine ou plier bagage et recommencer à zéro. En Europe. En silence. En oubli.

Car le monde du hockey avance vite. Et il ne regarde pas derrière.

Harvey-Pinard, c’est fini. Et c’est ça, la vérité que personne n’osait dire à voix haute.

Mais le ballottage l’a criée ce matin.

Sans appel.