156 millions de dollars: Valérie Plante écartée à jamais

156 millions de dollars: Valérie Plante écartée à jamais

Par David Garel le 2025-07-31

C’est un événement rare dans le triste feuilleton de l’effondrement municipal montréalais : pour une fois, Valérie Plante n’est pas directement responsable du dernier scandale d’envergure.

Non, cette fois, le feu vient d’Ottawa. Et il brûle fort. Un contrat de 156 millions de dollars, offert par le fédéral à Duroking Construction, une entreprise pourtant suspendue pour deux ans par la Ville de Montréal elle-même.

Une claque monumentale pour la mairesse. Une humiliation publique. Et une preuve supplémentaire que plus personne, même dans les hautes sphères du gouvernement, ne respecte Valérie Plante, tout comme les citoyens qu’elle prétend encore représenter.

Parce qu’il faut bien le rappeler : Duroking est sur liste noire à Montréal. Elle a mené un chantier désastreux dans Pointe-Saint-Charles, si mal exécuté qu’une rue a été excavée et refermée à répétition pendant quatre ans, pour un contrat qui devait en durer deux.

Des dizaines d’avertissements ont été déposés. Résultat : bannissement pour deux ans par la Commission permanente sur l’examen des contrats. Une rare décision municipale qui avait suscité un rare consensus. Duroking? Dehors!

Et pourtant, voilà que cette même entreprise décroche, sans gêne, un contrat public de 156 millions de dollars sur territoire montréalais, octroyé directement par la société fédérale des Ponts Jacques-Cartier et Champlain (PJCCI), sous prétexte que les travaux se déroulent « sur des terrains fédéraux ».

On ne pouvait pas trouver insulte plus claire au pouvoir de la Ville. C’est un contournement, une manœuvre, un pied de nez.

Et Valérie Plante? Mise devant le fait accompli. Son administration est court-circuitée. Son autorité, ridiculisée.

Elle qui a multiplié les bourdes en matière de gestion (taxes, contraventions, salaires, déneigement, itinérance) se retrouve cette fois piégée par une décision qu’elle n’a pas prise, mais qui la ridiculise quand même.

On l’imagine, en ce moment, fulminante. Cette fois, la patate chaude ne vient pas de ses erreurs à elle. Elle vient d’un gouvernement fédéral qui n’en a rien à faire de son autorité.

On ne l’a pas consultée. On ne lui a rien demandé. On ne lui a même pas laissé la chance de dire non. Pourtant, elle est mairesse de Montréal. Elle devrait avoir son mot à dire quand on investit 156 millions sur son propre territoire.

Mais la vérité est brutale : plus personne n’écoute Valérie Plante. Le fédéral fait ce qu’il veut, sans même un appel de courtoisie.

Et pourquoi l’écouterait-on encore? C’est elle qui a transformé Montréal en chantier permanent. C’est elle qui a imposé aux contribuables des hausses de taxes annuelles au-dessus de l’inflation.

C’est elle qui a laissé les ordures s’empiler, les stations de métro s’effondrer, et les services municipaux s’enfoncer dans l’inefficacité.

Elle a fait fuir la confiance, même dans son propre camp. Ses absences répétées, ses déplacements inutiles à l’étranger, ses vidéos touristiques pendant les tempêtes de neige, sa gestion improvisée des crises, ses dépenses de restaurant et de vin aux frais des citoyens, tout ça a fragilisé sa crédibilité.

Et maintenant, le fédéral en profite. Il passe par-dessus elle comme si elle n’était qu’un pion décoratif.

Et pourtant, ironiquement, c’est exactement le genre de scandale que Valérie Plante aurait pu éviter. Elle avait exclu Duroking.

Elle avait fait ce qu’il fallait. Mais dans cette fédération brisée, le fédéral peut faire fi des décisions municipales. Résultat : ce sont les Montréalais qui vont vivre avec les conséquences. Encore.

Ce contrat, rappelons-le, concerne la reconfiguration complète de l’autoroute Bonaventure, un tronçon de 2,5 km censé devenir un boulevard urbain d’ici 2029.

Un corridor vert, des arbres, des pistes cyclables, une promenade piétonne. Le genre de projet que Valérie Plante adore sur papier.

Mais voilà qu’on en confie les rênes à une entreprise qu’elle-même jugeait incompétente. Elle est obligée de se taire, de regarder passer le bulldozer fédéral sur son autorité déjà bien amochée.

Et dans l’opinion publique, ce n’est pas tant Duroking qui choque. C’est ce double discours. Ce sentiment d’être pris en otage par des élites qui jouent aux dés avec notre argent.

Valérie Plante, si rapide à parler de climat et de justice sociale, est aujourd’hui réduite au silence, comme une figurante dans un spectacle qu’elle croyait diriger.

Mais attention : qu’elle ne se pense pas blanchie pour autant. Si elle ne porte pas la responsabilité directe de cette gifle fédérale, elle en porte la responsabilité structurelle.

Car c’est elle qui a créé cette gouvernance vacillante, ce vide de leadership dans lequel s’engouffrent maintenant tous les niveaux de gouvernement.

Ce n’est pas pour rien qu’elle n’a pas été informée. Ce n’est pas pour rien qu’on n’a pas eu besoin d’elle. On ne respecte plus son autorité, ni son jugement.

À force d’imposer sans écouter, à force de régner par dogme plutôt que par dialogue, elle s’est aliénée tout le monde, citoyens, commerçants, cols bleus, médias et maintenant même ses homologues à Ottawa.

Et la colère de Valérie Plante ne changera rien. Elle peut bien tempêter dans les couloirs de l’Hôtel de Ville. Elle peut bien convoquer des points de presse ou mandater ses porte-parole.

La décision est prise. Le contrat est signé. Et Montréal devra vivre avec. Elle aura beau crier à l’injustice, c’est trop tard. Le message est clair : même quand elle a raison, on ne veut plus l’entendre.

C’est ça, le vrai drame de cette histoire. Le silence de Valérie Plante ne choque même plus. Ce qui choque, c’est l’indifférence. Le fait qu’on ait contourné sa volonté sans même prendre le temps de la contredire. Parce qu’on sait qu’elle ne pèse plus rien.

Et pendant ce temps, ses erreurs passées continuent de s’accumuler. Les contraventions pleuvent sur les automobilistes pour financer une administration en ruine.

Le métro est en retard, les ordures s’empilent, les commerçants crient à l’aide, les résidents désertent le centre-ville.

Montréal s’effondre lentement. Et même quand ce n’est pas elle qui appuie sur la gâchette, Valérie Plante reste celle qui a préparé le terrain à ce chaos.

Alors oui, pour une fois, ce n’est pas elle qui a signé le contrat honteux. Mais c’est elle qui a rendu ce genre d’affront possible.

Elle a brisé l’autorité municipale au point de la rendre dispensable. Elle a cédé le terrain moral, politique, et institutionnel.

Résultat : elle est aujourd’hui témoin impuissante d’une trahison… qu’elle a elle-même rendue inévitable.