Logan Cooley vient de frapper un coup de circuit. Huit ans, 80 millions de dollars. Le centre de 21 ans, devenu le visage du Mammoth de Salt Lake City, vient non seulement de s’assurer une sécurité financière énorme, mais aussi d’envoyer un message brutal à toute la cuvée du repêchage 2022 : il est désormais le joueur le mieux payé de sa génération.
Pendant ce temps, Juraj Slafkovský, premier choix au total, touche 7,6 millions par saison pour les huit prochainea années.
Une belle somme, certes, mais qui paraît soudain modeste quand on voit l’ampleur de ce que Cooley est en train de bâtir en Utah.
Depuis le début de la saison 2025-2026, Logan Cooley n’en finit plus d’épater. Huit buts, quatre passes, douze points en 11 matchs. Une production de superstar.
Chez les joueurs de 23 ans et moins, il est déjà au sommet de la LNH pour le nombre de buts, et dans le top-3 pour les points.
Et ce n’est pas un hasard : depuis son entrée dans la Ligue, il cumule 53 buts et 68 passes pour 121 points en 168 matchs. Une moyenne de 0,72 point par rencontre, qui témoigne d’une progression incroyable.
À Montréal, Slafkovský a parcouru un chemin beaucoup plus compliqué. 47 buts, 70 passes, 117 points en 211 matchs. Une moyenne de 0,55 point par match. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : l’un produit au rythme d’un premier trio établi, l’autre peine encore à s’imposer comme joueur de concession. Mais le dossier est loin d’être aussi simple.
Car, selon plusieurs analystes québécois, dont Dany Dubé, le Slafkovský d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec le jeune ailier brouillon de 2023.
« Slafkovský est rendu un maître dans la récupération de rondelles, dit Dubé. C’est un des meilleurs au monde dans cette facette du jeu. Il frappe, il provoque, il use les défenseurs. »
Cette phrase résume tout. Slafkovský n’est pas un marqueur d’élite comme Cooley, mais il représente un profil unique dans le vestiaire montréalais : un ailier puissant, dominant physiquement, capable de créer du chaos dans le territoire adverse et d’ouvrir des espaces pour Suzuki et Caufield.
Son apport ne se mesure pas seulement en points. Il fatigue les défensives, il protège la rondelle comme peu de joueurs de son âge, et il incarne cette dimension de « power forward » que le Canadien n’avait pas eue depuis John LeClair.
Mais pendant ce temps, Cooley accumule les points dans un environnement offensif parfait : il joue au centre, il a des ailiers rapides, il est utilisé 22 minutes par soir, et l’équipe tourne autour de lui.
À Montréal, Slafkovský évolue dans une structure beaucoup plus prudente, où Martin St-Louis lui demande d’abord de sécuriser les replis, de protéger la rondelle et de jouer sans tricher.
Mais la question qui se pose, surtout, est celle des séries éliminatoires. Oui, Cooley va sans doute finir avec 80 points et plus cette saison, mais comment réagira-t-il quand les espaces se refermeront ?
Slafkovský, lui, est bâti pour élever son intensité dans les moments importants. On l’a vu dans les matchs serrés et robustes dans les duels contre Ottawa et Toronto: il adore le contact. Ce n’est pas un joueur de saison régulière. C’est un joueur de printemps.
Sur le plan comptable, la différence entre les deux contrats saute aux yeux : Cooley coûtera 19,2 millions de plus que Slafkovský sur huit ans.
C’est énorme dans un monde de plafond salarial serré. Slafkovský à 7,6 M$ demeure un excellent rapport qualité-prix, surtout si son jeu physique continue de progresser et s’il devient un incontournable dans le top-6 pour la prochaine décennie.
Dans le camp de Cooley, les négociations ont été musclées. Il a refusé une première offre de 9,5 millions par année, convaincu qu’il méritait davantage.
Et il a eu raison. Son contrat de 10 M$ annuels le place au même niveau que les meilleurs attaquants au monde entier. C’est un "statement" clair : il ne veut pas seulement être comparé aux jeunes de 2022, il veut être vu comme l’un des 10 meilleurs centres offensifs de la LNH.
L’autre facteur à ne pas négliger, c’est le contexte organisationnel. À Salt Lake City, Cooley joue dans un environnement où tout est construit autour de la jeunesse.
Ryan Smith, le propriétaire du Mammoth, l’a dit :
« Il fait partie de notre futur. C’est la pierre angulaire de notre projet. »
Les installations, la stabilité de l’entraîneur, la pression médiatique inexistante, tout favorise la performance en Utah.
À Montréal, Slafkovský vit dans un autre univers. Chaque présence est analysée, chaque erreur amplifiée. Un joueur de 21 ans en Utah a le temps de se tromper.
Un joueur de 21 ans à Montréal doit justifier chaque dollar de son contrat. Et malgré tout, le Slovaque tient le coup. Il sourit toujours devant les caméras, il apprend, il progresse. Il ne deviendra jamais un marqueur naturel comme Cooley, mais il incarne une forme de courage qui plaît énormément au CH.
Au fond, cette signature de Cooley vient raviver un vieux débat. Le CH a-t-il commis une erreur en repêchant Slafkovský au premier rang ?
Certains continueront de le croire, surtout en voyant le contrat de Cooley et ses 12 points en 11 matchs. Mais la vérité, c’est que le CH ne cherchait pas un « flash » offensif.
Cooley est spectaculaire, mais Slaf est durable. L’un brille dès aujourd’hui, l’autre sera peut-être celui qu’on voudra avoir en série dans trois ans, quand la bataille fera rage.
Cooley a choisi la lumière, Slafkovský travaille dans l’ombre. Les deux sont des visages de leur franchise respective, et les deux ont raison à leur façon.
Mais à long terme, c’est peut-être le CH qui rira le dernier : 7,6 millions pour un joueur de puissance, complet, encore en développement, contre 10 millions pour un marqueur flamboyant qui n’a pas encore connu l’adversité.
Le débat est loin d’être clos. Mais en signant ce contrat, Logan Cooley vient de rappeler à tout le monde, Slafkovský compris, que dans sa tête, il est le meilleur joueur de cette cuvée 2022.
Et le plus riche...
Ouch. Cette rivalité risque d’animer les comparaisons pour les dix prochaines années. Mais au niveau du compte en banque, le débat est déjà terminée...
